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Numérique : qu’attendre du second quinquennat d’Emmanuel Macron ?

Emmanuel Macron, qui s’affichait candidat de la « Start-up Nation » en 2017, a-t-il, en matière de numérique, changé son fusil d’épaule pour son second mandat ? Retour sur ses prises de position et ses engagements.

Le numérique figurait en bonne place, dans le projet d’Emmanuel Macron en 2017, qui expliquait alors vouloir « recréer une mobilité économique et sociale par le numérique, la recherche et l’innovation, le travail et l’entrepreneuriat ». En 2022, le président réélu déclarait dans un entretien publié par The Big Whale le 24 avril dernier, fixer « l’objectif, d’ici 2030, de faire émerger 100 licornes françaises et 10 géants européens ».

Dans le débat de l’entre-deux tours, Emmanuel Macron ne disait pas autre chose. Citant spontanément Blablacar (racheté par la SNCF, N.D.L.R.) et Doctolib dont il a salué le rôle dans le contexte pandémique, le chef de l’État déclarait alors : « On a de vrais champions. La force de la France, ce sont notamment nos entrepreneurs. Notre pays est celui qui fait naître le plus de start-ups. Il faut savoir accompagner leur croissance. La force de L’Europe, c’est aussi – comme pour les États dont la grandeur du marché intérieur a accompagné la croissance d’entreprises comme Google – de pouvoir compter sur un marché fort de 400 millions de citoyens. La France seule, avec 65 millions d’habitants [SIC], ne peut pas se permettre d’atteindre cette taille critique » [N.D.L.R., selon l’Insee, au 1ᵉʳ janvier 2022, la France compte 67 813 396 habitants].

Pour cela, « il faudra mettre en place les conditions d’un marché unique du numérique, sans barrières douanières ni frontières ». Le président candidat parle alors ouvertement de « souveraineté française et européenne », notamment dans le domaine du numérique. Et cela concerne notamment la cybersécurité.

Protection des données personnelles, encadrement des plateformes et des réseaux : une réponse à l’échelle de l’Europe ?

Dans la foulée de sa réponse à la question de la création d’un champion européen du numérique, Emmanuel Macron est revenu sur le sujet de la protection des données des citoyens européens, citant notamment le RGPD. Selon lui, le règlement général sur la protection des données personnelles, entré en vigueur le 25 mai 2018, est un marqueur fort pour un marché et une Europe du numérique qui s’appuient aussi sur la protection des données de ses citoyens. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si la CNIL a été chef de file en Europe pour l’adoption de ce règlement. La France est depuis janvier présidente de l’Union européenne, jusqu’en juin, et Thierry Breton le commissaire européen chargé entre autres du numérique depuis 2 019.

Avec Margrethe Vestager, troisième vice-présidente exécutive de la Commission européenne, Thierry Breton a d’ailleurs présenté deux textes européens importants sur le numérique, le Digital Market Act (DMA) et le Digital Services Act (DSA), en décembre 2020. Le premier vise tout particulièrement les géants du numérique afin de prévenir des pratiques anticoncurrentielles de leur part. Un accord entre le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen a été trouvé sur le texte fin mars dernier.

Pour le second texte, l’accord a été annoncé fin avril. Là, il s’agit de traiter de la modération des contenus sur les plateformes regroupant plus de 45 millions d’utilisateurs dans l’Union européenne. L’adoption formelle du texte est attendue d’ici à la fin juin. Il a notamment été salué par Reporters sans frontières (RSF).

La cybersécurité devenue sujet de société

Emmanuel Macron n’a pas manqué de la mentionner dans le débat de l’entre-deux tours, évoquant notamment les cyberattaques contre les hôpitaux – des incidents qui ont fait de la cybersécurité un véritable sujet de société début 2021. Le « plan cyber » annoncé alors définit la stratégie nationale pour la cybersécurité, et vise à faire émerger des champions français de la cybersécurité. Mais la France joue pleinement la carte de l’Europe, notamment avec la directive NIS et sa seconde itération.

Sur ce sujet, Jean-Noël de Galzain, président et fondateur de Wallix, un champion français de la cybersécurité, précise : « le précédent quinquennat a réussi, malgré les crises, à définir une vraie stratégie nationale de la cyber, notamment par le plan à un milliard d’euros, et la création du Campus Cyber qui a ouvert ses portes en février dernier à la défense. Il a aussi mis l’accent sur la formation : formation cyber dès le collège » et une donation de 1,7 milliard pour le cloud souverain.

En outre, en fin de débat de l’entre-deux tours, Emmanuel Macron a annoncé la création de 1 500 cyberpatrouilleurs, sans préciser à quelle entité ils seront rattachés, leurs attributions exactes, et leur rôle.

L’informatique pour tous et par tous ?

Et puis il y a la question de la culture générale du numérique. Emmanuel Macron jugeait ainsi, dans son échange avec nos confrères de The Big Whale, que « le numérique est une transition extrêmement profonde ». Dès lors, « pour donner à notre société et notre économie les armes pour la maîtriser, nous devons faire un effort conséquent sur la formation. Si les Français me font confiance, nous généraliserons l’apprentissage du code et des usages numériques dès la 5e, et nous formerons 400 à 500 000 développeurs et experts informatiques supplémentaires sur le quinquennat ».

Également mentionnés dans le programme du candidat, la généralisation du code informatique dès la 5e et les apprentissages du numérique dès le plus jeune âge sont des idées pour lesquelles a largement plaidé Laure de la Raudière, députée du groupe Agir, spécialiste des enjeux du numérique en France et nommée en janvier 2021 à la tête de l’Arcep par Emmanuel Macron.

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