Infinity’23 : Pega veut unifier processus et UX à travers une architecture distribuée
Pegasystems a présenté la future mise à jour de sa suite low-code/no-code Infinity. Outre une nouvelle cadence de mise à jour, l’éditeur fait de Kubernetes le réacteur de son architecture de microservices. D’un autre côté, il cherche à unifier les interfaces et les processus afin de mieux les analyser et les automatiser.
Première chose à retenir, il n’y aura pas de Pega Infinity 8.9 ou 9.0. Pegasystems a décidé d’adopter une nouvelle appellation pour ses versions de produit. Il faudra désormais parler de Pega Infinity’23. La modification paraît anecdotique. Que nenni.
D’abord, Pegasystems a modifié son cycle de mise à jour. Dorénavant, il livrera une version majeure par an, puis des « mises à jour continues ». Sous cette nouvelle appellation, la première version de Pega Infinity se nommera Q3 2023 et sera disponible à la fin du mois de juin. Les mises à jour incrémentales (par exemple, celles effectuées des raisons de sécurité) seront ajoutées au fur et mesure.
Pega découple d’un côté…
Surtout, ce changement de nom entérine un nouveau mode de déploiement standard pour la plateforme BPM. Dorénavant, Pega Platform ne sera plus déployée par défaut sur des machines virtuelles, mais à l’aide de conteneurs Docker sur Kubernetes. C’était déjà le cas avec Pega 8.8, mais l’éditeur annonce la couleur : ses clients doivent maintenant à se préparer à déployer leurs nouvelles applications sur Kubernetes. Ce sera le seul mode de déploiement disponible à partir de Pega Infinity’ 25.
Les applications existantes exécutées sur des VM seront supportées au moins jusqu’en 2025, mais elles ne bénéficieront pas forcément des nouveautés de la plateforme.
Si c’est un moyen pour Pega de pousser ses clients à adopter son offre cloud, la suite peut toujours être déployée en cloud privé ou sur site à l’aide d’une distribution de Kubernetes. L’éditeur fournit d’ailleurs les images Docker certifiées et les Helm Charts pour effectuer les déploiements sur K8s open source, MiniKube, Red Hat OpenShift et VMware Tanzu Kubernetes Grid Integrated Edition. Dans le cloud, il prend en charge AKS, EKS et GKS : les distributions Kubernetes d’Azure, AWS et GCP.
Est-ce à dire que Pega supportera les déploiements multicloud ? Pas pour l’instant. « La plupart de nos clients n’utilisent pas Pega sur plusieurs clouds », constate Ken Parmelee, Senior Director, Intelligent Automation Strategy chez Pegasystems.
Ken ParmeleeSenior Director, Intelligent Automation Strategy, Pegasystems
Pour autant, ces entreprises sont familières des architectures hybrides. « [Nos clients] utilisent notre plateforme sur site et dans un cloud. Certains d’entre eux ont opéré une migration. Par exemple, ils étaient sur Amazon, puis ils ont décidé de passer à Azure, mais même ce cas de figure est peu courant à l’heure actuelle ».
L’adoption d’une architecture orientée microservices entraîne l’externalisation de plusieurs SGBD tiers à savoir Elasticsearch, Hazelcast, Cassandra Decision Data Store et Kafka. Les clients qui les utilisent devront donc gérer eux-mêmes ces bases de données s’ils ne faisaient pas déjà. L’éditeur prévoit d’arrêter le support des services tiers embarqués dès la disponibilité de Pega Infinity’ 24.
Dans la même veine, depuis la version 8.8 de Pega Platform, le support de DB2 for z/OS a été déprécié.
… Et unifie de l’autre
Si ces changements sous le capot ne sont pas anodins pour les clients, il faut noter la volonté de Pega de simplifier l’expérience développeur. En ce sens, App Studio bénéficiera de librairies réutilisables. Les usagers de Pega Platform pourront partager des logiques métiers, des flux prébâtis pour les réutiliser dans d’autres applications.
De même, Constellation UX (auparavant nommé Cosmos React), le système de création d’UI/UX de Pega, a le droit à de nouveaux templates, patterns et composants pour « accélérer » la création d’applications front-end. L’éditeur annonce qu’il s’apprête à intégrer les préceptes du Web Content Accessibility Guidelines (WCAG 2.1) du W3C afin de rendre plus facilement accessibles les applications à tous les usagers, dont ceux atteints d’un handicap (déficiences visuelles, auditives, etc.).
« Il s’agit d’accélérer la conception d’applications en proposant une expérience unifiée. Par exemple, nos usagers peuvent apposer leur marque aux applications et délivrer une UX cohérente à leurs clients, peu importe le terminal », déclare Ken Parmelee. « En ce sens, nous voulons faciliter la standardisation des contrôles (les boutons, les menus, etc.) afin de rendre les applications évolutives ».
L’éditeur fournit par ailleurs les API DX. Elles servent à utiliser les front-end bâtis avec Pega ou, inversement, à intégrer des cas ou des composants back-end dans des applications front-end tierces.
Pour ce faire, il a développé des « starter packs » consacrés aux frameworks Angular, React, Vue, Salesforce Lighting (!) et le SDK Pega Mobile pour iOS. Les API DX s’appuient sur « un ensemble de points de terminaison REST orienté modèle » permettant « d’afficher, de créer, de mettre à jour des cas et des attributions ».
« L'objectif est que si vous utilisez un élément tiers pour bâtir votre front-end ou que vous avez déjà une application, vous pouvez toujours utiliser les services Pega dans cette application, que ce soit un élément visuel ou un processus », poursuit Ken Parmelee.
Dans cette veine, les API Constellation pourront servir à intégrer des workflows ou des documents issus de Pega Customer Service, une suite d’outils pour gérer des interactions client omnicanal (voix, mail, messagerie instantanée, chatbot, réseaux sociaux, etc.) dans des applications ou des portails tiers afin « d’offrir des parcours client de bout en bout ».
Par ailleurs, Pega a dévoilé en mai des portails en libre-service. Il s’agit, à partir de Constellation, de fournir une expérience simplifiée pour des usagers peu familiers avec le CASE management.
Cette recherche d’une forme de cohérence en matière d’UX va de pair avec la volonté d’unifier la gestion des processus. C’est tout l’intérêt de Pega Process Fabric, une architecture pour orchestrer des workflows à travers des applications distribuées depuis un Hub. Ainsi, à partir de Pega Infinity’23, les composants de Pega Customer Service pourront être suivis dans Process Fabric Hub via différents connecteurs. L’idée est de prioriser les tâches liées aux services client – par exemple, trier les messages par niveau d’urgence –, mais aussi de permettre aux agents de prendre des actions « depuis n’importe quelle application Pega ».
« De manière générale, il s’agit de relier différents outils ensemble. Par exemple, nos environnements de développement pouvaient fonctionner ensemble, mais ils n’étaient pas intégrés nativement », note Kim Parmelee. « C’est ce type de travaux que nous voulons mener ».
Process Mining : Pega infuse (enfin) EverFlow
Enfin, l’éditeur annonce la disponibilité générale de Pega Process Mining. Présentée il y a un mois, cette solution est issue de l’acquisition en mai 2022 de la startup brésilienne EverFlow.
Dans cette première version, l’éditeur a ajouté des connecteurs vers les applications Pega, a amélioré sa cartographie des processus, fourni plusieurs fonctions d’analyses de la performance, ainsi que l’analyse des causes profondes. Il est également possible de vérifier la conformité d’un processus en le comparant à un modèle BPMN, d’effectuer des simulations what-if, de personnaliser les KPI, de filtrer les types d’analyses à travers des tableaux de bord interactif.
Selon les préceptes du process mining, il est toujours possible d’utiliser les connecteurs conçus à l’origine par EverFlow pour ingérer des d’un CRM, d’un ERP ou de toute autre plateforme qui enregistre des logs événementiels (un ID, une donnée d’horodatage et un nom d’activité sont les champs minimums requis pour lancer une exploration des processus). Pour autant, Pega veut mettre l’accent sur son écosystème.
Ken ParmeleeSenior Director, Intelligent Automation Strategy, Pegasystems
« Notre outil de process mining est encore disponible en standalone, mais notre intention est de couvrir les besoins d’analyses des processus de nos clients. Pour autant, nous voulons rester dans la course face à nos compétiteurs », assure Ken Parmelee.
De fait, de nombreux éditeurs (SAP, Microsoft, Appian) en plus de quelques pure-players (dont Celonis) intègrent des capacités de process mining à des outils d’automatisation.
« Nous avons embarqué Everflow dans la plateforme de manière à l’intégrer avec nos outils Task Mining et RPA », déclare Ken Parmelee, « C’est intéressant d’avoir une vision des processus existants, mais il ne s’agit pas seulement de savoir où se trouve le problème, mais de le résoudre ».
Pour autant, Pega accuse un certain retard par rapport à ses compétiteurs, en premier lieu Appian qui a lancé un produit similaire il y a un an. Aussi, bien que prometteuse, la technologie n’est pas simple à mettre en place.