Salon : Intel de nouveau locomotive de l’informatique à grande vitesse
Premier événement en présentiel depuis le retour de Pat Gelsinger aux commandes, le salon Intel Vision a renoué avec les annonces censées donner de nouvelles directions aux marchés informatiques.
Un train de nouveaux processeurs aux caractéristiques toutes plus étonnantes les unes que les autres. À Dallas, à l’occasion de son salon Intel Vision 2022 enfin en présentiel, Intel a renoué avec les grandes heures de l’IDF, cet événement annuel qu’animait Pat Gelsinger au début des années 2000 et qui tirait à chaque fois l’informatique vers de nouveaux horizons technologiques. Dix ans, quinze ans plus tard, Pat Gelsinger est revenu, il est désormais le PDG et il a fermement l’intention de rendre à Intel son rôle de locomotive.
« L’enjeu d’Intel est à présent de lancer le plus rapidement possible ce que nous avons de génial dans nos tiroirs. Avant, nous étions limités dans nos capacités de production, dans nos capacités à fournir ce que nos clients attendaient. Nous avions des problèmes de gestion, nous ne fournissions pas les meilleurs produits sur certains marchés. Pour résoudre tout cela, nous avons réorganisé Intel en six divisions. Chacune sur un secteur informatique, chacune avec sa propre comptabilité et chacune avec l’objectif de gagner le plus possible de parts de marché, face à des concurrents très précis », a lancé le PDG lors de l’événement.
« Franchement, comment expliquer que nous n’avions rien à proposer depuis 10 ans sur le marché des cartes accélératrices pour datacenters ? Cette époque est révolue, nous arrivons dès aujourd’hui avec une offre très agressive ! », a-t-il surenchéri lors d’un point presse.
Les annonces sont un processeur pour stations portables, le Core HX, doté de 16 cœurs et fonctionnant jusqu’à 5 GHz. Un Xeon Sapphire Rapids à 52 cœurs, environ 10 % plus rapide dans les tests que l’AMD Epyc Milan à 64 cœurs. Un GPU Artic Sound M conçu pour faire du rendu graphique côté serveur et censé motoriser tous les environnements immersifs que doit bientôt offrir le cloud, dont les métavers de Facebook. Un accélérateur Gaudi 2 qui, lui, accélère les algorithmes d’intelligence artificielle, avec un score de 5425 au benchmark ResNet-50, alors que l’A100 de Nvidia, le nec plus ultra en la matière, n’atteint que 2930.
Et aussi des IPU – l’équivalent des DPU chez Intel – qui doivent permettre de généraliser des réseaux intelligents en 200 Gbit/s par connecteur Ethernet.
Une nouvelle force de frappe industrielle
Quant à la sixième activité, il s’agit tout simplement des usines, celles qu’Intel a déjà modernisées en Irlande et en Arizona, comme celles qui doivent sortir de terre d’ici à 2027 en Allemagne et dans l’Ohio.
Pat GelsingerPDG, Intel
« Nous avons élevé le niveau technique de nos usines, en changeant de fournisseurs pour les équipements, ou en investissant dans ces fournisseurs pour qu’ils améliorent leurs produits. Mais aussi en changeant la manière de diriger cette activité. Nous avons plus appris des chaînes de production en un an que nous ne l’avions fait en dix ans », jure Pat Gelsinger.
« Et voilà, l’équipement plus automatisé dont nous avions besoin est là, nous sommes en train de le déployer sur nos sites. » En filigrane, il rappelle qu’on l’avait laissé partir chez EMC pendant ces fameux dix ans et qu’Intel l’a prié de revenir alors qu’il était devenu le tout puissant patron de VMware.
« Ce qu’il nous reste à faire ? Changer notre approche industrielle vis-à-vis de nos clients. Notre nouvelle stratégie est d’amener un écosystème là où sont nos clients, en France, en Italie, en Pologne, en Espagne. Nous construirons sur place les puces dont ils ont besoin », ajoute le PDG.
En l’occurrence, plusieurs pays européens doivent voir émerger une structure industrielle sur leur territoire. En France, il s’agira du centre de R&D où seront mises au point les prochaines puces pour datacenter. Officiellement, ce centre planchera sur la conception des Xeon et des GPUs qu’Intel vendra dans le monde et, en même temps, accueillera des constructeurs automobiles ou tout autres industriels pour co-designer les composants spéciaux qu’ils imagineraient mettre au cœur de leurs futurs équipements embarqués. Officieusement, les hyperscalers – AWS, Azure, Google GCP – viendront dans ce centre pour commander des versions personnalisées des Xeon.
« Les hyperscalers veulent développer eux-mêmes les technologies qu’ils utilisent. Mais leurs infrastructures sont toujours basées sur des processeurs. Ils comptent donc sur nous pour leur fournir les processeurs écoresponsables et élastiques qu’ils déploieront dans leur datacenter et qui feront la différence avec les serveurs de série que les entreprises peuvent installer dans leurs propres salles informatiques », argumente Sandra Rivera, la patronne de la division Datacenter chez Intel.
« En partant d’une base de processeurs Intel de série, ils peuvent bénéficier de prix inférieurs grâce à une économie d’échelle. Nous fabriquerons les mêmes circuits, quel que soit le produit ou le client, mais nous les assemblerons différemment. »
Sandra RiveraResponsable division Datacenter, Intel.
« Nous allons innover ensemble sur un circuit et ce circuit se retrouvera intégré, ou non, à certains de nos modèles de processeurs qui sont désormais assemblés par chiplets. De fait, nous avons beaucoup plus d’options pour innover qu’auparavant », explique-t-elle.
16 cœurs pour les PC portables
La première journée de l’événement a fait la part belle aux nouveaux processeurs pour stations de travail portables, véritable vitrine technologique dans la course qui oppose Intel à son concurrent AMD. Ces nouveaux processeurs Core HX seront déclinés en sept modèles, dont un haut de gamme, le Core i9, qui possède 16 cœurs, soit huit performants et huit économiques.
Les cœurs économiques ne peuvent exécuter qu’un processus chacun, contre deux sur les cœurs performants, soit un total de 24 processus simultanément. Les cœurs performants fonctionnent à 2,3 GHz avec des pointes à 5 GHz. Les économiques tournent à 1,7 GHz avec des pointes à 3,6 GHz. La consommation d’énergie s’échelonne de 55 à 157 watts selon l’utilisation des cœurs. La mémoire cache est de 30 Mo et le GPU intégré a 32 unités graphiques à 1,55 GHz.
Les modèles i7 et i5 ont un nombre de cœurs, des fréquences et une mémoire cache, plus ou moins réduits. En entrée de gamme, le Core i5 a 8 cœurs (4 + 4), 12 Mo de cache, 16 unités graphiques, des fréquences de base un peu meilleures (2,4 et 1,8 GHz) et des turbos moins conséquents (4,4 et 3,1 GHz). La consommation est en revanche identique sur tous les modèles. Trois modèles se déclinent en une version « vPro », c’est-à-dire qui intègre principalement les fonctions de sécurité supplémentaires des PC professionnels.
L’utilisation de tel ou tel type de cœur n’est pas très claire. Intel semble dire que les cœurs performants sont utilisés par défaut pour les applications au premier plan et les économiques pour celles qui tournent en tâche de fond. Une approche différant de celle d’Apple – qui a inventé le principe des cœurs performants et économiques sur ses processeurs M1 – où les cœurs économiques sont utilisés par défaut et ne passent la main aux cœurs performants que lorsqu’ils sont saturés de calculs, typiquement pour les applications graphiques.
Reste à savoir quel est l’intérêt d’avoir autant de cœurs sur un PC portable. « De plus en plus d’applications sont développées en multithread. Mais au-delà des fils d’exécution en parallèle qui, certes, restent peu utilisés dans l’exécution d’un algorithme principal, l’énorme avantage d’un grand nombre de cœurs sur une station portable est la multiplication des entrées-sorties. Il devient réaliste d’utiliser des applications de simulation qui lisent ou écrivent en parallèle sur plusieurs SSD NVMe », explique Daniel Rogers, le chef-produit de la division des processeurs pour machines clientes.
Renseignement pris, une machine dotée d’un Core HX peut disposer de quatre SSD NVMe montés en parallèle sur ses bus PCIe.
Ces processeurs Core HX sont la déclinaison sur PC portables des Core Alder-Lake pour stations de bureau présentés à l’automne dernier. Comme eux, ils supportent des bus PCIe 5.0 deux fois plus rapides (notamment sur les accès en SSD NVMe) et 128 Go de RAM par socket. Leurs threads exécutent aussi 17 % d’instructions supplémentaires en un temps donné que les processeurs de la génération précédente.