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GenAI : les entreprises françaises partagées entre enthousiasme, prudence et attentisme (études)
Des études du BCG X (Boston Consulting Group) et de Quantmetry (Capgemini) se dégage un sentiment d’ambivalence concernant l’adoption de l’IA générative. Si le premier document dépeint une plus forte maturité des organisations françaises par rapport à leurs consœurs européennes, le second souligne que les grands groupes se lancent avec prudence.
Dans son étude « AI Radar : From Potential to Profit with GenAI », le BCG X, une filiale du Boston Consulting Group, a interrogé 1 406 dirigeants concernant leurs ambitions en matière d’IA générative dans 50 pays.
Selon le sondage publié au mois de janvier, 71 % des cadres supérieurs interrogés affirment que leur entreprise va augmenter leurs investissements dans l’IT, soit 11 points de plus que l’année dernière, d’après le BCG X.
Le cloud et la cybersécurité arrivent bien évidemment en tête, mais 89 % des sondés mettent l’IA et l’IA générative dans le « top 3 » de leurs priorités. Environ 51 % des dirigeants placent même l’intelligence artificielle sur la première marche de ce podium.
En matière d’IA générative, les responsables font d’abord leur choix en fonction de la protection de leurs données et de leurs propriétés intellectuelles (39 %), la qualité des modèles/applications et leur performance (32 %) et leur coût (19 %).
Ils font davantage confiance aux géants technologiques (71 %) et aux éditeurs de logiciels (49 %), qu’aux spécialistes de la GenAI (38 %).
En moyenne, 85 % des dirigeants prévoient d’augmenter leur investissement dans l’IA. En Europe, 86 % de sondés (647 personnes) partagent cette affirmation, tandis que 92 % des 119 dirigeants français espèrent faire de même. « La France est à la pointe de l’IA et de la GenAI », énoncent les auteurs du rapport.
La France à « la pointe de l’IA et de la GenAI » en Europe, selon BCG X
Suivant les données collectées par le cabinet, un peu plus de la moitié des dirigeants français (51 %) s’attendent à des gains de productivité d’au moins 10 % grâce à ces investissements, contre 37 % en moyenne en Europe. C’est également 5 points de plus que la moyenne mondiale.
D’ailleurs, 31 % des dirigeants déclarent que leur entreprise se concentre sur les cas d’usage à l’échelle de l’IA et de l’IA générative, contre 23 % en moyenne en Europe.
En Europe, les dirigeants français sont aussi les plus satisfaits (41 % contre 34 % en Europe) en matière de déploiements de l’IA et les plus confiants (55 % contre 41 %) dans leurs connaissances de l’IA générative.
« Les entreprises pionnières prévoient de réaliser jusqu’à 1 milliard de dollars de gains de productivité, une somme qu’elles pourront notamment réinvestir dans de nouveaux projets », relate Sylvain Duranton, directeur monde du BCG X, dans un communiqué de presse. « Il n’est pas trop tard, les entreprises qui ont manqué la première vague de l’IA ont aujourd’hui une deuxième chance », envisage-t-il.
Derrière cet enthousiasme de façade, il faut bien noter que 59 % des dirigeants français ne sont pas satisfaits ou sont peu convaincus des projets IA en interne, tandis que 66 % du panel du BCG X partagent la même opinion.
Les trois raisons de cette insatisfaction sont le manque de compétences et de connaissances des collaborateurs, une feuille de route d’implémentation et d’investissement imprécise, ainsi que l’absence d’une stratégie pour une IA responsable.
IA générative : les entreprises adoptent une position attentiste
En outre, 62 % des 1 406 sondés attendent de voir comment la régulation en matière d’IA évoluera. Près de la moitié des dirigeants (46 %) considèrent que les employés devront se former pour adopter l’IA générative, et seulement 6 % des entreprises ont plus de 25 % des collaborateurs formés à l’usage des outils d’IA générative.
Selon la même étude, une très grande majorité des dirigeants – 90 % – ont une position attentiste. Plus précisément, ils patientent que la GenAI dépasse le stade de l’engouement où ils expérimentent à petite échelle.
Or, le BCG X estime que les entreprises qui réussissent leur adoption de l’intelligence artificielle voient grand.
Celles qui prévoient d’investir plus de 50 millions de dollars dans l’IA en 2024 (122 des dirigeants sondés partagent cette information) « sont 1,5 fois plus susceptibles d’anticiper des économies de plus de 10 % ». De même, 21 % de ces gros investisseurs ont déjà formé un quart de leurs effectifs. De manière plus générale, 81 % des personnes interrogées sont convaincues que l’IA générative impose la création de nouveaux rôles et 74 % d’entre eux considèrent que son adoption implique des changements organisationnels importants.
Par ailleurs, 72 % des dirigeants des entreprises qui investissent massivement sont déjà en train de se préparer à l’application de régulations spécifiques à l’IA, tandis que 38 % de l’ensemble des sondés font de même. Ils sont également 68 % à assurer que leur entreprise met en place des « garde-fous », contre la moitié de toutes les entreprises. Environ 27 % des dirigeants des entreprises qui prévoient d’investir plus de 50 millions de dollars dans l’IA en 2024 assurent que leur PDG dirige la stratégie d’IA responsable, contre 14 % de l’ensemble du panel.
À noter que le document diffusé par BCG X indique que 252 des dirigeants sondés travaillent pour des acteurs technologiques, des médias et des opérateurs de télécommunication. Le BCG ne précise pas si les fournisseurs de cloud et les éditeurs de logiciels, qui mettent fortement en avant leurs solutions d’IA générative, intègrent ce sondage. De plus, le cabinet ne distingue pas réellement les investissements dans l’IA de ceux dans l’IA générative.
Les grands groupes français se montrent prudents, selon Quantmetry
Dans son cinquième baromètre des directions data, Quantmetry, présente une vision plus restreinte, mais, semble-t-il, plus précise de l’adoption de l’IA et de la GenAI dans les entreprises françaises.
La filiale de Capgemini a interrogé 53 cadres responsables des données ou en lien direct avec le pôle « Data » de grandes organisations françaises (Assurance, banque, industrie, service public, transport, énergie, commerce de détail). En matière d’IA générative, cette étude qualitative dépeint des prises de décision marquées d’une prudence forte.
Selon Quantmetry, un quart des 53 personnes interrogées avaient déjà amorcé au moins une expérimentation d’IA générative en juillet 2023 et plus des deux tiers (68 %) ont lancé des groupes de travail stratégique sur le sujet.
Ces responsables expriment des craintes concernant la performance des modèles et leur propension à halluciner, les coûts de telles solutions, les impacts légaux sur la propriété intellectuelle, sur l’emploi et les compétences.
Les entreprises françaises sont plutôt attentistes, mais pas inactives, d’après Quantmetry. « Les entreprises entament à peine leur appropriation des IA génératives. Dans l’ensemble, elles cherchent à se forger de premières convictions sur la valeur, et à avancer avec prudence », écrivent les auteurs du baromètre.
De ce fait, Quantmetry entrevoit quatre priorités pour les dirigeants : le lancement « rapide » d’expérimentations pour tester les technologies dans des cas d’usage spécifiques, la formation des usagers, l’évaluation des risques, afin d’en dégager une stratégie et l’adaptation du modèle opérationnel aux spécificités de l’IA générative.
IA : des exigences à la hausse à cause de ChatGPT
Il n’est donc pas forcément nécessaire d’investir massivement, en tout cas pas dans l’immédiat. En revanche, l’émergence de la GenAI a déjà des effets sur les autres projets de gestion de données et d’IA des entreprises.
Olivier MonnierChief Data Officer, Matmut
« L’IA générative a fait remonter d’un cran les attentes du top management sur l’IA et la data », témoigne Olivier Monnier, Chief Data Officer chez la Matmut, auprès de Quantmetry. « On doit maintenant accompagner les dirigeants sur le sujet et vite communiquer sur ce que l’on peut faire, et sur ce que l’on ne peut pas faire, au risque sinon de faire des choses contre-productives ».
D’autant plus que l’implémentation des projets d’IA atteint un « cap de maturité ». D’après les dires des responsables, l’IA représentait 40 % des projets en 2023, contre 32 % en 2022 et 36 % en 2021. Presque 6 produits d’IA sur 10 sont désormais industrialisés, « soit 25 % de plus qu’en 2022 ». Or ce niveau de maturité varie suivant les entités métier. Enfin, « les directions data peinent toujours à briser leur plafond de verre actuel et à avoir un impact fort à l’échelle de l’entreprise et de son modèle d’affaires », signale Jonathan Cassaigne, directeur des expertises de Quantmetry. En clair, les entreprises ont encore du mal à estimer les effets des algorithmes sur leur revenu.
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