SAS infuse, lui aussi, l’IA générative dans sa plateforme Viya
Lors de sa conférence Innovate à Las Vegas, SAS a dévoilé une série de fonctionnalités visant à aider les business analysts à accéder plus efficacement aux données et à les analyser, notamment en lançant un assistant propulsé à l’IA générative ainsi que des templates d’applications et de modèles mêlant GenAI et machine learning.
Basé à Cary, en Caroline du Nord, SAS Institute est un éditeur établi de longue date. Depuis quelques années, Viya est devenue sa plateforme de data science et d’analytique principale. Il fournit par ailleurs des solutions verticalisées par industrie, adaptées aux besoins des clients qui utilisent des données pour des applications telles que la gestion des risques et la détection des fraudes.
En 2019, l’éditeur a injecté 1 milliard de dollars dans le développement de fonctionnalités d’IA « traditionnelle », un investissement renouvelé en mai 2023 pour un montant identique. Contrairement à de nombreux éditeurs dont Microsoft et Tableau qui, fin 2022 et début 2023, ont rapidement annoncé qu’ils intégreraient des modèles d’IA générative, SAS a fait preuve de prudence en raison de préoccupations liées à la précision et à la sécurité.
Toutefois, dès juin 2023, Bryan Harris, EVP et CTO de SAS Institute, expliquait au MagIT que l’éditeur prévoyait de développer des assistants et des infusions avec des LLM du marché. Il se refusait, en revanche, à développer ses propres modèles de langage.
La situation a officiellement changé en septembre dernier. SAS développe certaines capacités, telles qu’un copilote, ainsi que des outils d’IA plus distincts.
SAS veut (surtout) générer des données synthétiques
Par exemple, Data Maker, un générateur de données synthétiques actuellement en préversion privée, devrait aider les entreprises qui ne disposent pas de suffisamment de données pour entraîner des modèles LLM ou ML, ainsi que pour propulser des cas d’usage liés à la simulation et aux jumeaux numériques.
Les LLM, dont GPT-4 ou Llama 2, sont entraînés sur des données publiques et peuvent répondre avec précision à des requêtes liées à ces données. Toutefois, ils n’ont aucune idée des ventes hebdomadaires d’une entreprise à Paris pendant les mois d’hiver. En l’absence de données suffisantes, les modèles d’IA générative sont susceptibles de fournir des résultats incorrects, des hallucinations, qui peuvent induire en erreur si elles ne sont pas corrigées.
Data Maker doit créer des données synthétiques qui imitent statistiquement les données réelles d’une organisation. En outre, il doit protèger les informations sensibles (PII) afin qu’elles ne soient pas accidentellement répliquées et exposées.
Cette solution est quelque peu unique chez les éditeurs de solutions analytiques, selon Doug Henschen, analyste chez Constellation Research.
« La partie qui se démarque pour moi est Data Maker », avance-t-il. « SAS est l’un des rares éditeurs à parler de la nécessité de générer des données synthétiques et à y proposer une solution. Constellation estime que la pénurie de données limitera la précision et l’efficacité des systèmes basés sur l’IA ».
Mike Leone, analyste au sein d’Enterprise Strategy Group (ESG) de TechTarget [également propriétaire du MagIT], fait remarquer que, selon recherches d’ESG, près de la moitié des organisations utilisent régulièrement des données synthétiques pour entraîner des modèles, soit en remplacement, soit pour augmenter des données réelles. Par conséquent, SAS Data Maker est une vouée à devenir une fonctionnalité importante de SAS Viya. « Elle s’aligne très bien sur les attentes du marché », déclare-t-il.
Toujours auprès du MagIT, Bryan Harris notait non pas la pertinence des grands modèles de langage, mais l’effet des interfaces comme ChatGPT et Gemini sur les usagers. Le CTO avait compris qu’ils « conditionneraient » les clients dans leur manière d’interagir avec des systèmes d’Intelligence artificielle. Dont acte.
La plateforme Viya aura son Copilot
En ce sens, Viya Copilot, en préversion privée, vise à améliorer l’efficacité des business analysts selon SAS. Actuellement en préversion privée, cet assistant est conçu pour réduire les tâches fastidieuses telles que la génération de code et la mise en évidence des lacunes de connaissances dans les applications.
« Les capacités offertes par Viya Copilot… sont très importantes », déclare Mike Leone. Il ajoute que les recherches de Constellation Research montrent qu’environ 1 organisation sur 4 menant des cas d’usage GenAI cite les chatbots en premier lieu.
En particulier, de nombreuses organisations considèrent les assistants IA comme un moyen d'ouvrir la BI et l'analytique à un plus grand nombre d’employés, poursuit-il.
Si Viya Copilot semble nouveau pour les clients de SAS, les utilisateurs d’autres plateformes de gestion de données et d’analytique disposent déjà d’outils similaires.
Par exemple, Microsoft a dévoilé des plans pour ajouter des capacités de copilotage dans Power BI en mai 2023 et a fait de même pour sa nouvelle plateforme Fabric en novembre. En outre, Domo et Tableau ont récemment présenté leurs assistants IA, tandis que MicroStrategy a non seulement dévoilé de telles capacités en octobre, mais les a également lancées en disponibilité générale.
Et comme Viya Copilot, la majorité des assistants analytiques propulsés à l'IA sont en préversion. En outre, l’adoption de ces outils fait partie des objectifs de la plupart des entreprises plutôt que de leurs projets immédiats, selon Doug Henschen.
« Les grands clients qui font de l’analytique et de l’IA à grande échelle ne changent pas de cheval rapidement en fonction de telle ou telle nouvelle fonctionnalité à la mode », souligne-t-il. « En fait, un grand nombre d’entreprises et de [directeurs de l’expérience] sont très prudents à l’égard de la GenAI ».
En ce qui concerne la perception selon laquelle SAS est peut-être à la traîne par rapport à ses concurrents, Bryan Harris, répond qu’il est plus important que SAS réussisse l’intégration de l’IA générative plutôt que d’être le premier à le faire.
« Nous ne sommes pas une société qui s’enorgueillit de vendre de la poudre aux yeux », affirme M. Harris. « Nous sommes une société qui s’enorgueillit de ses résultats. Le succès d’une entreprise vieille de 47 ans repose sur les résultats, pas sur le battage médiatique ».
SAS s’adresse à une clientèle de grandes entreprises souvent engagées dans des secteurs hautement réglementés, martèle le CTO. Par conséquent, avant d’introduire de nouvelles fonctionnalités, SAS doit s’assurer qu’elles sont sécurisées et qu’elles donnent des résultats précis.
« Les nombreux concurrents qui parlent d’IA générative ne sont pas présents dans des secteurs réglementés et n’ont pas à s’inquiéter des mêmes enjeux. Désormais, ils se rendent compte que cela ne va pas fonctionner comme ils le pensaient ».
En sus de Data Maker et Vya Copilot, SAS a présenté :
- SAS Applied AI and Modeling, des templates d’applications et des modèles d’IA spécifiques à des industries. Ils devraient être disponibles à la fin de cette année sous forme d’extensions autonomes.
- Des cartes de modèles dans SAS Viya, une fonction en préversion privée qui permet de générer automatiquement des fiches contenant des informations comme la précision, le niveau d’équité, les possibles dérives et la traçabilité du modèle à des fins de transparence.
- Viya Workbench, un environnement pour développer des applications d’IA, d’abord présenté en septembre en 2023 et qui devrait être en disponibilité générale à la fin du deuxième trimestre. Il inclut des outils de préparation, d’exploration et d’analyse de données ainsi que de « développement » de modèles de machine learning.
- La création d’un comité consultatif consacré à la gouvernance de l’IA afin d’aider les clients souhaitant s’appuyer de plus en plus sur des systèmes d’IA à éclairer leurs décisions.
Combinés, les ajouts de SAS démontrent un effort concerté pour aider les clients à obtenir une IA de confiance, selon Mike Leone.
Udo Sglavo, vice-président responsable de l’IA appliquée et de la R&D chez SAS, précise pour sa part que SAS Applied AI and Modeling constituaient l’un des projets les plus importants en cours de développement chez l’éditeur.
Comme il l'a déjà fait par le passé, l’éditeur prévoit de lancer dans un premier temps des applications et modèles d’IA conçus pour les secteurs de la supply chain, de la banque, de la finance, de la santé et de l’administration publique, et d’en proposer ensuite des dizaines d’autres.
« Il s’agit d’une extension de notre portefeuille. Au fil des ans, nous avons réussi à créer une plateforme incluant des solutions sectorielles. Nous allons cibler des problèmes industriels spécifiques et les résoudre à l’aide d’un modèle… L’objectif est de se concentrer sur une application commerciale », affirme Udo Sglavo.
L’avenir de l’analytique se joue aussi dans l’informatique quantique, selon Bryan Harris (CTO, SAS)
Au-delà des annonces lors de SAS Innovate, l’éditeur prévoit d’ajouter des capacités d’IA générative pour développer des flux de données, des modèles et des tableaux de bord, selon Bryan Harris. L’optimisation de la gestion et de la qualité des données grâce à l’IA est également un point important.
À plus long terme, SAS prévoit de s’emparer du sujet de l’informatique quantique appliquée à l’analytique et à la data science, informe le CTO. SAS n'entend pas construire ses propres ordinateurs quantiques, mais il développe déjà des architectures hybrides qui s’appuient sur des capacités quantiques (le CTO ne précise pas s’il s’agit de machines équipées de puces quantiques ou de simulation) pour accélérer des traitements réalisés à partir d’ordinateurs traditionnels.
« Nous obtenons des résultats prometteurs », affirme Bryan Harris. « La complexité de certains problèmes exige des approches inhabituelles pour trouver des solutions. Tout ne peut pas être résolu par un seul algorithme ».
Doug Henschen, quant à lui, aimerait que SAS ne se contente pas d’introduire des capacités d’IA, mais qu'elles soient le plus rapidement disponibles en production.
« Le rythme de l’innovation s’accélère constamment, en particulier dans le domaine de l’IA généragtive, c’est pourquoi j’aimerais que ces annonces donnent lieu à des préversions publiques et à des mises à disposition générale le plus rapidement possible », conclut-il.
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