L’État au soutien d'alternatives souveraines à Office 365
Via Bpifrance, l’État va apporter un soutien financier à trois projets collaboratifs français, un domaine que la DINUM a identifié comme une « fragilité dans le numérique de l’État ». D’autres acteurs appellent également à diriger la commande publique vers les offres locales.
L’État veut accélérer le développement de suites collaboratives françaises qui puissent se positionner comme des alternatives souveraines crédibles à Office 365 de Microsoft et à Workspace de Google.
Bpifrance a lancé un appel à projets en 2022 pour identifier et sélectionner des éditeurs et des fournisseurs d’IT capables de répondre à ce défi. Les lauréats ont été dévoilés ce 6 mars 2023.
Trois suites collaboratives souveraines
Bpifrance a retenu les trois « attelages » suivants, composés en tout de 18 acteurs (Outscale - le cloud de Dassault Systèmes - et XWiki étant partenaires de plusieurs projets) :
- Le projet « CollabNext » : Jamespot, 3DS Outscale, Alinto, Clever Cloud, Datakeen, Glowbl, Wallix, XWiki et l’ENS Paris-Saclay,
- Le projet « IS Suites » : Interstis, 3DS Outscale, Blue Mind, Scille (Parsec), Belledonne communication, Tranquil IT System et XWiki,
- Et le projet porté par Wimi avec Watoo, Seald, XWiki et Linagora
Ils bénéficieront au total d’une aide de 23 millions € pour « passer à l’échelle » et les accompagner vers la qualification SecNumCloud dans sa version 3.2 (étape indispensable pour être « Cloud de Confiance »). Cette aide prendra la forme d'un « mix de subventions et d’avances remboursables », précise Bpifrance au MagIT.
Le projet collaboratif de la DINUM
Feuille de route de la DINUM
Le 9 mars, la nouvelle directrice de la DINUM, Stéphanie Schaer avait également évoqué le développement d’une suite bureautique et collaborative, dans la continuité de Tchap (alternative à WhatApp et à Signal) et de Resana, pour compléter le catalogue SNAP (sac à dos de l’agent public).
En conférence de presse, Stéphanie Schaer a fixé le plafond du coût de cette suite à une cinquantaine d’euros par utilisateur et par an.
« La DINUM constate au quotidien des fragilités certaines dans le numérique de l’État », avance sa feuille de route. Et précisément, une des fragilités identifiées – et questionnée par le député Philippe Latombe – est le collaboratif et la bureautique.
« La DINUM s’engage dans la structuration d’une offre en tant qu’opérateur de produits numériques interministériels mutualisés, en visant à apporter […] une alternative concurrentielle, évolutive et ergonomique pour les outils de bureautique », précise l’organisme interministériel.
« C’est un axe essentiel de souveraineté numérique de l’État », continue-t-il. « Il s’agit de disposer de solutions cloud, adaptées aux besoins de l’administration. Ces chantiers seront menés en collaboration étroite avec l’ANSSI pour une pleine prise en compte des enjeux de cybersécurité ».
Un autre trio entièrement labelisé par l'ANSSI
Le projet de la DINUM et ceux des lauréats de Bpifrance convergeront-ils ?
Stanislas de RémurCEO d'Oodrive
Pour l’instant le ministère de l’Économie (également chargée de la souveraineté numérique) parle de « soutien au développement » et pas d’achats publics. Plusieurs acteurs français appellent pourtant fortement de leurs vœux à utiliser cet autre levier.
Parmi eux, Stanislas de Rémur faisait remarquer dans les colonnes du MagIT que « les Américains soutiennent leurs leaders sectoriels en achetant leurs solutions et en les favorisant. Sur certaines parties du marché, aucun non-Américain ne peut entrer ».
Pour lui, la France et les Européens gagneraient à s’inspirer de cette approche. « L’achat public peut aider à renforcer les entreprises européennes et à concurrencer durablement les acteurs américains et chinois », insiste le co-fondateur et PDG d’Oodrive.
Oodrive (déjà qualifié SecNumCloud) a par ailleurs constitué en septembre 2022 un autre attelage avec Tixeo et Olvid (certifiés CSPN par l’ANSSI). Un quatrième projet qui forme, en quelque sorte, avec ceux du palmarès de Bpifrance ce que certains pourraient appeler « les trois mousquetaires du collaboratif souverain ».