Analytique et IA : SAS remet 1 milliard de dollars sur la table

Quatre ans après s’être engagé à investir un milliard de dollars dans des capacités d’intelligence augmentée sur une période de trois ans, SAS a dévoilé mardi des plans pour investir un autre milliard de dollars dans des capacités d’analytiques avancées et d’IA. Il prévoit surtout de compléter son portefeuille d’offres verticalisées.

SAS a utilisé une partie du milliard de dollars initial pour remanier Viya, une plateforme analytique que l’éditeur a lancée pour la première fois en 2016.

En plus de réarchitecturer Viya en 2020 pour la rendre entièrement cloud native et ajouter des fonctionnalités d’IA telles que le traitement du langage naturel, la vision par ordinateur et l’analyse prédictive, SAS a également beaucoup investi dans l’amélioration des performances de Viya. Cela aurait permis de minimiser le temps de traitement et d’améliorer l’utilisation de la mémoire, rappelle l’éditeur.

Il s’est aussi rapproché de Singlestore, éditeur d’une base de données in-memory HTAP, un partenariat présenté comme un moyen de favoriser la migration vers le cloud des clients on-premise et un vecteur d’accélération des performances de SAS Viya.

Un milliard de dollars et toujours plus d’offres verticalisées

En outre, SAS a décliné des offres spécifiques à des industries. Ces versions spécialisées sont conçues pour découvrir et gérer des indicateurs spécifiques à des domaines d’activité qu’une plateforme BI traditionnelle ne couvre pas nativement.

SAS a développé des solutions analytiques pour des secteurs tels que l’agriculture, la banque, l’éducation, la santé, l’assurance, le commerce de détail, les télécommunications et même le sport.

Cet engouement pour les offres verticalisées ne s’observe pas uniquement chez SAS. Databricks et Snowflake ont tous deux décliné des solutions pour les acteurs bancaires, du retail et plus récemment de l’industrie manufacturière.

Ces offres incluent, entre autres, des modèles et d’ensembles de données prédéfinis, et sont conçues pour simplifier l’intégration et de réduire le temps nécessaire afin de tirer parti de leurs opérations d’analytique.

Justement, SAS prévoit d’utiliser une grande partie du nouveau milliard de dollars pour étendre les fonctionnalités de ces offres spécifiques et d’en lancer de nouvelles.

C’est l’engagement qu’il a pris lors de sa conférence SAS Innovate cette semaine à Orlando, en Floride.

SAS prévoit de développer des versions spécifiques de sa plateforme pour les secteurs émergents tels que l’énergie durable et les secteurs de la santé. En outre, il prévoit de faire évoluer les versions existantes dédiées à des secteurs tels que la recherche biomédicale.

Selon Doug Henschen, analyste chez Constellation Research, il est judicieux de continuer à investir dans des outils destinés à diverses industries.

Bon nombre de grands groupes préfèrent concevoir des plateformes spécifiques composées de nombreux outils et ne se servent que d’une infime partie de ces solutions verticalisées, généralement celles qui permettent d’échanger des données avec leurs pairs. Cela ne se vérifierait pas chez les clients de SAS, d’après l’analyste.

« SAS tire la plus grande partie de ses revenus des solutions verticales pour l’industrie. »
Doug HenschenAnalyste, Constellation Research

« SAS tire la plus grande partie de ses revenus des solutions verticales pour l’industrie », souligne-t-il. « Les clients apprécient les capacités qui sont spécifiques aux besoins et aux cas d’usage de leur secteur, car cela signifie qu’ils bénéficieront d’une plus-value écourtée. De plus, il arrive souvent que les fonctionnalités développées pour un secteur puissent être mises à profit dans d’autres », justifie-t-il.

Jay Upchurch, vice-président exécutif et directeur des systèmes d’information de SAS, confirme que cette verticalisation profite à son employeur.

Et comme la pandémie de COVID-19 a frappé environ un an après l’engagement initial d’un milliard de dollars de SAS dans l’IA, l’éditeur a fini par fournir « des dispositions qui se sont avérées vitales en ces temps incertains », selon Jay Upchurch.

L’éditeur s’est d’abord concentré sur certains des secteurs les plus établis et les plus gourmands en données. Aujourd’hui, SAS espère faire de même pour d’autres domaines d’activité.

« Nous voulons aider nos clients à créer une entreprise résiliente », avance-t-il. « L’analytique, l’IA et le cloud contribuent à créer les bases de la résilience. Maintenant, nous essayons de comprendre comment généraliser cela à un large éventail de secteurs ».

SAS ne cède pas (encore) aux sirènes de l’IA générative

La formule pour la résilience n’inclut pas l’IA générative. Du moins, pas encore, selon M. Upchurch. Au lieu de cela, SAS continuera à se concentrer sur le machine learning traditionnel et le NLP, une de ses spécialités.

Alors que bon nombre d’éditeurs analytiques se sont engouffrés dans la brèche ouverte en novembre 2022 par ChatGPT pour annoncer des partenariats avec OpenAI, SAS s’est retenu.

Sisense, Salesforce, ThoughtSpot et Pyramid Analytics ont tous dévoilé des intégrations avec OpenAI. Lors de sa conférence annuelle, Qlik a présenté un prototype tout à fait convaincant. Mardi, Tableau, une filiale de Salesforce, a révélé une intégration avec Einstein GPT, l’offre reposant (pour le moment) sur les technologies du poulain de Microsoft. Dans un domaine adjacent, Informatica a dévoilé Claire GPT, un moyen de faire interagir ses algorithmes de gestion des métadonnées avec plusieurs grands modèles de langage (LLM).

Toutes ces belles annonces se matérialisent par des appels API à GPT-3.5 ou GPT 4, deux collections de grands modèles de langages mises sur pied par OpenAI pour générer des résumés, des explications ou des données. Ces produits n’existent que sous la forme de bêta ou d’accès anticipés très privés. Databricks, lui, a pris une voie alternative : il a développé ses propres modèles en s’appuyant sur les projets open source disponibles publiquement. Plus généralement, il propose à ses clients d’utiliser sa plateforme pour entraîner ou affiner l’entraînement de leurs propres LLM.

« Le pouvoir de cette technologie [l’IA générative] est tout à fait fascinant, mais tout le monde essaie encore de comprendre comment l’utiliser de manière responsable. »
Jay UpchurchVP exécutif et directeur des systèmes d’information, SAS

SAS se méfie encore des ressorts de l’IA générative et affiche donc une plus grande prudence. De fait, l’éditeur s’est engagé en faveur d’une IA responsable. Surtout, Reggie Townsend, vice-président de l’éthique des données chez SAS, fait partie du comité consultatif national sur l’intelligence artificielle du ministère américain du Commerce. Il travaille avec le gouvernement du président Joe Biden.

« Le pouvoir de cette technologie est tout à fait fascinant, mais tout le monde essaie encore de comprendre comment l’utiliser de manière responsable », résume Jay Upchurch.

L’une des principales préoccupations est la sécurité des LLM. ChatGPT a récemment fait l’objet d’une violation de données et certains pays ont interdit son utilisation en raison d’un manque potentiel de sécurité. Par ailleurs, l’exactitude des réponses générées par les LLM – ou l’absence de réponse – est une autre préoccupation.

Cela dit, SAS est intriguée par l’IA générative, tout comme le sont ses pairs, selon M. Upchurch.

L’éditeur a un partenariat étroit avec Microsoft, qui a investi 10 milliards de dollars dans OpenAI, et met en balance le risque de l’intégration de la technologie d’IA générative et ses avantages.

« L’aspect génératif est puissant », concède Jay Upchurch. « Les grands modèles de langage sont là pour rester. Nous aimons l’idée qu’ils peuvent contribuer à la productivité. Mais nous devons être très prudents. Leur utilisation doit se faire de manière responsable. Nous pensons que nous y parviendrons avec le temps, mais nous ne voulons pas nous précipiter sans comprendre les garde-fous nécessaires ».

C’est dans cette voie que s’est déjà engagé Nvidia, avec une solution certes imparfaite, mais concrète.

Des dettes techniques à régler

Plus terre à terre, SAS a annoncé des améliorations consacrées à Customer Intelligence 360, sa plateforme destinée aux spécialistes du marketing.

Il propose une nouvelle interface utilisateur, éliminant la nécessité d’écrire des requêtes en langage SQL pour définir les audiences et les autres attributs des clients. Les utilisateurs pourront ainsi obtenir des indicateurs leur permettant de personnaliser plus rapidement leurs relations avec leurs clients, selon SAS.

L’éditeur a aussi adopté l’approche Data Fabric, afin de connecter automatiquement les données clients d’une organisation à Customer Intelligence 360. Il ne serait plus nécessaire de déplacer et de copier les données.

« Cela promet un gain de temps et d’argent », anticipe Doug Henschen.

Par ailleurs, il ne faut pas oublier qu’une bonne portion des clients du spécialiste de l’analytique utilise encore SAS 9, la version legacy et on premise de la plateforme. L’éditeur veut « simplifier » le chemin de migration vers SAS Viya ainsi que les processus de déploiement de l’offre cloud native.

Enfin, Viya doit gagner davantage de connecteurs et d’intégrations avec les solutions tierces.

« SAS n’est plus un jardin clos où vous n’utilisez que notre langage et nos outils », insiste Jay Upchurch. « Nous avons déjà ouvert la plateforme à d’autres langages et nous voulons également permettre aux utilisateurs d’utiliser SAS dans leur environnement de développement en favorisant les intégrations ».

Doug Henschen, quant à lui, aimerait que SAS propose une version SaaS de sa plateforme. Viya est d’ores et déjà disponible sur plusieurs clouds, mais l’offre demeure self-managed.

« Faire de Viya une plateforme multicloud est la bonne direction », confirme-t-il. « La prochaine étape serait de la rendre disponible à la demande. Cela contribuera à réduire les coûts et facilitera le déploiement intercloud où vous pouvez déplacer des charges de travail entre les clouds si nécessaire ».

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