Forum 5G Techritory : dans les villes, la 5G pour piloter des drones policiers
Les villes européennes voient dans la 5G le moyen de piloter des drones. Mais il faut des autorisations pénibles à obtenir. Sauf s’ils servent à faire la police.
Deuxième partie des cas d’usage professionnel de la 5G débattus par les pouvoirs publics, les entreprises et les fournisseurs de l’UE lors du sommet 5G Techritory qui vient de se tenir à Riga, en Lettonie. Après les transports où rien n’est prêt et avant les fournisseurs d’électricité qui veulent mettre sur écoute tous les objets connectés, LeMagIT rapporte ici les échanges qui ont – vigoureusement – animé les débats autour de la ville intelligente et connectée.
À l’échelle des municipalités européennes, la 5G est d’abord vue comme un moyen de communiquer avec le seul équipement urbain qui ne peut pas être relié par un fil : les drones. En introduction du débat qui doit faire un point sur la législation européenne en matière de survol des zones habitées par ces petits aéronefs téléguidés, le modérateur suppose que les villes veulent des drones pour transporter en urgence des médicaments ou des transfusions sanguines. Ou alors, sans doute, pour des prises de vue aériennes des espaces urbains à des fins de maintenance.
Faire la police, faute de mieux
« Oui, oui, bien entendu. Mais nous pensons aussi à la surveillance. Par exemple, celle des étudiants quand ils rentrent de l’école, au cas où ils se feraient agresser ou enlever », bondit Elena Deambrogio, la responsable SmartCity à la municipalité de Turin, en Italie. Et de préciser : « Il y a plusieurs idées pour nous aider dans la gestion de la vie urbaine, mais les réglementations concernant les drones ne sont pas adaptées. Alors, nous renforçons la coopération avec les autorités nationales. Les aspects de sûreté, de localisation des personnes définissent un plan stratégique avec une vraie portée de changement du quotidien. »
Rasmuss Filips Geks, en charge des dossiers numériques à la municipalité de Riga, en Lettonie confirme : les drones n’ont pas le droit de voler en ville, sauf pour faire la police. « Pour obtenir des autorisations de voler, il faut beaucoup documenter les cas d’usage. Alors, nous documentons. Les livraisons par drone, les scans en 3D des immeubles… Mais nous avons déjà pu beaucoup utiliser les drones dans le domaine de la sécurité. Par exemple, il y a quelques mois, des gens ont manifesté devant l’hôtel de ville. Hé bien ce sont des drones qui ont surveillé la situation avec leurs caméras. »
« Les drones nous permettent de surveiller les endroits que la police municipale n’a pas les moyens de surveiller. Par exemple si vous allez pêcher sur un lac gelé lorsque c’est interdit parce que vous pouvez tomber à travers la glace, hé bien, un drone pourra le voir, identifier le risque et ainsi assurer une plus grande sécurité pour les citoyens. »
Idéologie contre bureaucratie
Thomas Neubauer, en charge de l’innovation au sein du prestataire de services suisse Teoco, avoue être un peu gêné par la tournure que prend le débat. « Si vous voulez bien, je propose de revenir sur l’aspect pratique. Un drone est un objet connecté qui peut livrer des données, livrer des colis et, sans doute demain, conduire des personnes. L’urgence est d’engager le régulateur sur ces trois missions. Et franchement, une fois que vous démontrez des cas d’utilisation, il est assez simple d’obtenir des autorisations dans les environnements urbains. »
Elena Deambrogio n’est pas d’accord. « Pour un projet de ville intelligente, il faut s’adresser à untel, pour un projet de drone, il faut s’adresser à tel autre. Travailler avec des startups ? Il faut faire de la paperasse sans fin auprès de tel autre service parce que ce n’est pas un fournisseur déjà référencé ! Donnez-nous un guichet unique, bon sang ! », réclame-t-elle.
Et elle tient à en découdre : « à chaque demande d’autorisation, je me bats contre des stéréotypes ! Les drones peuvent servir d’armes, on peut les perdre, ils peuvent tomber sur les gens. La plupart de ces choses sont absurdes », fustige-t-elle. Rasmuss Filips Geks suggère que les applications liées à la sûreté sont moins encombrées par les réticences des pouvoirs publics.
« Pour donner la pleine mesure de ce que les drones peuvent faire, il faut déjà leur offrir une vraie connectivité 5G. Alors, vous aurez plein d’applications extraordinaires, qui vont au-delà de la simple caméra déportée, des choses utiles, civiques qui naîtront et que nous n’imaginons pas encore », tente Thomas Neubauer, la main sur le cœur. Elena Deambrogio et Rasmuss Filips Geks opinent silencieusement du chef en guise de réponse.