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Dépenses dans le cloud public : Gartner met en garde contre « la pression inflationniste »
Gartner prédit une forte croissance du marché mondial du cloud public, mais prévient que tout rétrécissement des budgets IT pourrait affecter ses prévisions.
L'observateur du marché IT indique que les dépenses mondiales dans le cloud public devraient augmenter de 20,7 % en 2023 pour atteindre 591,8 milliards de dollars l'année prochaine, contre 490,3 milliards de dollars en 2022.
Or, les entreprises subissent de plein fouet l’inflation et pourraient, en conséquence, abaisser leurs dépenses dans le cloud public.
« Les pressions inflationnistes et les conditions macroéconomiques actuelles ont un effet d'entraînement sur les dépenses en matière de cloud », prévient Sid Nag, vice-président et analyste chez Gartner.
Sid NagVice-président et analyste, Gartner
« Les organisations ne peuvent dépenser que ce qu'elles ont », poursuit-il. « Les dépenses liées au cloud pourraient diminuer si les budgets IT généraux diminuent, étant donné que le cloud continue de représenter la plus grande part des dépenses IT et une part équivalente des budgets ».
Les fournisseurs anticipent (eux aussi) la baisse des dépenses
Ces commentaires ont été émis quelques jours après qu’Amazon Web Services (AWS) a annoncé la plus faible croissance des revenus de son histoire. Pour expliquer cette situation, le géant du cloud a affirmé que ses clients compressent les coûts.
Les deux autres géants du cloud établissent peu ou prou les mêmes constats.
Dans son bilan financier du premier trimestre fiscal 2023, Microsoft a indiqué que ses revenus liés au cloud sont en hausse de 24 % par rapport à l’année dernière, mais la firme prévoit une croissance plus « modérée » le trimestre prochain. Elle note que les clients ont déjà commencé à optimiser leurs charges de travail, tandis que la facture énergétique d’Azure est en hausse, ce qui affecte ses marges.
De son côté, Alphabet revendique une hausse de 38 % des revenus liés à Google Cloud au troisième trimestre 2022. Ils atteignent 6,9 milliards de dollars. Toutefois, le groupe ne génère toujours pas de bénéfices en provenance de son cloud et évoque des pertes opérationnelles de l’ordre de 699 millions de dollars.
Alphabet prévoit un ralentissement de l’activité, des embauches (au profit des profils plus techniques), mais planifie des investissements importants pour renforcer ses « infrastructures techniques ».
Un ralentissement, mais pas d’arrêt, selon Gartner
Malgré les mises en garde, Sid Nag affirme que le rythme des migrations vers le cloud ne montre « aucun signe d'arrêt ». L’ESN Capgemini le croit également.
« Le cloud computing restera un bastion de sécurité et d'innovation, soutenant la croissance en période d'incertitude grâce à sa nature agile, élastique et évolutive », assure l’analyste.
La demande en capacités d'Infrastructure as a Service devrait « naturellement continuer à croître », puisque les entreprises cherchent à moderniser leur parc informatique, à minimiser les risques et à optimiser les coûts.
« Le transfert des opérations vers le cloud permet aussi de réduire les investissements en étalant les dépenses sur la durée de l'abonnement, [ce qui est] un avantage clé dans un environnement où la trésorerie peut être critique pour maintenir les opérations », ajoute-t-il.
En 2023, l'IaaS devrait connaître la plus forte croissance des segments cloud. Les entreprises s’apprêteraient à dépenser plus de 150 milliards de dollars dans ce domaine, contre 115 milliards de dollars en 2022. Soit à un taux de croissance annuel de 29,8 %.
À l'inverse, Gartner s'attend à ce que les segments PaaS (plateforme à la demande) et SaaS (logiciel à la demande) subissent des « impacts significatifs » de l’inflation. Plus précisément, les difficultés de recrutement et la protection des marges pourraient provoquer quelques turbulences.
Les deux segments connaîtront toutefois une croissance continue.
À cet égard, le marché du PaaS devrait croître de 23,2 % pour atteindre 136 milliards de dollars en 2023. De son côté, le marché du SaaS devrait progresser de 16,8 %, pour représenter 195 milliards de dollars l'année prochaine.
« Des salaires plus élevés et un personnel plus qualifié sont nécessaires pour développer des applications SaaS modernes, de sorte que les organisations seront confrontées au défi de réduire l'embauche pour contrôler les coûts », signale Sid Nag.
Mais comme le PaaS peut accélérer le développement d’applications SaaS en automatisant et en rendant efficace la génération de code, « le taux de consommation du PaaS augmentera en conséquence », prédit-il.
À l'avenir, l’analyste anticipe le fait que « malgré les pressions de la croissance, de la rentabilité et de la concurrence, les dépenses cloud devraient continuer à augmenter en raison de l'utilisation perpétuelle du cloud ».
« Une fois que les applications et les charges de travail sont migrées vers le cloud, elles y restent généralement, et les modèles d'abonnement garantissent que les dépenses sont maintenues pendant la durée du contrat et très probablement bien au-delà. Pour ces fournisseurs, les dépenses liées au cloud sont une rente - le cadeau qui ne cesse de recevoir », conclut Sid Nag.