Cet article fait partie de notre guide: Stockage : guide de la stratégie de NetApp

« Nous permettons aux entreprises d’être pilotées par les données » (George Kurian, NetApp)

Dans cette interview, George Kurian, le PDG de NetApp, explique au MagIT comment sa stratégie d’unification des solutions de stockage favorise les prises de décision et la sécurité des informations.

Lors de l’événement NetApp Insight 2023 qui se tenait la semaine dernière à Las Vegas, le fournisseur de solutions de stockage NetApp s’est efforcé de démontrer qu’il était plus avance que ses concurrents sur les sujets technologiques actuels.

Concernant les migrations en cloud, le cloud hybride, ou encore le multicloud, NetApp propose le « stockage unifié ». Ce n’est pas chez lui la capacité d’une baie à offrir tous les modes d’accès, mais la faculté à chapeauter tous ses équipements (sur site) et tous ses services de stockage (en cloud) de la même manière. La clé de voûte de cette stratégie tient à l’installation chez AWS, Azure, GCP et d’autres hébergeurs de cloud de services de stockage conçus sur les mêmes technologies que celles des baies NetApp. Avec une seule interface pour tout faire, les entreprises réduiraient ainsi la complexité et économiseraient des ressources, du temps.

Pour adresser le besoin de performances à bas coûts, qui serait exprimé par les PME et succursales, NetApp lance aussi une nouvelle gamme de baies de SSD, les ASA de Série C, qui attaque frontalement Pure Storage sur sa spécialité : le stockage en mode bloc peu cher.

Cette offre matérielle, un peu moins coûteuse et un peu plus capacitive que celles de son concurrent, présente surtout l’intérêt d’être livrée avec des fonctions de haut niveau, qu’il n’ait plus besoin d’acheter à part. Sauvegardes et plan de reprise d’activité, pour ne parler que des plus utilisées, se déploient en quelques clics. Mais, surtout, cette richesse fonctionnelle est la même pour tous les cas d’usage, que l’entreprise cliente soit une PME ou un grand compte, et qu’elle utilise une baie ASA C ou n’importe quelle autre baie NetApp, ou n’importe quel service de stockage NetApp en cloud.

Plus avance sur les économies et sur l’ergonomie, certes, mais l’argumentation est plus floue quand on approfondit les cas d’usage. Quels avantages plus techniques NetApp propose-t-il aux entreprises qui utilisent des bases de données performantes, de l’IA ou des services en cloud ? Et, puis, quid de son approche commerciale, ne serait-ce que par rapport aux fonctions qu’il propose désormais dans son système OnTap, mais que les entreprises utilisaient déjà au travers d’autres produits ?

Pour y voir plus clair, LeMagIT a pu s’entretenir avec George Kurian, le PDG de NetApp. Interview.

LeMagIT : Au-delà des prix et de la facilité d’utilisation, quel avantage vos solutions représentent-elles pour les métiers ?

George Kurian : En proposant un stockage unifié, exempt de silos, qui intègre à tous les endroits où vous stockez vos données – dans votre datacenter ou en cloud – des services aussi évolués que la protection, la sécurité, la confidentialité, la gouvernance, l’observabilité, l’automatisation, nous permettons aux entreprises d’être pilotées par les données. C’est important, car, selon une étude récente du Boston Consulting Group, les entreprises axées sur les données sont les mieux à même de comprendre rapidement les perturbations et de les transformer en opportunités commerciales.

Mais il n'est pas facile d'être piloté par les données. Cela nécessite une approche organisationnelle et une plateforme technologique pour porter cette approche. La vocation de notre offre est de rendre cela possible.

LeMagIT : Mais vos baies AFF étaient déjà unifiées, dans le sens où elles proposaient du stockage en mode fichier et en mode bloc. Pourquoi lancer une nouvelle gamme rendrait-il votre offre plus unifiée ?

George Kurian : Nos clients nous ont dit qu’ils avaient besoin, dans certains cas où ils n’utilisent pas de fichiers, d’environnements optimisés pour le mode bloc. Ils voulaient bénéficier de contrôleurs symétriques, de contrôleurs actifs-actifs, d’une architecture NVMe de bout en bout. Donc d’un produit qui allait au-delà de l’offre AFF.

Mais, dans le même temps, ils souhaitaient bénéficier d'un système d'exploitation commun, d'un modèle de sécurité commun, d'un modèle de gestion commun, d'une méthode commune pour gérer l'ensemble de leur infrastructure. Nous sommes les seuls à le proposer.

LeMagIT : Vous intégrez à présent dans vos solutions des fonctions de sécurité qui étaient jusque-là fournies par des éditeurs tiers. Pourquoi prendre leur place ?

George Kurian : Je pense qu'au fil du temps tous les fournisseurs de technologies devront renforcer la sécurité de leurs produits. Cela fait partie de ce que nous appelons le « Security by design », et il y a à l’heure actuelle de nombreuses exigences du gouvernement américain sur ce sujet.

Sa thèse, à laquelle nous souscrivons, est que si les fournisseurs de technologies n'interviennent pas dès la conception pour résoudre le problème de la sécurité, alors aucune mise à niveau via des produits de sécurité tiers ne résoudra le problème. Parce que les entreprises les plus touchées sont celles qui ne disposent pas des ressources suffisantes pour déployer tous les produits de sécurité nécessaires.

LeMagIT : Vous parlez beaucoup d’IA. Mais, concrètement, en quoi vos solutions favorisent-elles l’IA ?

George Kurian : Beaucoup de travaux sont en cours entre nos équipes, les fournisseurs de cloud et les fournisseurs de solutions d'IA. L’un des sujets est le besoin pour une entreprise d’avoir plusieurs versions de ses modèles et des ensembles de données associés. Il y a l’enjeu de répliquer ces données pour chaque version sans pour autant faire croître le stockage. Il y a aussi l’enjeu d’accéder à de la traçabilité pour mieux comprendre à quel moment un modèle dérive d’un autre. C’est sur ces points-là que nous axons à l’heure actuelle nos développements.

LeMagIT : Favoriser la migration de vos clients vers le cloud n’est-il pas un peu risqué quand on vend des baies pour datacenters ?

George Kurian : Au contraire. Nous disions déjà en 2013 que le marché serait hybride [à cheval entre le datacenter et le cloud, NDR] et multicloud [à cheval entre plusieurs clouds, NDR]. Nous avions prédit que, pour certaines catégories d’applications, les entreprises géreraient elles-mêmes des environnements et, pour d’autres, qu’elles feraient appel à différents fournisseurs de cloud. Et nous le pensons toujours.

Aujourd’hui, en moyenne, une grande entreprise a 25 à 30% de ses applications qui sont exécutées en cloud public. Une banque européenne qui exerce des activités à l’international, par exemple, considère qu’elle a la capacité d'avoir ses propres équipes technologiques et informatiques dans ses datacenters de Madrid, mais qu’elle n’a pas l’expertise pour le faire en Amérique latine. Et il se peut qu’elle veuille donc exécuter les traitements pour l’Amérique latine dans le cloud. Nous rendons ces deux scénarios totalement possibles et exactement identiques, de sorte que leur coexistence ne crée aucun risque.

LeMagIT : En parlant de cloud, vos services de stockage ont été déployés chez des hyperscalers américains. Quelle solution proposez-vous aux entreprises qui veulent du cloud souverain ?

George Kurian : Nous travaillons également avec de grands fournisseurs de cloud français. Et nous aurons les mêmes fonctionnalités chez eux que celles aujourd’hui disponibles chez AWS, Azure et GCP. Après, attention, nos capacités technologiques seront les mêmes pour tout le monde, mais la manière dont elles seront utilisées variera en fonction du fournisseur de cloud. Je pense par exemple aux connexions entre les services de stockage NetApp et les services propres aux hébergeurs, notamment sur l’IA.

Mais au-delà de la question de savoir si nous allons répliquer nos services chez OBS ou OVHcloud, je pense que votre question concerne la confidentialité des données. Une question d’autant plus importante à l’ère de l’IA qui apprend en analysant les données. À ce sujet, nous disposons de fonctionnalités qui vous permettent de comprendre un cas d’usage, de comprendre quelles informations se trouvent sur notre espace de stockage en examinant réellement le contenu de ces données. Vous pouvez donc empêcher l'intégration de certaines informations confidentielles, sensibles dans des modèles.

Enfin, nous comprenons parfaitement les besoins de souveraineté exprimés en France et pour nous, ce n’est pas une question de savoir si des exceptions sont légitimes, car nous ne pensons pas que le monde fonctionnera selon un cadre réglementaire unique.

Nous travaillons pour tous les grands gouvernements de l'UE et, dans la mesure où nous sommes un acteur majeur sur le marché européen, nous devrons également répondre aux attentes de ce marché. Nous voyons cela comme une opportunité et une responsabilité. Nous allons donc continuer à innover dans ce domaine.

LeMagIT : Cette année, vos concurrents ont beaucoup parlé de leur programme de vente de matériels par souscriptions (Apex chez Dell, Greenlake chez HPE, etc.). Pourquoi ne parlez-vous pas autant du vôtre, Keystone ?

George Kurian : Nous avons toujours pensé que c'est au client de choisir, pas au fournisseur d’imposer. Nous nous sommes très bien débrouillés avec notre service se souscriptions Keystone. Il s'est développé très rapidement et nous avons un nombre croissant de partenaires qui le proposent à nos clients. Mais nous ne souscrivons pas à ce que disent certains de nos concurrents, à savoir que le monde entier voudrait remplacer ses achats par des abonnements. Nous sommes à l’écoute de nos clients. Notre communication autour de Keystone reflète les vraies attentes des entreprises.

 

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