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La collaboration souffre malgré tout de la distance (étude Microsoft)
Les outils collaboratifs favorisent le travail hybride. Mais utilisés à trop haute dose, ils ont aussi des effets négatifs. C’est ce que rappelle une étude de Microsoft sur ses propres employés.
Une étude de Microsoft publiée ce mois-ci dans la revue scientifique Nature Human Behavior montre que les réseaux de communication de ses employés sont devenus plus statiques et moins interconnectés lors du passage au travail à distance, imposé par la crise de 2020. Les outils collaboratifs comme le mail, le chat et la visio, bien que très utiles, n’ont par ailleurs pas réussi à reproduire les avantages de la communication interpersonnelle.
Les chercheurs de Microsoft se sont appuyés sur l’observation de la manière dont les 61 182 employés américains de l’éditeur ont communiqué au cours des six premiers mois de 2020 (période où le travail à domicile est devenu obligatoire).
Selon l’étude, à cette période, les employés ont eu moins de liens avec des collègues d’autres unités que la leur. Ils ont, à la place, passé plus de temps à communiquer avec les membres de groupes préexistants. Ce déclin des communications inter-groupes serait préjudiciable dans la mesure où il est indispensable pour transmettre de nouvelles informations.
Deux personnes liées par un lien fort se transfèrent en effet des informations plus facilement (elles sont plus susceptibles de partager une perspective commune) », indique l’étude. « En revanche, les liens [extérieurs au groupe] […] sont plus à même de donner accès à des informations nouvelles et non redondantes ».
Pendant la crise, les outils collaboratifs ont permis à beaucoup d’activités de continuer. Mais ils n’ont pas réussi à reproduire la spontanéité des interactions du bureau. Un manager devra par exemple consulter le calendrier d’un employé à distance et organiser une réunion avec lui, quand, au bureau, il lèvera simplement la tête pour voir si un collaborateur est disponible pour une discussion impromptue.
Ce manque de spontanéité rendrait aussi plus difficile la rencontre de nouveaux collègues, confirme Mike Fasciani, analyste chez Gartner. Selon lui, il est plus facile de nouer des relations par le biais de ces interactions informelles (partager une tasse de café, bavarder dans le couloir), que par une conversation programmée en ligne.
« Au fur et à mesure que cette relation [informelle] se développe, la portée et la profondeur de la collaboration ont plus de chance de se transformer en résultats plus créatifs et plus significatifs », avance-t-il.
Les chercheurs de Microsoft expliquent certaines lacunes de la communication à distance par les canaux que les employés ont choisi d’utiliser. Selon l’étude, la communication synchrone – dont les appels téléphoniques et la visio – a diminué, au profit du mail et de la messagerie instantanée. En utilisant uniquement du texte, les employés auraient rendu plus difficile le partage d’informations complexes.
Les distractions liées aux communications en ligne constituent un autre problème. Des notifications apparaissent en continu. Et lutter contre la « Zoom fatigue » est devenue une nécessité.
Cette étude arrive pile au moment où les entreprises essayent de trouver un juste équilibre entre le nombre de jours par semaine de télétravail et le nombre de jours au bureau. Les entreprises tentent également de déterminer dans quelle mesure les outils de communications unifiées peuvent remplacer les communications en personne.
Les réponses à ces questions sont essentielles, car la majorité des employés ne veulent plus être au bureau cinq jours par semaine. Une récente enquête de PwC conclut que 55 % des employés de bureau souhaitaient au moins trois jours de télétravail par semaine.
Selon les chercheurs de Microsoft, les entreprises peuvent minimiser les effets de bord du travail à distance en faisant en sorte que les équipes soient présentes au bureau à des jours fixes, ou en exigeant que tout le monde soit présent au bureau certains jours. Une autre option consiste à ne laisser que certains types d’employés travailler à distance. D’autres envisagent une alternance, avec une semaine sur site et une semaine en télétravail. Bref, l’expérimentation est en cours. Et il semble y avoir autant de « bonnes solutions » que de profils.