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Ce que le nouvel investissement de Microsoft dans OpenAI signifie pour Google
Puisque ChatGPT a immédiatement attiré l’attention, cet investissement était attendu. Les observateurs se tournent maintenant vers Google, pour voir comment le leader de la recherche sur le Web va réagir aux actions de Microsoft.
Après des semaines d’anticipation, Microsoft a confirmé lundi qu’il prévoyait un investissement pluriannuel de plusieurs milliards de dollars dans OpenAI, la startup derrière ChatGPT et Dall-E 2. Cette décision met la pression sur le géant spécialiste des moteurs de recherche, Google.
Microsoft a initialement établi un partenariat avec l’institut de recherche en 2019, lorsqu’elle a investi 1 milliard de dollars. Elle a ensuite obtenu les droits exclusifs sur le modèle de langage fondamental GPT-3 d’OpenAI en 2021. Le New York Times a rapporté que le nouvel investissement de Microsoft, révélé quelques jours après que le géant de la technologie a licencié 10 000 employés, sera de 10 milliards de dollars.
Microsoft a déclaré qu’avec ce partenariat, il intensifiera le développement et le déploiement de systèmes de supercalculateurs spécialisés, afin d’accélérer la R&D d’OpenAI qui – pour l’instant – demeure indépendant.
Le fournisseur prévoit également d’infuser les nouveaux modèles de la startup dans ses produits grand public et d’entreprise. En attendant, il a lancé les services Azure OpenAI qui permettent aux entreprises d’utiliser les technologies de la startup pour enrichir leurs applications. Enfin, Microsoft prévoit d’alimenter toutes les charges de travail d’OpenAI dans la recherche, les produits et les services API.
Depuis qu’OpenAI a présenté en novembre ChatGPT – une application reposant sur un modèle NLG capable de rédiger des essais universitaires, du code, de répondre à un nombre considérable de questions avec des réponses en apparence bien informées –, la popularité du système dans le monde entier a grimpé en flèche, même si des inquiétudes ont été exprimées quant à sa précision et à sa capacité à encourager le plagiat.
Microsoft s’engage dans l’IA
Malgré les informations du New York Times et d’autres médias citant le chiffre de 10 milliards de dollars, un porte-parole de Microsoft n’a pas confirmé l’information auprès de Techtarget [propriétaire du MagIT]. « Nous ne divulguons pas les détails financiers et les conditions de l’accord et nous ne partageons pas d’autres détails sur ce partenariat étendu », a-t-il déclaré.
Peu importe le contexte – à savoir un rétrécissement forcé des effectifs en interne –, chez les 3 géants du cloud, Microsoft veut marteler son message, selon les observateurs du secteur.
« Microsoft veut que tout le monde sache qu’il est fortement impliqué dans l’IA de pointe », avance la PDG de Nemertes et analyste, Johna Till Johnson.
En outre, l’investissement de Microsoft dans OpenAI permet également au géant de la technologie de prendre son temps pour développer des capacités d’IA et de ne pas avoir à subir autant de pression pour rentabiliser rapidement ses produits et services, ajoute Will McKeon-White, analyste chez Forrester.
Ainsi, au lieu d’essayer de déterminer quels domaines de l’IA nécessitent le plus de développement ou de repérer les technologies les plus rentables, Microsoft laissera OpenAI à la tête des activités de recherche, selon l’analyste de Forrester.
« Le fait de pouvoir s’appuyer sur une organisation tierce neutre, par laquelle tout cela passe, est une bonne chose et il est logique de continuer à la financer », assure Will McKeon-White.
En attendant Google
Avec l’investissement important de Microsoft dans OpenAI, beaucoup se demandent comment Google va réagir à cette initiative et à la popularité de ChatGPT lui-même.
Google chercherait actuellement des moyens de surpasser ChatGPT, ce qui pourrait menacer sa conception de la recherche. Pour le moment, les travaux de Google consistent davantage à optimiser les résultats de son moteur de recherche, à jouer sur le positionnement et la mise en avant des publications sur le Web, suivant des thématiques données.
Selon le New York Times, Sundar Pichai, PDG d’Alphabet, la société mère de Google, a récemment fait appel aux fondateurs de Google, Larry Page et Sergey Brin, pour l’aider à planifier et à développer un nouvel agent conversationnel et un outil de génération d’images, rapporte également le Times. Il s’agirait, entre autres, de faire appel à sa filiale DeepMind et de poursuivre le développement de Sparrow, un agent conversationnel ayant fait l’objet d’une publication universitaire à la fin du mois de septembre 2022.
« Ils [les dirigeants de Google] sont très conscients du fait que leur maîtrise de la recherche de contenus sera simplement détruite, si quelqu’un d’autre a la capacité de fournir une IA performante [dans ce domaine] », a déclaré M. Johnson.
Google n’a pas répondu immédiatement à une demande de commentaire.
Johna Till JohnsonAnalyste et PDG de Nemertes
Cependant, l’avantage de Google sur Microsoft est qu’il n’a pas besoin de faire appel à des ressources extérieures pour développer de nouvelles fonctionnalités d’IA, nuance Johna Till Johnson.
« Historiquement, Microsoft rachète, puis ferme, et parfois incorpore des entreprises au sein de son organisation », affirme-t-elle. « Google n’a pas tendance à faire cela. Ils s’appuient davantage sur des produits maison ».
Le principal problème de Google à l’heure actuelle est que beaucoup de ses produits d’IA générative n’ont pas encore été lancés, signale Will McKeon-White.
« Ils ont probablement des produits. C’est juste qu’ils ne sont pas tout à fait prêts pour le “primetime”, qu’ils sont plus conservateurs concernant leurs disponibilités ou qu’ils les intègrent activement dans d’autres systèmes », raconte-t-il.
Une équipe d’IA plus importante
Il est également possible que Google doive renforcer son équipe de développement d’IA.
Par rapport à de nombreux autres types de technologies, le développement d’une IA réclame « beaucoup de travail », poursuit l’analyste de Forrester.
« OpenAI a très bien réussi à élargir son vivier de talents », déclare-t-il, ajoutant que l’entreprise est par ailleurs en mesure de consacrer une grande quantité d’argent à un problème spécifique. Sur Twitter, Sam Altman, PDG et cofondateur d’OpenAI, vante « la densité de talents » au sein de son entreprise, qui compte 375 collaborateurs.
En revanche, Google doit répartir ses fonds sur l’ensemble de ses projets, qui couvrent toute la gamme des technologies d’IA, selon M. McKeon-White.
« C’est vraiment la différence entre une petite organisation très bien financée et très ciblée et une grande entreprise qui doit s’occuper de toutes les activités d’une entreprise », avance l’analyste.