Intelligence artificielle et cloud : Cegid reste agnostique
L’éditeur d’ERP et de SIRH s’appuie en partie sur des services cloud pour infuser l’IA dans ses applications. Mais Cegid tient à rester indépendant des plateformes qu’il utilise. Son responsable de la R&D explique comment.
Après le rachat de Talentsoft, la « fusion » technologique entre la suite de Talent Management et le SIRH de Cegid qui en découle a mis à jour un point important de la stratégie du Lyonnais : il utilise le cloud, mais en veillant à rester le plus possible indépendant de ces plateformes sous-jacentes.
« Cegid a plus une optique IaaS que PaaS, et sans s’attacher à des technologies propriétaires », résumait ainsi au MagIT son Directeur des produits et de la R&D, André Brunetière, lors d’une plongée dans le chantier IT de la fusion. « Un tel attachement ne nous semble pas viable », insistait-il bien.
Pour autant, cette stratégie n’exclut pas totalement l’utilisation de services cloud d’Intelligence artificielle – et donc de PaaS. André Brunetière explique la manière dont Cegid concilie ces deux exigences d’apparences incompatibles.
LeMagIT : J’aimerais revenir sur votre stratégie cloud dans le domaine de l’Intelligence artificielle. Vous dites que vous utilisez principalement du IaaS pour garder une certaine indépendance vis-à-vis de vos prestataires/fournisseurs/partenaires. Pour autant, Sylvain Moussé avait expliqué au MagIT qu’une bonne partie de l’IA que vous souhaitiez appliquer sur vos différents produits venait de services PaaS.
Autrement dit, vous faites appel de manière non négligeable à des services cloud et notamment ceux d’Azure. Est-ce toujours le cas ? Et si oui, cela ne crée-t-il pas une autre forme de dépendance ?
André Brunetière : Quand on se dit qu’on va utiliser l’Intelligence artificielle, ce n’est pas juste pour utiliser de l’Intelligence artificielle. On a un but à atteindre.
Par exemple, nous avons eu un gros chantier IA autour de la comptabilité financière. Notre objectif était de voir comment, grâce à cette intelligence artificielle, nous pouvions éliminer le travail humain de saisie et de contrôle des données. On part d’une donnée brute – souvent un bout de papier – et à la fin, on doit avoir une écriture comptable complètement analysée, contrôlée, conforme.
Cegid a donc construit tout ce qu’il faut pour faire la transformation de l’un à l’autre. Dans ce « tout ce qu’il faut », il y a un certain nombre d’actions ordinaires, comme l’OCRisation – c’est-à-dire extraire les caractères d’une image [N.D.R. : un scan de document comptable], puis faire des informations qui ont du sens avec ces caractères.
Là-dessus, il y a déjà énormément de services cloud qui font très bien ces choses-là. Les techniques sont éprouvées et peu onéreuses. Ce serait un peu idiot d’investir notre temps pour créer notre propre OCR propriétaire. D’autant plus que si on veut proposer un coût acceptable à notre client, il ne faut pas non plus qu’on accumule trop les coûts de notre côté.
André BrunetièreCegid
Mais même si Cegid utilise des services d’Azure ou d’Amazon Web Services – qui en a aussi quelques-uns d’intéressants comme Textract – nous restons dans une logique d’interchangeabilité. Si on veut passer à un autre service d’OCR, on peut. Si d’un seul coup, un service a un pourcentage de fiabilité qui est beaucoup plus important, on va le prendre.
Et d’ailleurs, il nous arrive d’utiliser plusieurs services pour le même objectif. On peut mettre deux services d’OCR, l’un derrière l’autre, qui se complètent. On joue vraiment des combinatoires.
LeMagIT : Vous parlez « d’actions ordinaires » – des actions qui peuvent donc être gérées par ces IA fournies par des PaaS. Mais qu’en est-il des autres « actions » ?
André Brunetière : D’abord, ce n’est pas parce qu’on a des mots et des chiffres issus de l’OCR qu’on a de la comptabilité. Il y a encore beaucoup de choses à faire pour transformer cette information-là en une information comptable.
Toute cette intelligence artificielle là, en revanche, nous en sommes propriétaires.
Cela me semble essentiel. Nous tenons absolument à ce que notre IA soit propriétaire quand elle commence à toucher directement notre métier (ici, en l’occurrence : la comptabilité).
LeMagIT : Combien de data scientists avez-vous chez Cegid pour faire cette IA propriétaire ?
André Brunetière : La communauté de data scientists du groupe aujourd’hui, c’est une trentaine de personnes.
LeMagIT : À l’inverse, quelles sont pour vous ces autres « commodités » en matière d’IA pour lesquelles vous pouvez utiliser Azure et AWS sans créer de dépendances ?
André Brunetière : Nous avons déjà utilisé les outils de reconnaissance du langage naturel (NLP, NLG, NLU).
L’offre de ces acteurs évolue en permanence, donc, nul doute que nous utiliserons demain d’autres « commodités ».
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