GAIA-X : le compte à rebours ne peut plus être arrêté
La dernière édition du sommet GAIA-X a montré que le métacloud européen a atteint sa maturité. Les oiseaux de mauvais augure qui avaient critiqué le projet et la bureaucratie européenne en sont pour leurs frais.
Le sommet GAIA-X 2022, troisième édition du genre, organisé à Paris les 17 et 18 novembre, était le dernier. Parce que le projet de métacloud européen est abandonné ? Non, bien au contraire : « Gaia-X est devenu mature et est bien réel. L’ère des early-adopters, des spécifications techniques et politiques va se terminer. L’année prochaine sera celle de la croissance, et nous organiserons des événements plus spécifiques », annonce Francesco Bonfiglio, CEO de GAIA-X AISBL (Association internationale sans but lucratif, supervisant GAIA-X).
Plus précisément, l’ouverture à un public plus vaste s’effectuera après le premier trimestre 2023. Par rapport à la roadmap initiale, le timing est donc respecté, ce qui est à souligner pour cet ambitieux projet européen, initié par le couple franco-allemand, et parfois fustigé par certains cabinets d’analystes. À partir du 2e trimestre 2023, n’importe quelle organisation pourra rejoindre l’écosystème Gaia-X, en proposant ses services respectant les principes du métacloud.
GAIA-X n’est pas un organisme de standardisation
Pour rappel, GAIA-X ne commercialisera aucune application, n’imposera aucune règle technologique, mais fournira des guides pour développer des services compatibles avec GAIA-X. Selon Maximilian Ahrens, CTO de T-Systems, « ce qui est unique dans l’adhésion au projet, c’est le mélange des membres utilisateurs des solutions et des providers ». « Nous prévoyons que les fournisseurs vont vouloir respecter les principes de GAIA-X. Nous nous attendons à ce que les utilisateurs demandent à leurs fournisseurs d’être compatibles avec GAIA-X. Ainsi se créera un cercle vertueux », assure Francesco Bonfiglio.
Concrètement, les membres de GAIA-X savent pertinemment qu’il est impossible d’imposer un standard de facto, tant que le marché ne l’adopte pas. Le cœur de GAIA-X s’appuie sur un environnement de confiance, s’appliquant aux échanges de données au sein des fameux – parfois qualifiés de fumeux – espaces de données, à la conformité et la fédération de services.
Sur les dataspaces, la problématique n’est pas juste une question de portabilité et d’interopérabilité, mais de démontrer « qu’il y a un avantage business dans des secteurs verticaux comme l’automobile, l’énergie ou la finance. C’est le principe du push&pull : le push règle les problèmes techniques ; le pull, ce sont les avantages qu’en tirent les acteurs de chaque secteur », affirme, Hubert Tardieu, président du conseil d’administration GAIA-X.
Sur le dernier point, l’équipe française de GXFS-FR a présenté un catalogue de services d’ores et déjà disponible conforme au Gaia-X Trust Framework, permettant aux utilisateurs de choisir des services répondant à des exigences spécifiques (localisation des données en Europe, certifications de sécurité, portabilité, neutralité carbone).
Suivre le modèle du RGPD
Hubert TardieuPrésident du conseil d’administration, GAIA-X
Répondant à certaines critiques, qui ne comprenaient pas pourquoi l’AISBL avait accueilli des fournisseurs américains – non décisionnaires, faut-il le rappeler –, Hubert Tardieu s’en est au contraire félicité : « si vous voulez aller loin, vous devez être plusieurs. Et nous sommes fiers maintenant d’être nombreux ».
De fait, GAIA-X pourrait suivre l’exemple du RGPD : initialement fortement critiqué par les Américains, non seulement ceux-ci s’en sont accommodés, mais de nombreux pays dans le monde s’inspirent de ce règlement pour la protection des données. « Cette année, nous sommes très fiers que les Américains nous aient demandé de créer un hub [autour de GAIA-X, N.D.L.R.]. Ce hub fonctionne, et cela nous paraît très important. Cela n’était pas évident au début de GAIA-X », ajoute Hubert Tardieu.
Dernier point, GAIA-X se pose comme accélérateur de l’adoption du cloud en Europe. Les raisons sont connues : manque de portabilité et d’interopérabilité. Le taux d’adoption du cloud est en moyenne de 26 % dans les entreprises, les pays du sud étant les plus enthousiastes, ceux du nord les plus réfractaires, l’Allemagne et la France se situant au milieu. Or la Commission européenne a un objectif d’ici 2030 d’une adoption du cloud – centralisé ou au plus près du terrain (edge cloud) – et de l’intelligence artificielle par 75 % des entreprises. Encore un long parcours, donc.