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Emploi : Comment l’IA réduit les besoins en humains dans la gestion de talents
L’IA impacte déjà de nombreux services de l’entreprise. En première ligne des usages, les fonctions RH sont largement cernées : nouveaux outils, accélérations des processus de recrutement, risque sur l’emploi, transformation de l’approche des candidats… Les recruteurs doivent demeurer l’élément humain, mais les évolutions font la part belle à l’IA.
L’IA affecte les stratégies d’acquisition de talents mises en place par les entreprises et a d’ores et déjà conduit à des réductions de personnel. D’autres devraient suivre. De nouveaux chiffres mis en avant par Lighthouse Research & Advisory montrent ainsi qu’environ 40 % des 1 200 entreprises interrogées ont moins de recruteurs aujourd’hui qu’il y a quelques années, et ce notamment du fait de l’adoption d’outils où l’IA prend une part de plus en plus importante.
Les résultats de l’étude 2024 Talent Acquisition Trends de Lighthouse – qui intègrent également les réponses de 1 000 candidats – sont alignés sur les tendances observées en matière de licenciements dans le secteur IT. Les recruteurs sont souvent parmi les premiers à se voir remerciés lorsque les entreprises réduisent leurs effectifs. Une tendance qui laisse supposer que même lorsque les embauches dans l’industrie reprendront, le nombre de recruteurs ne sera pas forcément le même…
Pour Ben Eubanks, directeur de recherche du cabinet d’analyse qui s’exprimait à l’occasion d’un forum en ligne organisé récemment, il faut ainsi encore s’attendre à ce que l’IA entraîne une réduction des effectifs dans le domaine de l’acquisition de talents. Les postes tels que les coordinateurs de planification ont été les premiers à disparaître, remplacés par des outils d’IA.
Ben Eubanks fait cependant remarquer que la plupart des candidats à l’emploi utilisent désormais l’IA au cours du processus d’embauche. Il s’agit par exemple d’exploiter l’analyse des entretiens Zoom afin d’obtenir un retour d’information immédiat ou encore d’utiliser des assistants susceptibles d’aider à postuler à un emploi et à adapter le curriculum vitae à des offres d’emploi spécifiques.
Résultats : « Si ces outils d’aide à la candidature peuvent être utiles aujourd’hui, ils compliqueront à terme la tâche des recruteurs qui devront examiner des CV qui “se ressemblent tous” », explique Ben Eubanks.
Une difficulté qui constituerait donc un espoir pour le futur des recruteurs en général. En dépit des capacités croissantes de l’IA, il y aura encore de la place pour des améliorations issues de l’ingénierie humaine. Sarah Faupel, responsable du département d’acquisition de talents informatiques chez Enterprise Mobility (qui regroupe des entreprises telles que les loueurs de voitures Alamo et Enterprise) explique ainsi comment son entreprise a amélioré son processus d’embauche.
En utilisant une approche par panel pour les entretiens, plutôt que des approches individuelles ou par équipe, Enterprise Mobility a réussi à accélérer les délais d’embauche. Ce changement a permis d’améliorer l’expérience des candidats, qui n’ont plus besoin de revenir pour plusieurs entretiens. Une réponse directe à l’accélération par l’IA des échanges sur le marché de l’emploi avec « les bons talents qui disparaissent très rapidement du marché », explique Sarah Faupel.
Le match Humain-IA est lancé
Pour ce qui est de l’avenir, Ben Eubanks estime que les entreprises utilisent de plus en plus les fonctions d’IA de leurs outils RH dans la recherche de candidats. L’heure est désormais à l’automatisation des aspects les plus transactionnels du processus de recrutement. Il met toutefois en garde contre une automatisation excessive, en particulier pour les postes à responsabilité ou qualifiés, soulignant que l’IA ne pourra jamais reproduire la totalité de ce qu’un être humain peut fournir, notamment dans l’analyse et la perception des softs skills, ces compétences plus diffuses et plus en rapport avec les traits de la personnalité qu’avec le pur savoir-faire.
Raj Mukherjee, vice-président exécutif et directeur général d’Indeed, l’un des principaux acteurs de la recherche d’emploi en ligne, semble plus optimiste sur la capacité de l’IA à rapidement monter en performance. Indeed propose ainsi Smart Sourcing, un outil qui utilise l’IA pour recommander des candidats en fonction des exigences précises du poste.
S’appuyant sur les avancées de la GenAI, Smart Sourcing propose des analyses synthétiques sur les raisons pour lesquelles tel ou tel candidat correspond à tel ou tel poste. L’outil intègre également des fonctions de repêchage, là encore avec argumentaire à la clé, qui permettent de remonter des candidats plus éloignés du descriptif initial, mais qui pourraient aussi être intéressants, par exemple en dépit d’une moindre expérience que celle qui est recherchée. Pour Raj Mukherjee, cette fonction vise à augmenter les chances d’un candidat de postuler et d’être repéré. Côté entreprise, il s’agit de se voir proposer des profils moins stéréotypés par la précision de la requête, l’IA valorisant l’analyse de la qualité des expériences et des compétences plutôt que des variables trop rigides.