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IA et métiers : du fantasme à la réalité

Les IA génératives suscitent bien des fantasmes et des interrogations. Pour l’heure, elles semblent surtout appelées à faire évoluer des métiers existants. Mais non sans poser des questions d’éthique.

Pour l’heure, l’IA ne crée pas de nouveaux métiers ni ne les remplace ; elle en modifie les contours et les fait évoluer. Avec un appel d’air pour des compétences pointues sur tous les métiers qui manipulent et traitent de la donnée, comme l’explique Gad Chetboun, directeur pédagogique de IA School, une école privée du groupe GEMA. 

« Aujourd’hui, dans les métiers liés à l’IA, ceux qui sont capables de stocker de la donnée, de l’exploiter et de la faire parler se transforment profondément », estime ainsi Gad Chetboun, qui n’intègre pas l’IA générative dans son discours. En bref, tous les métiers où l’on doit traiter et manipuler en masse de la donnée : data analyst, data scientist, data miner, chief data officer, géomaticien, bio-informaticien, statisticien, métiers liés à la BI… 

Cela fait du monde et ce n’est pas vraiment nouveau, même si les développements émergents de l’IA concernent à peu près tous les domaines : habitudes de consommation, évolution du climat, transport, approvisionnement en eau, fintech, retail, etc. De nombreux modèles prédictifs actuels ne seraient sans doute pas possibles sans IA. 

Les salaires (de 30 à 60 k€) et les postes de l’APEC pour les métiers tels que data analyst ou data scientist suggèrent que le secteur est en plein essor : pas moins de 640 offres d’emplois sur des postes de data analyst, et 292 offres de data scientist, au 10 mai 2023. Et cela dans des secteurs aussi variés que les transports (RATP, SNCF), les sondages (Médiamétrie), la santé, la démarche green IT, les grandes collectivités…  

Dans les fiches de postes, on ne parle pas ou peu d’IA. Mais beaucoup de compilation, d’architecture, de traitement de bases de données, de deep learning, de big data, voire de création d’algorithmes de prédictibilité pour certaines des postes de data scientist. Le secteur est porteur : 87 % des étudiants qui sortent de l’IA School trouvent un emploi, « pour un Mastère en Intelligence Artificielle et Management » , selon Gad Chedoun. 

Katya Lainé, co-fondatrice de Talkr (assistants virtuels), présidente de la commission IA de Numeum, la branche du Syntec représentant les entreprises du numérique, recadre le sujet : « il ne faut pas situer le débat sur les métiers, mais plutôt sur les compétences », indique-t-elle. Et notamment la prise en compte de l’éthique dans tous les projets d’IA.  

Pas d’IA sans éthique

Qu’est-ce que l’éthique dans l’IA ? Vaste programme ! La Cnil s’était penchée dès 2017 sur la question, en publiant un rapport sur le sujet. Car, ce qui fait la différence de l’IA, c’est l’importance et la rapidité de consultation de données qu’elle permet de traiter, mais également sa capacité à automatiser par des scenarii divers tout un pan de gestion de la décision qui était jusqu’à présent humain. « Et c’est là », souligne Katya Lainé, « qu’on doit faire entrer l’éthique dans le débat sur les métiers de l’IA ». 

Numeum et un certain nombre de partenaires ont lancé une démarche Ethical IA, appuyée sur 3 initiatives fédératrices, pour éviter ou parer le plus possible les dérives de l’IA : un manifeste signé par les participants, la création d’une communauté, et un guide pratique avec une méthodologie et des outils. 

Ce guide, édité en septembre 2021, et présenté aux pouvoirs publics, pose clairement certaines questions et les principes de l’IA : « les dérives de certains systèmes d’IA et les dommages corporels posés par d’autres ont exacerbé la méfiance d’utilisateurs qui s’interrogent aujourd’hui sur la capacité des concepteurs de systèmes d’IA à maîtriser leurs créations […] Il devient donc urgent de penser ces derniers différemment. À cet effet, chaque IA doit respecter 6 principes fondamentaux : elle doit être respectueuse (de données personnelles), équitable (ne favoriser aucune discrimination), transparente, sûre (résistante aux cyberattaques), loyale dans ses relations avec les humains (ne faisant que ce qu’on attend d’elle), et surtout maîtrisée (elle reste sous le contrôle de l’être humain) ». 

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