Genie : Salesforce affrète sa CDP pour le temps réel et l’automatisation

Salesforce repeint sa CDP aux couleurs du temps réel

Salesforce évoque ainsi le « premier CRM en temps réel au monde », mais à y regarder de plus près, il s’agit davantage d’une évolution de sa Customer Data Platform (CDP), présentée en 2019 et en disponibilité générale depuis 2020.

« Salesforce Genie est notre CDP », avoue David Schmaier. « Nous l’avons renommée pour la rendre amusante, comme nous avons renommé notre moteur d’IA Einstein. Nous allons au-delà de la définition traditionnelle de la CDP et nous la connectons avec tous nos clouds qui composent Customer 360 et Industry Cloud ».

Les clients existants n’auront pas à migrer vers une autre solution, selon David Schmaier.

Si la communication de Salesforce parle de magie, il n’en est rien. Genie repose sur une couche d’ingestion de données transactionnelles et temps réel à large échelle permettant de les transformer et de les combiner en un visuel graphe. Celui-ci contient l’ensemble des métadonnées des informations d’un client rassemblées dans Salesforce. Ces données peuvent provenir des applications Salesforce, de sites Web, d’applications mobiles, des équipements connectés ou d’autres sources.

« Pourquoi est-il si difficile d’offrir une expérience client unifiée ? Parce que les données résident en moyenne dans 976 applications client dans chaque entreprise. Vous pouvez donc maintenant les unifier en utilisant Genie », vante David Schmaier.

Genie reposerait sur le « data lake » de la CDP. Plus particulièrement, il s’agit de nourrir le modèle de données Customer 360 à partir des sources ingérées.

Ces données sont rattachées à des objets cartographiés dans le modèle Customer 360. Celui-ci inventorie les informations principales du client (identifiant, numéro de téléphone, âge, sexe, dernières interactions, etc.). L’interface de la CDP permet de visualiser, à la manière d’un graphe, les données et leur occurrence dans différentes tables ou colonnes. Genie ajoute un moyen de suivre les mises à jour de données les plus récentes.

« Désormais, nous avons un système de partage ouvert entre le Data Cloud de Snowflake et Genie. Il utilise une architecture sans copie de données où vous pouvez partager des informations de manière bidirectionnelle. »

La CDP peut être « nourrie » via des chargements batch. En y regardant de plus près, la CDP avait aussi plusieurs API d’ingestion de données en « quasi-temps réel » permettant de rafraîchir les données toutes les quinze minutes, et ce, depuis la mise à jour Spring’ 21. Une autre API permettait de tirer des flux en quasi-temps réel depuis Amazon S3. D’autres connecteurs pour B2C Commerce, Salesforce Marketing Cloud et le CRM semblent bénéficier des mêmes avantages.

En outre, Genie s’intègre avec le système de partage de données de Snowflake. Selon l’éditeur, la plateforme peut aussi ingérer des données « first-party » en provenance de Google, Amazon Ads et Meta.

« Désormais, nous avons un système de partage ouvert entre le Data Cloud de Snowflake et Genie. Il utilise une architecture sans copie de données où vous pouvez partager des informations de manière bidirectionnelle », lance David Schmeier.

En sus d’utiliser des API Mulesoft vers des systèmes tierces, Genie peut aussi extraire des données en provenance de services présents sur AppExchange, dont ceux de Criteo, d’Acxiom, de neustar, de LiveIntent, de theTradeDesk, d’Epsilon, ou encore de Metarouter. Au total, Genie rassemble plus de 18 partenaires.

Plus d’automatisations et d’IA

Les données combinées dans ce modèle Customer 360 peuvent alimenter Einstein, les services d’IA de Salesforce, ainsi que les flux d’automatisation de Flow. Cela permettrait de prévoir la « prochaine bonne action » en recommandant des produits ou en effaçant plus rapidement les données clients des systèmes s’ils le réclament, illustre l’éditeur.

Dans leur description, les fonctionnalités de prise d’action en « temps réel » de Genie ressemblent fortement à celle de Salesforce Activity Platform (AP).

Activity Platform est notamment utilisée pour synchroniser les données des emails et des calendriers avec le CRM, transmettre le bon prospect au bon représentant commercial (Recommended Connections), pour suivre des activités de ventes et des rendez-vous, ou obtenir des recommandations en temps réel depuis Einstein.

Sous le capot, cette architecture complexe est composée de plusieurs data stores NoSQL, dont Apache Cassandra et ElasticSearch. Activity Platform utilise S3 comme couche de stockage objet. Plusieurs flux de traitement asynchrones sont utilisés pour l’ingestion, la transformation et la suppression de données à large échelle. Ces jobs écrits en Kotlin et en Scala sont propulsés par diverses technologies, dont Apache Storm, Kakfa Streams et Apache Spark. Ces flux hétérogènes peuvent être consommés via des API GraphQL.

Avec Genie, il sera également possible d’alimenter et de tirer des flux depuis Amazon SageMaker, la plateforme de machine learning d’AWS. Cela permettrait aux clients d’appliquer leurs propres modèles d’IA sur des données rassemblées dans Salesforce, ce que l’éditeur nomme « Bring your Own AI ». Ainsi, les utilisateurs ne sont pas forcés de se contenter des capacités d’Einstein, moins pratiques pour les équipes de data science.

Pour éviter les problèmes de sécurité, Salesforce prévoit de renforcer le contrôle d’accès suivant les rôles. Pour cela, il compte créer des Data Spaces que les administrateurs piloteront, pour confier des vues des données en temps réel aux métiers concernés.

Une évolution « logique »

Hormis de nouveaux connecteurs et des intégrations tierces, les nouveautés semblent peu nombreuses. Pour les analystes, rien de surprenant à cela. Le marché CDP a déjà vécu une vague de consolidation. SAP avait racheté Gigya pour lancer son produit en 2020, tandis que Twilio avait repris Segment la même année.

« Il est logique que Salesforce construise ce système, car il doit s’intégrer à l’infrastructure de sa plateforme existante. »

« Il est logique que Salesforce construise ce système, car il doit s’intégrer à l’infrastructure de sa plateforme existante », avance David Raab, fondateur du CDP Institute. « D’une manière générale, la technologie CDP n’est pas si différente des autres technologies de gestion des données. [Salesforce] n’aurait probablement pas gagné beaucoup [plus de fonctionnalités] s’il avait acheté un CDP existant ».

Selon David Raab, il est surtout très difficile d’accéder aux données des clients en temps réel dans une CDP. « Nous considérons qu’il s’agit d’une exigence fondamentale pour tout CDP, mais dans la pratique, certaines entreprises y parviennent mieux que d’autres », continue David Raab. « Si Salesforce fait ce qu’il dit, sa solution semble particulièrement robuste ».

Selon R. « Ray » Wang, fondateur de Constellation Research, les intégrations avec les autres produits Salesforce et ceux des éditeurs tiers sont davantage pertinentes. « Pour faire passer la CDP à un autre niveau, il ne suffit pas de traiter les données qui sont déjà là, mais aussi toutes celles qui sont connectées », affirme-t-il.

Selon David Schmaier, Customer Data platform aurait déjà attiré plus de 500 clients depuis 2019. Trois d’entre eux – L’Oréal, PGA Tour et Formula 1 – utiliseraient déjà les capacités de traitements en temps réel.

Salesforce Genie est désormais hébergée sur l’infrastructure cloud Hyperforce. La plateforme est donc disponible principalement sur AWS, sur Google Cloud et prochainement sur Microsoft Azure.