Alain Melon, HPE : la France sera le fer de lance du « as-a-service »
Le PDG de HPE France a mis en ordre de bataille ses équipes autour des offres GreenLake. L’enjeu : répondre aux besoins de cloud souverain avec des infrastructures exploitables par 3 500 intégrateurs.
HPE France se donne un objectif : en 2022, la filiale sera la locomotive mondiale du constructeur dans les contrats de vente « as-a-service ». Ce modèle consiste à facturer à intervalles réguliers un produit selon son usage, plutôt que le vendre une bonne fois pour toutes. Interviewé par LeMagIT, Alain Melon (en photo ci-dessus), le PDG de HPE France qui a pris ses fonctions juste avant la période pandémique, avance que ce modèle aurait le mérite de faire basculer en douceur les entreprises dans l’ère du cloud.
LeMagIT : Pourquoi les entreprises adopteraient-elles un modèle de paiement à l’usage ?
Alain Melon : Notre offre Greenlake ne concerne pas que du paiement à l’usage, il s’agit d’une offre intégralement « as-a-service », susceptible de soulager complètement nos clients des actions qu’ils doivent mener sur leurs infrastructures.
GreenLake apporte deux choses. La première ce sont des ressources toujours en quantité suffisante, alors que l’on ne paie que pour celles que l’on utilise. Il n’est plus besoin d’immobiliser du capital. La seconde, c’est une infrastructure qui devient pilotable par API, sur laquelle nos partenaires intégrateurs ou hébergeurs peuvent brancher leurs propres développements afin d’enrichir les offres avec leurs catalogues de services.
La problématique à laquelle répond GreenLake est la suivante : les applications sont compliquées à migrer sur le cloud. Ce problème handicape les grands groupes qui souhaiteraient pourtant moderniser leurs chaînes de données avec des moyens de type cloud. Il se pose tout autant aux gérants de magasins qui n’ont pas de compétences informatiques et qui auraient besoin d’un pilotage automatique de leurs ressources, à la manière du cloud.
Alain MelonPDG de HPE France
Les responsables informatiques nous ont demandé comment ils allaient se sortir de la difficulté de migrer leurs infrastructures dans le cloud. Nous leur avons répondu que nous allions amener l’architecture du cloud sur leur site. C’est-à-dire les mêmes avantages de flexibilité, d’agilité, de pilotage et d’auto-provisionning que le cloud.
Nous installons chez nos clients un réservoir d’infrastructures, mais aussi, surtout, des logiciels. C’est cette plateforme logicielle – l’ensemble des outils intégrés à la console GreenLake Central – qui importe le modèle du cloud dans le datacenter.
Dans les cas d’usage SAP, où nous sommes très présents, GreenLake libère nos clients des contraintes d’infrastructure pour qu’ils puissent concentrer leurs ressources sur l’exploitation des données. C’est ce point qui est essentiel pour leurs activités, ce sont ces données qui entreront demain au capital de leurs sociétés. Les questions d’infrastructure, elles, ne sont que des contraintes.
Nous sommes convaincus que ce modèle est vertueux, qu’il répond à l’attente de l’ensemble de nos clients, dans le monde, en Europe et plus particulièrement en France. Les contrats Greenlake ont augmenté de 36 % durant l’année 2021 ; 1 250 entreprises en sont clientes.
LeMagIT : Pourquoi les entreprises françaises seraient-elles plus particulièrement concernées par ce modèle ?
Alain Melon : Le gouvernement français a mis en place une stratégie de cloud de confiance qui pousse à l’adoption d’un modèle « as-a-service » souverain. C’est une opportunité pour nos 3 500 partenaires intégrateurs français, car avec GreenLake, ils ont désormais les moyens d’aller sur un business d’hébergement local, avec l’argument différenciant de la souveraineté, du contrôle de la donnée.
Comprenez bien le modèle : nos partenaires peuvent revendre aux entreprises des contrats GreenLake. Soit. Mais ils peuvent aussi être eux-mêmes clients de GreenLake et s’en servir pour proposer d’autres offres à leurs clients, depuis leurs datacenters. Une très grande quantité de nos partenaires sont récemment passés d’un modèle 100 % revente à un modèle hybride, dans lequel ils livrent une partie des infrastructures et opèrent eux-mêmes l’autre partie.
L’une des raisons pour lesquelles nos partenaires peuvent plus facilement aujourd’hui devenir hébergeurs est que GreenLake vient avec des outils comme InfoSight, un logiciel qui apporte la maîtrise de tout ce qui se passe sur l’infrastructure, qui permet même de regarder comment les applications – citons SAP – sollicitent les infrastructures. Grâce à InfoSight, nos partenaires gagnent énormément de temps sur les diagnostics.
En définitive, lorsque les entreprises viennent nous voir avec des besoins de type cloud, nous pouvons les orienter vers l’hébergement de nos partenaires. Certains d’entre eux se font certifier SecNumCloud, d’autres hébergeurs de données de santé, d’autres encore proposent directement des applications prêtes à l’emploi dans leur hébergement. Pour ainsi dire, tous ces partenaires représentent le cloud HPE et il s’agit d’un cloud particulièrement bien étoffé en France, qui cible toutes les catégories et toutes les tailles d’entreprises.
Une autre raison qui devrait inciter les entreprises françaises, mais aussi européennes, à adopter un modèle « as-a-service » est la nouvelle réalité réglementaire concernant le développement durable. Désormais, dans les appels d’offres, le volet environnemental représente 20 % des critères pour la note finale, contre 5 % auparavant. Alors, bien entendu, en tant que constructeur, nous devons démontrer nos efforts en matière de réparabilité, de reconditionnement. Mais l’une des principales réponses au problème est dans l’usage : les entreprises veulent éviter de provisionner des serveurs fantômes. C’est ce que propose GreenLake : un pilotage automatique qui ne met en production que ce qui est utile.
Alain MelonPDG de HPE France
LeMagIT : Vous dites vouloir faire de HPE France le fer de lance au niveau mondial des offres GreenLake. Comment comptez-vous vous y prendre ?
Alain Melon : Notre volonté est effectivement d’être un pays leader sur l’adoption du modèle as-a-service. Que l’année 2022 soit pour nous une année pivot sur ce sujet et que la France serve de modèle pour le reste du groupe.
Nous nous sommes mis en ordre de marche pour y parvenir. Nous avons formé nos commerciaux, nous avons formé de nouvelles compétences en avant-vente, notamment sur l’intégration de nos logiciels de pilotage automatique des infrastructures avec les environnements de nos clients.
Nous avons aussi gagné une meilleure capacité à démontrer nos solutions. Durant le confinement, nous avons recréé un « democenter », que nous avons installé à Puteaux, dans notre nouveau siège en région parisienne et qui sera inauguré prochainement.
Nous avons promis que nous proposerions en 2022 100 % de notre catalogue en mode « as-a-service ». Et nous tenons la roadmap.
LeMagIT : À l’heure actuelle comment se situe la filiale française dans le groupe HPE ?
Alain Melon : La France est le sixième marché mondial pour HPE, le troisième en Europe, invariablement derrière le Royaume-Uni et l’Allemagne, comme chez tous les autres constructeurs. Pour autant, la France a une position stratégique pour HPE. Grenoble est l’un de nos deux centres mondiaux dans lesquels sont imaginées et construites nos solutions de supercalcul. C’est depuis Grenoble qu’ont récemment été livrés les supercalculateurs LUMI, pour EuroHPC, et Adastra, pour le CINES, tous deux à base d’architectures Cray EX.
Le supercalcul est l’une des zones de croissance les plus fortes actuellement. Au-delà des grandes machines, nous concevons aussi à Grenoble une nouvelle génération de machines plus petites pour répondre aux besoins d’intelligence artificielle des entreprises.
Nous avons aussi à Sophia Antipolis notre laboratoire concernant les développements télécoms et réseaux. Les réseaux, au travers de notre marque Aruba, sont d’ailleurs en forte croissance. Et, là aussi, grâce à une console, Aruba ESP, qui apporte à l’infrastructure physique tous les avantages du cloud.