Mainframes : IBM joue la carte du cluster Linux beaucoup plus dense
LinuxONE Emperor 4, la déclinaison du z16 qui ne sert qu’à exécuter des machines virtuelles Linux, pourrait faire aussi bien que trois étagères racks remplies de serveurs x86, mais depuis une demi-étagère seulement.
IBM vient de mettre à jour la déclinaison de ses mainframes dédiée à l’exécution de machines virtuelles Linux. Selon le constructeur, le nouveau LinuxONE Emperor 4 peut exécuter des dizaines de milliers de traitements simultanés, ce qui lui permettrait de remplacer en une seule étagère rack des centaines de serveurs physiques x86, soit un gain de place dans un data center.
Tout comme le mainframe z16 de série, la machine repose sur des processeurs Telum gravés en 7 nanomètres et fonctionnant à 5,2 GHz. On trouve typiquement, dans une pleine étagère rack, 32 processeurs de 8 cœurs chacun, soit un total de 256 cœurs, mais seuls 200 sont utilisables en même temps pour les applications. Mainframe oblige, les 56 cœurs restants sont une réserve : pour exécuter des tâches systèmes hors application, pour prendre la relève quand d’autres redémarrent, ou juste pour avoir le choix entre utiliser tous les cœurs d’un seul processeur et répartir les traitements entre tous les processeurs.
Les 200 cœurs servent à exécuter en même temps 85 machines virtuelles (ou « partitions Linux »). Cela peut paraître peu, mais un mainframe a moins de problèmes de multitâche qu’un serveur Linux ou Windows. Chaque VM d’un z16 exécute une application capable de répondre en même temps à des milliers de requêtes. Alors que sur x86 on préfère limiter une VM à quelques dizaines ou quelques centaines de requêtes simultanées, quitte à multiplier les VMs avec la même application.
Un demi-rack LinuxONE vaut trois étagères pleines de serveurs x86
En termes de puissance, IBM se targue de la présence dans Telum de circuits accélérateurs pour les algorithmes d’IA (6 TFLOPS de puissance), de chiffrement, de compression. De manière tout à fait invérifiable, le LinuxOne Emperor 4 – comme les autres z16 – serait conçu pour garantir le secret de ses données face aux capacités de déchiffrement a priori titanesques d’un ordinateur quantique.
Par ailleurs, le processeur Telum aurait des circuits d’accélération dédiés à l’exécution de codes Java. « Des tests menés en interne montrent que le LinuxONE Emperor 4 nécessite 16 fois moins de cœurs qu’un cluster x86 pour exécuter des traitements IBM WebSphere et DB », indique une note partagée par le constructeur.
Ces tests comparaient une configuration LinuxONE Emperor 4 Max avec 128 cœurs (20U de haut, soit une demi-étagère rack) à un cluster de 64 serveurs x86 (entre trois et quatre étagères racks) contenant chacun 2 processeurs de 16 cœurs (soit un total de 2 048 cœurs). Le comparatif d’IBM met par ailleurs en avant que la machine LinuxONE sert aussi bien à l’exécution des applications qu’à leur développement, leurs tests et leur intégration. Tandis que côté x86, les 64 serveurs sont répartis en plusieurs clusters fonctionnels, chacun étant administré à part.
Une machine Linux comme les autres ?
Pour mettre en valeur la densité de calcul offerte par le LinuxONE Emperor 4, IBM a choisi de mettre l’accent sur l’aspect écologique de sa nouvelle machine : à puissance égale, elle consommerait 75 % moins d’énergie que des clusters x86.
Bob O'DonnellAnalyste, cabinet d’études TECHnalysis Research
« La stratégie consiste à dire que le remplacement de milliers de serveurs par une vingtaine permettrait aux entreprises d’économiser sur les coûts d’électricité et de gagner plus d’espace dans les datacenters. Pour autant, vu les investissements à fournir pour passer aux mainframes, je ne suis pas sûr que beaucoup d’entreprises sautent sur cette occasion », commente Frank Dzubeck, président du cabinet de conseil Communications Network Architects.
Un avis que ne partage pas complètement Bob O’Donnell, analyste au cabinet d’études TECHnalysis Research. Selon lui, la transformation des applicatifs vers le format container libère les entreprises de la contrainte de rester sur les seuls serveurs x86 qu’elles connaissent. « Linux a un support plus large désormais et l’on ne peut plus sous-estimer l’universalité des containers, de Kubernetes. Il se peut que la plupart des entreprises restent sur des serveurs x86. Mais les machines LinuxONE présentent définitivement un attrait plus large que précédemment. »