La « Content Supply Chain », nouvel eldorado d’Adobe
Face à la croissance exponentielles des besoins en contenus d’un marketing qui évolue vers « l’individualisation », Adobe a vanté, lors de son Summit EMEA, les mérites d’une véritable « Content Supply Chain » combinée à l’IA générative.
Le concept ne parle peut-être pas encore à tout le monde dans l’univers marketing et CX. Pourtant, la « Content Supply Chain » a été le fil directeur du Adobe Summit EMEA qui s’est tenu début juin à Londres.
Et pour cause, elle résume à elle seule les grandes lignes de la stratégie d’Adobe et de sa gamme – de Creative Cloud (outils pour créatifs) à Experience Cloud (marketing digital) en passant par Workfront (gestion de projets) ou Firefly (IA générative).
Qu’est-ce donc que la « Content Supply Chain » ?
La « chaîne logistique du contenu » désigne tout le « cycle de vie » (sic) des contenus numériques créés et utilisés par une entreprise pour ses diverses communications et ses actions commerciales.
Cette chaîne va de la création, au stockage (DAM, etc.), à la modification et à la déclinaison (stratégie de personnalisation) jusqu’à la diffusion (sites webs, réseaux sociaux, mailings, publicités, PLV, etc.) ; le tout dans un cadre maitrisé (gouvernance) et de manière collaborative au sein d’une équipe, entre départements, et avec des partenaires extérieurs (free-lance, agence, etc.).
« Dans la plupart des entreprises, la content supply chain s’apparente à un réseau de workflows et de systèmes déconnectés souvent chaotiques », affirme Adobe. Or dans le même temps, la demande de contenus explose sous les influences cumulées de l’ultra-personnalisation d’une part et de la multiplication des canaux de diffusion d’autre part, note Lionel Lemoine, Senior Director, Solution Consulting pour l’Europe de l’Ouest et du Sud chez Adobe.
De la personnalisation à l’individualisation, et le besoin exponentiel de contenus
« Au cours des deux années passées, la volumétrie de contenus à produire pour soutenir l’expérience digitale a été multipliée par deux », chiffre-t-il en s’appuyant sur une étude maison. « La perspective sur les deux ans à venir est un besoin multiplié par cinq ».
Pourquoi un tel bond ? Parce que le marketing passe de l’âge de la « personnalisation » à l’âge de « l’individualisation » des contacts (également appelée « personnification » par Gartner), répond-il.
« On sort de l’ère où l’on personnalisait l’expérience avec des “personas” […] Tout le monde veut être considéré comme un individu. Cela change fondamentalement le paradigme », en conclut Lionel Lemoine. « Pour avoir une expérience individualisée, une fois que l’on a une bonne compréhension [des clients], il faut ensuite créer les messages. C’est ce qui fait que la croissance des besoins de contenus est exponentielle ».
Pour Adobe, cette situation va rapidement devenir un problème pour les entreprises. Elle plaiderait en tout cas pour des suites de bout en bout, qui permettent d’interconnecter intimement les worflows, et pour l’utilisation de l’IA, que ce soit pour automatiser des tâches (tagging automatique dans un DAM, recommandation de segmentation dans une CDP, d’heures d’envoi de mails, etc.) ou pour générer les contenus.
L’IA générative pour pallier un manque à venir, pas pour remplacer les créatifs
« Historiquement, les entreprises ont besoin de plus en plus de contenus. Elles y arrivaient avec l’innovation dans nos produits » remet en perspective Lionel Lemoine.
Lionel LemoineAdobe
« Aujourd’hui, elles atteignent un plafond de verre. Quand il s’agissait de produire 10 % ou 20 % de plus de contenus, c’était possible sans nécessairement changer les habitudes de travail. Mais quand, avec le même budget, c’est quatre à cinq fois plus de contenus qu’il faut produire, ce n’est plus possible. Il faut repenser les manières de faire, il faut automatiser, impliquer des personnes qui ne sont pas des créatifs professionnels dans la production ou la déclinaison des visuels, et aussi passer à de nouveaux outils », liste Lionel Lemoine, qui évoque Workfront, Adobe Express (pour les non créatifs), la CDP, Journey Optimizer (pour l’activation). Et, évidemment, l’IA générative.
Firefly pour Entreprise, « légalement sûr », « exploitable »… et entraînable
Mais pas n’importe quelle IA générative. Adobe insiste. La sienne est « exploitable commercialement et légalement sûre ».
Annoncé à Londres, Firefly Enterprise a été entraîné sur des contenus premiums (payants) de la banque d’image Stock dont les auteurs ont donné leurs accords (et qui seront bientôt rémunérés en échange). « Vous êtes donc couverts d’un point de vue copyright », assure Lionel Lemoine.
Lionel LemoineAdobe
Cette offre « Enterprise » fait suite à celle lancée en mars, lors du Summit international d’Adobe à Las Vegas. En trois mois, ce premier Firefly aurait été utilisé pour générer plus de 200 millions d’images. Et en deux semaines, après son intégration dans Photoshop (en béta), pour 150 millions d’assets supplémentaire (des éléments de calques manipulables au sein d’une image), se félicite Adobe.
« Nous voyons l’IA générative comme un copilote des créatifs. […] Ils gardent le contrôle de ce qui est créé », souligne Lionel Lemoine pour différencier Firefly de Dall-E et autres Midjourney dont les prompts génèrent des images finies.
Adobe promet d’intégrer maintenant Firefly Entreprise dans toutes les briques de Creative Cloud, mais également côté CX dans des outils comme AEM Assets (son DAM).
Et, annonce majeure du Summit européen, il sera possible d’entraîner « son » Firefly avec les données de son entreprise, dans une instance privée et exclusive au client. « Si je suis une grande marque de luxe, avec des millions d’assets sur mes produits, Firefly pourra utiliser ma base de contenus [pour en générer d’autres]. Et je garde le contrôle total de mon branding », illustre Lionel Lemoine.
Démocratiser des outils puissants, mais pas toujours simples
Dans cette optique de bout en bout pour impliquer le plus de métiers, Adobe a également dévoilé Product Analytic. Cette brique fait remonter les tendances issues des parcours clients et les données des produits connectés (post-achats), en les présentant de manière intéressante non pas dans une optique marketing, mais dans une optique produit.
Reste que pour qu’une « solution de content supply chain automatise les processus, [et] permette la diffusion d’un contenu pertinent et efficace tout en assurant la conformité aux attentes de la clientèle et aux normes réglementaires » – comme le vante l’éditeur – il faut qu’elle soit réellement utilisée. Adobe s’attelle donc également au chantier de l'ergonomie.
Pour démocratiser Customer Journey Analytics, l’éditeur a par exemple dévoilé un chatbot. « Nous avons des produits premium qui vont très loin dans l’analyse des données. On peut faire pratiquement tout ce que l’on veut avec. Mais ce n’est pas pour autant simple d’accès à tout un chacun », concède Lionel Lemoine. « Avec ce bot, en posant vos questions, vous aurez directement une réponse (un dashboard ou du texte structuré) ». Et des « Intelligent captions » (des infobulles) expliqueront pourquoi tel élément d’un rapport mérite, peut-être, une attention particulière.
De la mine d’or à l’eldorado
Lionel LemoineAdobe
Au-delà de l’outil analytique, mais toujours dans cet esprit de simplification et de démocratisation, l’éditeur a sorti lors du Summit EMEA un « chatbot global », alias « Knowledge Chat », capable de compulser les bonnes informations dans tous les corpus d’Adobe. « Quand on a une mine d’or, il y a souvent beaucoup de galeries » compare Lionel Lemoine en plaisantant.
Ce chatbot devrait donc guider au mieux les utilisateurs, quels que soient leurs niveaux de compétences, dans les méandres de cette longue chaîne logistique de contenus, nouvel eldorado en puissance pour la quasi-totalité des produits d’Adobe.
Pour approfondir sur Gestion de la relation client (CRM)
-
IA : Adobe présente son outil de génération de vidéos à destination des entreprises
-
IA générative : Adobe enrichit Acrobat dans un marché de plus en plus concurrentiel
-
Adobe muscle Express pour les entreprises (avec encore plus d’IA générative)
-
Adobe : une plateforme de données colossale qui s’étoffe