Applications & Données n°16 : le métavers n’est-il qu’une chimère ?
Le nouveau numéro de notre revue dédiée aux applications et à la gestion des données est sorti. Ce trimestre : tout savoir sur le métavers pour démêler le vrai du faux, et saisir les opportunités qu’il peut offrir à votre entreprise.
C’est ce qu’on appelle un « buzz ». Le métavers est même un cas d’école en la matière. Les chiffres de Google (via Google Trends) sont éloquents. Avant juin 2021, personne ou presque ne recherchait d’informations sur ces « univers virtuels, immersifs et persistants » (comme les définit aujourd’hui le Gartner). Durant l’été, un léger frémissement des requêtes s’est fait sentir.
Puis arrivèrent l’automne et le déluge informationnel sur le métavers.
Le changement de nom de la société Facebook en « Meta » est évidemment à l’origine de ce « buzz ». Le géant des réseaux sociaux, attaqué aussi bien par de nouveaux concurrents (Tik Tok, etc.), que par les politiques américains et européens (notamment après les révélations de Frances Haugen), a officiellement pris cette nouvelle identité pour deux raisons principales. La première est de se positionner sur ce que Mark Zuckerberg voit comme l’évolution naturelle des réseaux sociaux. La seconde est de détacher ce futur de l’image écornée de Facebook.
Le métavers, un bon relais de croissance pour les vendeurs d’IT
Facebook n’est pas le seul à alimenter ce bruit médiatique. Des éditeurs historiques ont mis en branle leur marketing pour convaincre le marché que le métavers est l’avenir du e-commerce, de la communication, de la collaboration et même d’Internet.
Ils y trouvent un intérêt pour vendre leurs outils de modélisations 3D, de jumeaux numériques, d’IoT, d’analytique, de ressources cloud, d’IA et de ML. Bref, le métavers est un excellent relais de croissance pour l’industrie IT.
Microsoft n’a par exemple pas hésité à proposer la somme astronomique de 70 milliards $ pour racheter le spécialiste des jeux vidéo (et de la 3D), Activision-Blizzard. Microsoft avait auparavant annoncé une version immersive de Teams (Mesh for Teams) et un accord avec Accenture pour démocratiser le collaboratif immersif dans les entreprises.
FOMO et métavers primitif
Ce « matraquage » est tel qu’on en oublierait presque que de métavers, aujourd’hui, il n’en existe pas. C’est ce que rappelle le cabinet Forrester Research, dans une étude baptisée « The State of the Metaverse », où il souligne que l’avalanche d’articles et de communications provoque chez les décideurs une peur de louper le prochain train de l’IT, un FOMO comme disent les Anglo-saxons (« Fear Of Missing Out »).
Plus exactement, le cabinet d’analystes prédit que la vision unifiée d’un seul métavers – qui est pour Forrester la seule vraie définition du métavers – demandera des investissements massifs. Et donc qu’elle ne se réalisera pas avant « plusieurs années ».
Mais, ajoute-t-il, cela ne doit pas empêcher d’explorer sereinement chaque étape de la construction de cet univers. D’autant plus que s’il n’existe pas encore un métavers avec des standards ouverts et communs, il existe déjà des métavers, indépendants les uns des autres, dans lesquels il est possible d’expérimenter (comme The Sandbox ou Decentraland).
L’étape suivante du métavers sera de créer des « portails » (sic) entre ces métavers, pour aller de l’un à l’autre, comme on surfe aujourd’hui d’un site à un autre sur le Net.
Le paradoxe du collaboratif immersif
En attendant ce « métavers primitif » (toujours dixit Forrester), « Applications & Données » a voulu mener l’enquête pour démythifier cette chimère médiatique et identifier les grands cas d’usages concrets pour les entreprises.
Vous trouverez donc dans ce numéro un dossier sur ce qui peut intéresser un DSI sur le sujet, ainsi que le point de vue très intéressant (bien qu’intéressé) d’Adobe. Son responsable Solution Consulting pour l’Europe de l’Ouest et du Sud, Lionel Lemoine, a en effet une vision concrète très circonstanciée et légèrement différente des métavers. Et il admet – ce qui est tout à son honneur – qu’il y a aujourd’hui plus de questions que de réponses.
Enfin, AXA et de DXC partagent leurs retours d’expériences de « early adopters ».
Le témoignage de DXC est intéressant à plus d’un titre. Le cabinet de conseil a organisé un évènement collaboratif dans un univers virtuel, illustrant au passage deux paradoxes du travail et des évènements à distance.
Le premier est que, plus les employés font du « home office », plus ils veulent en faire… et plus leurs employeurs veulent qu’ils reviennent au bureau (étude Microsoft à découvrir dans ce numéro). Le second est que les éditeurs spécialistes de la visio essaient de « réinjecter » de la réalité dans le virtuel, en reproduisant les interactions sociales de la vraie vie. Et quoi de plus paradoxal que de proposer un univers totalement virtuel pour reproduire une vie de bureau « In Real Life » ?
Test de « Horizon Workplace » (la version B2B du métavers collaboratif de Facebook/Meta)
par le spécialiste de l’immobilier d’entreprise Ubiq.
Et aussi : Supply Chain Finance et les difficultés de l’IA générique dans l’industrie
Mais il n’y a pas que le(s) métavers dans l’IT. Ce numéro d’Applications & Données consacre son entretien trimestriel à Esker. L’éditeur lyonnais y analyse finement la convergence des marchés de la gestion de la facturation (Procure to Pay), du sourcing et du procurement. Une convergence qui fait qu’Esker a désormais pour ambition de devenir le Ariba/Coupa européen. Il évoque aussi le développement annoncé de la Supply Chain Finance.
Enfin, et toujours pour rester ancrés dans le réel, ce numéro se fait l’écho des difficultés des industriels à adopter des modèles d’IA génériques. L’apprentissage des réseaux de neurones, leur compréhension, leur déploiement et leur supervision en conditions réelles restent pour eux un défi majeur.