NetApp : « nous revendiquons d’optimiser nos offres pour les hyperscalers »
Dans cette interview, le constructeur revient sur le processus qui a permis à AWS, Azure et maintenant GCP de proposer des services de stockage compatibles OnTap. Et l’intérêt de telles offres pour les entreprises.
Lors de l’événement récent Google Next, l’hyperscaler GCP a dévoilé un nouveau service de stockage de fichiers 100 % compatible avec le système de NetApp : Cloud Volumes Services. Cela signifie que ce système de stockage en ligne propose exactement les mêmes règles d’accès que les partages NFS et SMB (appelé CIFS chez NetApp) que les baies fonctionnant sous l’OS OnTap.
Pêle-mêle, il est possible de faire du Thin Provisionning, c’est-à-dire surallouer de la capacité à chaque application en pariant qu’elles n’utiliseront pas ensemble toute la capacité d’un volume. Et, quand la capacité vient à manquer, on peut l’augmenter à volonté sans que cela impacte les performances (ce qui, selon NetApp, serait particulièrement important dans le cadre des applications SAP).
De plus, le volume est directement reconnu par VMware pour qu’il puisse y stocker les images de ses machines virtuelles. Le volume est aussi immédiatement pris en charge par les outils de sauvegarde/restauration/reprise d’activité de l’écosystème NetApp. Il est possible de mettre en place un basculement automatique entre plusieurs volumes OnTap pour des besoins de haute disponibilité.
Globalement, Cloud Volumes Services simplifie la démarche d’un fonctionnement en cloud hybride pour une entreprise qui a déjà déployé des solutions NetApp chez elle et souhaite basculer sur le cloud de Google certaines fonctions. Parmi celles-ci, citons l’hébergement des sauvegardes, la possibilité d’une infrastructure de secours pour exécuter des machines virtuelles (VMware ou pas), ou encore une infrastructure payable à l’usage pour traiter des données qui ne sont pas soumises à des règles de souveraineté. Tous les produits NetApp prévus pour un tel fonctionnement portent la marque « BlueXP ».
NetApp propose depuis longtemps de tels services de stockage OnTap qu’il installe et facture lui-même chez GCP, AWS, Azure, IBM Cloud et d’autres hébergeurs de cloud locaux. Ces offres s’appellent « Cloud Volumes OnTap ». Mais depuis ces dernières années, ces offres sont doublées de services de stockage OnTap directement gérés et facturés par les hyperscalers. Ainsi, Cloud Volumes Services est en réalité la déclinaison sur GCP de ce qui s’appelait déjà Amazon FSx for OnTap chez AWS et Azure NetApp Files chez Azure.
Dans quel but ? C’est l’une des questions que nous avons posées à Ronen Schwartz, le Directeur général de la division Cloud Storage chez NetApp. L’interview qui suit tâche également de comprendre comment NetApp entend faire évoluer une telle stratégie, notamment dans le contexte nouveau de l’engouement pour les traitements liés à l’intelligence artificielle.
LeMagIT : Quel est l’intérêt d’un service de stockage OnTap proposé par un hyperscaler plutôt que par NetApp lui-même ?
Ronen Schwartz : Il y a d’abord un intérêt comptable, car le trafic des données chez l’hyperscaler est facturé avec le stockage qui génère ce trafic. Il y a aussi l’intérêt d’une intégration plus étroite entre le système de stockage qu’utilise une entreprise et les fonctions que propose un hyperscaler.
Il s’agit d’un véritable portage commun d’OnTap sur l’infrastructure de GCP, de sorte que les fonctions comme les snapshots et la réplication entre sites sont au final exactement similaires à ce que nous proposons déjà dans les datacenters. Mais avec des fonctionnements optimisés.
Avec les équipes de Google, nous avons accordé OnTap aux fonctionnements de GCP, à ses rouages de sécurité, à la manière dont il communique avec ses propres services VMware, Kubernetes, Google Anthos ou encore d’IA. Cette intégration a nécessité un travail en profondeur, que nous avons entamé ensemble il y a plus d’un an.
Et puis, bien entendu, cette intégration a nécessité la mise en place d’un support plus étroitement lié entre NetApp et GCP. Nos équipes travaillent désormais main dans la main pour tout ce qui a trait au monitoring, à l’assistance, à l’automatisation.
LeMagIT : Mais, concrètement, quel est le profil d’une entreprise qui souscrit à une offre de stockage OnTap directement auprès d’un hyperscaler ?
Ronen Schwartz : Il y a deux profils. Le premier est celui d’une entreprise internationale qui sait qu’elle va avoir besoin de capacités de stockage, mais qui ne sait pas encore exactement dans quelles proportions selon ses régions. Ces entreprises ont besoin d’un contrat flexible et c’est ce que leur offrent les hyperscalers.
Le second profil est celui d’une entreprise qui s’engage dans un projet cloud, qui investit dans la transformation de ses applications et de ses pratiques vers le cloud, voire qui va créer des applications pour la première fois dans le cloud. Cette entreprise a besoin de faire des choix stratégiques d’infrastructure, comme elle en faisait dans le datacenter. Et nous avons constaté qu’elle préfère discuter de ces choix avec l’hyperscaler, plutôt qu’avec ses fournisseurs habituels d’infrastructure.
LeMagIT : Comment avez-vous réussi à convaincre les hyperscalers de travailler avec vous ?
Ronen Schwartz : Tout d’abord, nous avons eu une approche technique. Nous avons proposé d’utiliser leurs services natifs de manière à proposer un produit le plus optimisé possible.
Car c’est une chose d’interconnecter des produits avec les technologies des hyperscalers en utilisant leurs API publiques, ou en proposant des bundles sur leurs marketplaces. Mais c’en est une autre de proposer de travailler avec les équipes techniques d’un hyperscaler, d’être prêt à investir beaucoup d’énergie pour concevoir avec elles des fonctionnements très optimisés. Cette quête d’un haut degré d’intégration fait partie de nos valeurs.
Je pense que notre deuxième valeur est de permettre à l’hyperscaler de profiter de notre produit dans des services supplémentaires qu’il commercialise lui-même. Pour l’heure, ce sont ses fonctions d’automatisation, de supervision de la facturation. Demain, notre technologie profitera à d’autres services applicatifs, en optimisant leurs traitements dès le service de stockage qui les alimente en données.
Parmi ces traitements, citons l’IA, qui dépend fortement des données. Il est probable que vous nous verrez co-investir dans ce domaine avec Google, pour renforcer la pertinence des données des entreprises à la fois sur leurs sites et en cloud, en amont d’un traitement par un service d’IA de GCP.
Un autre exemple est celui de Kubernetes. Les applications en containers vont pouvoir bénéficier de fonctions inédites sur notre service de stockage persistant.
LeMagIT : Kubernetes ? Quelles fonctions allez-vous permettre que l’on ne trouve pas actuellement ?
Ronen Schwartz : La sauvegarde à 100 %. Les services de données d’OnTap fonctionneront pour le stockage comme pour les applications Kubernetes. Vous pourrez ainsi déplacer votre environnement Kubernetes avec toutes ses données d’instance en instance, en ayant la garantie qu’absolument tous vos clusters seront toujours sauvegardés.
Mais nos possibilités iront bien au-delà de la gestion d’un réseau de stockage pour Kubernetes, fonction que nous avions développée avec Astra Trident. Nous allons apporter une gestion complète des environnements Kubernetes. Et cette gestion complète que vous retrouverez sur nos offres, vous la retrouverez également imbriquée dans les services Kubernetes commercialisés par les hyperscalers.
LeMagIT : Et l’IA ? Les fournisseurs de stockage évoquent de plus en plus la collecte et la structuration des données en amont des moteurs d’IA générative. Allez-vous suivre cette voie ?
Ronen Schwartz : Nous développons actuellement différents aspects techniques de ces fonctions. Effectivement, il faut commencer par savoir amener les bonnes données jusqu’au cloud pour que les moteurs de Machine learning puissent les exploiter. Mais vous nous verrez également simplifier la montée en charge des modèles de nos clients, notamment au travers de bases de données vectorielles.