IA générative : avec Galaxy AI, Samsung s’adresse aussi aux entreprises
Bien qu’il ait présenté des fonctionnalités pour le grand public, le géant du mobile n’oublie pas les entreprises et compte bien les convaincre d’adopter ses produits boostés à l’IA générative, à commencer par ses smartphones Galaxy S24.
Ce 17 janvier, Samsung mène sa conférence Galaxy Unpacked à San José consacré à ses fleurons que sont les smartphones Galaxy S24, S24 Plus, et S24 Ultra, disponible le 31 janvier prochain à partir de 899, 1 149 et 1 449 euros.
En sus des arguments traditionnels liés aux performances techniques de ces ordinateurs de poche, Samsung cale sur la sortie des Galaxy S24 le déroulement de sa stratégie en matière d’IA.
Le groupe avait déjà profité du CES pour évoquer ses intentions d’équiper davantage ses ordinateurs, appareils mobiles et produits électroménagers de fonctions d’intelligence artificielle.
Samsung France a présenté à la presse Galaxy AI, une marque qui rassemble les fonctions d’IA embarquées dans les smartphones, ordinateurs et tablettes de la marque.
Ces capacités ne ciblent pas seulement les particuliers, mais également les professionnels, un marché important pour le groupe.
La vente de smartphones, tablettes, ordinateurs ainsi que de solutions dédiées aux entreprises représente environ 30 % des revenus de la division Mobile eXperience (MX) de Samsung, selon un porte-parole français du groupe. À titre d’information, la division MX de Samsung a généré un chiffre d’affaires de 30 billions de wons au troisième trimestre 2023, soit 20,49 milliards d’euros.
En ce sens, les clients professionnels bénéficieront des mêmes outils intégrés de l’écosystème Galaxy AI, dans un premier temps dans les versions Enterprise Edition des Galaxy S24, S24 Plus et Ultra.
Frédéric FauchèreDirecteur Division B2B Mobilité, Samsung Electronics France.
« En résumé, Galaxy AI, en BtoB, c’est pour nous la manière d’offrir un assistant business à tous les utilisateurs, quels que soient la taille de l’entreprise, son secteur, ou le profil des utilisateurs, qu’ils soient cols blancs ou cols bleus », avance Frédéric Fauchère, directeur Division B2B Mobilité chez Samsung Electronics France.
Une touche d’IA générative dans les applications des collaborateurs
Les premières fonctionnalités disponibles dans Galaxy AI ajoutent, surtout, une couche d’IA générative par-dessus des fonctions présentes de longue date dans les smartphones Android, dont ceux de Samsung.
Ainsi, le groupe coréen agrémente l’enregistreur vocal des produits de la gamme Galaxy S24 d’une fonction de transcription automatique. Outre la création d’un fichier texte, celle-ci permet de générer des résumés des conversations en quelques points. Samsung assure que son dictaphone « intelligent » est idéal pour accélérer la production de compte rendu de réunions : il peut distinguer jusqu’à dix intervenants.
Dans la même veine, son application de prises de note, Samsung Notes, bénéficie désormais d’une fonction de formatage automatique. Une fois la note rédigée, l’utilisateur peut appuyer sur une icône du clavier virtuel Samsung qui enclenchera des suggestions de mise en page. Suivant la thématique abordée dans la note, Notes génère des images de couverture afin de retrouver plus facilement les documents produits.
En outre, des modèles traduisent « instantanément » les appels téléphoniques, par messages interposés, et les échanges en face à face. « Interprètre », la fonction consacrée en échange en face à face, ne nécessite pas de connexion Internet. « Live Translate », qui se charge des appels et des SMS, s’appuie sur Knox pour conserver la confidentialité des discussions, selon le constructeur.
Reste à juger de la qualité de ces interprètes.
Intégrée dans le clavier Samsung, une capacité de Speech to text permet non seulement de rédiger des messages, mais également d’ajouter des émojis suivant l’intonation de la voix du possesseur du smartphone. Le clavier virtuel du Galaxy S24 inclut par ailleurs une fonction d’IA générative (exclusive) afin d’obtenir des suggestions de réécriture de messages.
Enfin, les Galaxy S24 sont les premiers smartphones de Samsung à inclure des fonctionnalités de navigation Web « boostées à l’IA ». Compatible avec la plupart des applications intégrées, la fonction « Entourer pour chercher » permet d’enclencher une requête sur un lieu ou un objet dans une image après l’avoir encerclé d’un geste du doigt. Pour des besoins de veille, il est possible de traduire et de résumer des articles accessibles depuis le navigateur Samsung Internet.
Toutes ces fonctions d’IA sont compatibles avec une centaine de langues, dont le français, mais seulement 14 d’entre elles sont préinstallées sur le smartphone.
Un partenariat « pluriannuel » avec Google Cloud
Ce descriptif laisse quelques indices sur les implications techniques de ces fonctionnalités.
De fait, les modules d’IA embarqués dans les smartphones de Samsung sont à la fois issus d’un travail de R&D et d’un partenariat avec Google Cloud.
Samsung développe principalement les fonctions de compréhension de langage, de traduction et de speech to text embarqués directement dans les appareils. Comme faisceau de preuve de ces travaux internes, il suffit de consulter le site Web Samsung Research pour constater que les chercheurs du groupe coréen s’intéressent de très près à l’explicabilité des modèles NLU, à la traduction automatique, à l’exécution de réseaux de neurones sur des appareils aux capacités limitées, à l’optimisation des assistants vocaux, à la détection des accents, ou encore à un ensemble de techniques de computer vision.
Quant aux fonctions d’IA générative, Samsung s’appuie pour l’heure sur les technologies de Google.
Les applications des Galaxy S24 appelleront plus particulièrement le modèle Gemini Pro depuis la plateforme Vertex AI, un grand modèle de langage doté d’une fenêtre de contexte de 32 000 tokens. Pour la génération d’images, notamment les couvertures des notes, Samsung s’appuie sur le modèle Imagen 2 de Google, également exploité pour éditer des photos marquées d’un filigrane. Techniquement, cela veut dire que les applications d’IA générative nécessitent une connexion à Internet et une connexion à un compte Samsung dans la plupart des cas. La fonction « entourer pour chercher », exploite, elle, les capacités de vision par ordinateur de Google Lens. Pour autant, Samsung assure que les données des utilisateurs ne quitteront pas l’appareil.
À noter que les appareils de Samsung bénéficient de Gemini Nano (1,8 ou 3,2 milliards de paramètres, suivant la version) à travers Android 14. Comme les technologies d’IA du Coréen, le plus petit modèle de cette collection de LLM est cette fois-ci propulsé par le NPU (Neural Processing Unit) de l’appareil, un accélérateur dédié à l’IA embarquée. Ici, il s’agit de composants intégrés dans les SoC Snapdragon 8 Gen3 de Qualcomm (sous le nom Hexagon) du S24 Ultra et Exynos 2400 de Samsung qui animent les Galaxy S24 et S24 Plus. Certains smartphones de la marque équipés d’un NPU bénéficieront rétroactivement des fonctionnalités de Galaxy AI, mais le constructeur n’a pas précisé lesquels.
Selon Google Cloud, le fabricant coréen est également l’un des premiers à exploiter les capacités de Gemini Ultra, le LLM le plus capacitaire du géant du cloud. Là encore, les deux partenaires n’en détaillent pas les usages.
Samsung mise sur la « collaboration ouverte »
Ce partenariat pluriannuel n’est pas exclusif. En sus de développer sa propre collection de modèles de langages Gauss, Samsung a présenté le 9 janvier un partenariat avec Microsoft. La fonction « Link to Windows » permet de connecter les Galaxy S24 et les autres avec les ordinateurs de la gamme Galaxy Book4 exécutant Windows 11. Avec Copilot, l’assistant GenAI de Microsoft, il est d’ailleurs possible de trouver, « de lire et de rechercher » des SMS enregistrés dans les smartphones Galaxy connectés au Book4. Pour le reste, Samsung indique que les NPU des processeurs Intel Ultra 5 et 7 de ses ordinateurs portables sont exploités pour exécuter les copilotes intégrés dans Word, Excel et PowerPoint.
« Le large portefeuille d’appareils performants de Samsung, ainsi que la poursuite d’une collaboration ouverte contribueront à mettre l’IA et l’hyperconnectivité à la portée de tous », a déclaré Jong-Hee Han, vice-président du conseil d’administration de Samsung, PDG et directeur de la division DX (Device eXperience), lors d’une conférence au CES 2024 de Las Vegas.
En ce sens, IBM est mentionné comme membre de l’écosystème Galaxy AI. Big Blue pourrait développer pour le compte de ses clients des applications reposant sur sa plateforme d’IA générative qui exploitent les capacités des équipements de Samsung.
D’autres partenaires pourraient rejoindre cet écosystème. Un porte-parole français du groupe coréen fait comprendre au MagIT qu’il n’est surtout pas question de se fermer des portes alors que l’adoption de l’IA générative n’en est qu’à ses prémisses.
S’adapter à des cycles de vente plus longs
Samsung et IBM collaborent régulièrement concernant le développement de la 5G et de la plateforme de cybersécurité/MDM (Mobile Device Management) Samsung Knox.
Connectivité, cybersécurité et robustesse des appareils : voilà les thématiques régulièrement évoquées par Samsung auprès de ses clients professionnels.
Ainsi, les Galaxy S24 estampillés Enterprise Edition bénéficieront de trois ans de garantie commerciale, de sept versions d’OS, de 7 ans de mises à jour de sécurité (au lieu de cinq précédemment) et d’un an d’accès gratuit aux fonctionnalités de la suite Knox. Les appareils resteront disponibles pendant deux ans au catalogue de Samsung.
Le constructeur a également présenté le smartphone et la tablette durcis Galaxy XCover7 et Galaxy Tab Active5, disponibles à la vente dès ce mois de janvier.
« Selon une étude d’IDC, les premiers critères de choix des terminaux pour les travailleurs en première ligne sont la fiabilité du matériel, la facilité d’utilisation, leur résistance aux incidents ainsi que leur capacité à fonctionner de manière optimale dans des conditions difficiles », assure Carole Moukagni, chef de produit smartphones et tablette chez Samsung France.
Affublés de la norme IP68, les appareils sont certifiés MIL-STD-810H (une méthode de tests du ministère de la Défense étasunien), ce qui indique qu’ils ont été soumis et ont réussi des tests de chute, de résistance à l’humidité, à la poussière, à des températures extrêmes, aux vibrations et à l’altitude.
La tablette Galaxy Tab Active5 dispose d’une batterie amovible et peut fonctionner sur secteur sans en être équipée (par exemple, quand l’appareil propulse un point de vente dans la restauration rapide ou un kiosque). Cette batterie, vendue comme un accessoire, sera disponible cinq ans au catalogue du constructeur. Les autres pièces détachées seront disponibles pendant sept ans.
Ces appareils-là, compatibles 5G, Wifi 6 et dotés d’un port POGO, bénéficieront de 5 versions d’OS et de 5 ans de mise à jour de sécurité. Enterprise Edition oblige, la garantie commerciale est portée à trois ans. Ils sont également enrôlables dans la plateforme Samsung Knox.
Il faut dire que les entreprises changent moins souvent leurs appareils qu’auparavant. Selon Frédéric Fauchère, les entreprises renouvellent leurs parcs d’équipements mobiles tous les 36 mois environ. Cela s’explique par des enjeux économiques, mais les entreprises tentent aussi de réduire leur empreinte carbone.
La tablette et le smartphone sont également équipés d’un bouton programmable pouvant être exploité par des éditeurs tiers de diverses solutions, pour le push to talk, entre autres. Ils peuvent aussi servir de terminaux de paiement.
En France, les clients sont les grands noms de la distribution, dont Systèmes U (déploiement de 4 500 smartphones Xcover) et de l’industrie, par exemple Thales, « mais également tout le secteur public, à savoir les collectivités territoriales et l’administration centralisée », indique Frédéric Fauchère. Le Comité de direction des Jeux olympiques, lui, a commandé 5 000 ordinateurs Galaxy Book2 pro pour équiper ses collaborateurs, dans ses locaux franciliens, les athlètes et les volontaires.
La division française de Samsung a mis en place un écosystème de partenaires locaux, animés par des accessoiristes et des éditeurs de logiciels consacrés à la mobilité dans différents secteurs : sécurité, restauration, santé, industrie, etc.