Evernex : « Nous faisons durer les serveurs plus de vingt ans »
Entreprise française peu connue, Evernex se revendique nouveau champion de la maintenance, après le rachat de l’Allemand TechnoGroup.
« Les systèmes informatiques sont vendus pour durer sept ans. Nous pouvons les faire tenir vingt ans, voire plus ! », lance Jean-Marc Gottero, le directeur des ventes d’Evernex, un acteur français de l’IT dont personne n’entend jamais parler mais qui sous-traite la maintenance de plusieurs centaines de milliers d’équipements pour plus de 10.000 entreprises dans 45 pays. Et qui vient d’atteindre un CA de 154 millions d’euros après avoir racheté TechnoGroup, son concurrent allemand. Selon certains observateurs, Evernex pourrait bien devenir dans les prochaines semaines un incontournable des projets de cloud hybride.
« Les entreprises sont tellement occupées par leur migration vers le cloud public qu’elles n’ont plus de ressource pour moderniser leurs datacenters. Mais en même temps, si l’application qui reste dans ce datacenter n’évolue pas, il n’y a pas de raison de changer l’équipement sous-jacent. La seule chose qui importe est que sa maintenance continue d’être assurée », explique-t-il.
Jean-Marc Gottero fait référence à la fin de vie des contrats constructeurs : quand l’échéance arrive, les fournisseurs proposent de remplacer leur matériel vieillissant par un neuf, au prétexte que l’achat coûterait moins cher qu’un contrat de maintenance prolongé. « Nous, nous proposons de prolonger cette maintenance, mais avec un tarif 30 à 50 % moins cher que ce que vous payiez précédemment. »
L’étonnant retour en grâce du Green IT
« Nous sommes le seul fournisseur qui ne pousse pas à la consommation de nouveaux matériels. Au contraire. Nous sommes là pour aider les entreprises à tenir leurs objectifs de développement durable. Pour garantir aux industriels que les équipements embarqués dans leurs trains tiendront autant de décennies que les trains eux-mêmes. »
Le directeur des ventes assure qu’Evernex a récemment dû répondre à des demandes de garanties écologiques inédites. « Des entreprises viennent à présent nous voir pour que nous leur fournissions des preuves de leurs engagements en développement durable. Manifestement, les efforts qu’ils pourraient démontrer sont désormais estimés dans leur comptabilité comme un bénéfice. »
Et de décrire le calcul : « 75 % de l’empreinte carbone d’un équipement est dans sa fabrication. Donc, même si cet équipement promet de moins consommer que le précédent, son achat va de fait augmenter votre empreinte carbone. » Autre calcul : l’Europe ne recyclant que 42 % de ses équipements informatiques, se débarrasser d’un matériel signifie ne pas le recycler à 58 %.
L’informatique écologique, ou « Green IT » était en vogue dans les argumentaires des fournisseurs informatiques il y a une dizaine d’années. Mais comme le concept était conditionné à l’achat de nouveaux matériels hors de prix – plus virtualisés, donc consolidant plus de serveurs fonctionnels sur la même prise électrique –, le phénomène n’a suscité qu’un intérêt modéré de la part des entreprises.
Ces derniers mois, cependant, le principe d’une informatique décarbonée revient sur le devant de la scène, notamment du fait des migrations vers le cloud qui soulagent les entreprises de la responsabilité d’être directement des pollueurs.
Un seul interlocuteur pour la maintenance de toutes les marques
En réalité, la maintenance n’est pas l’activité première d’Evernex. À la base, le groupe se spécialisait dans la revente de matériels informatiques d’occasion : « Cela reste une part importante de notre activité. Pendant la crise pandémique, nous étions les seuls à pouvoir fournir de l’équipement en quantité suffisante. De l’équipement de seconde main, bien moins cher que du neuf », argumente Jean-Marc Gottero.
« Toujours est-il que le rachat et la revente de matériels d’occasion nous ont permis d’accumuler un très important stock de composants de rechange au fil du temps. Suffisamment pour tout pouvoir réparer, quelle que soit la génération ou la marque de vos appareils, dans des délais très courts, qui peuvent descendre à seulement quatre heures. »
« Nous sommes devenus si efficaces dans les réparations, que nous sommes dans certains cas devenus le sous-traitant en maintenance recommandé par le fabricant lui-même ». LeMagIT croit comprendre qu’Evernex assure notamment la maintenance officielle de tous les serveurs et baies de stockage Huawei en Europe.
« Nous avons réparti nos stocks, en Europe, en Afrique. De fait nous pouvons à présent répondre à des besoins locaux et globaux, notamment pour les entreprises qui ont des filiales à l’étranger. »
Les demandes en dépannage se sont faites de plus en plus précises. « Des banques nous ont demandé de nous former à leurs besoins en matière d’IT. Du coup, c’est devenu notre force : proposer aux entreprises un seul interlocuteur pour gérer toute la maintenance de leurs matériels, qu’ils soient de marque Dell, HPE, IBM, etc. Et, ce, en toute indépendance des constructeurs et de leurs contraintes contractuelles, ce qui rassure d’autant plus nos clients. »
Les hébergeurs de cloud privé, plus gros consommateurs de serveurs recyclés
Jean-Marc GotteroDirecteur des ventes, Evernex
Au fil de la conversation, Jean-Marc Gottero glisse que les 500 experts techniques d’Evernex sont en réalité pour la plupart des anciens salariés de ces constructeurs, qui connaissent sur le bout des doigts les produits qu’ils ont vendus durant des années.
Les matériels les plus recyclés seraient les serveurs. Et, surprise, ceux qui rachètent le plus de serveurs recyclés seraient les hébergeurs de cloud, à savoir les acteurs censés être à la pointe du marché.
« Les acteurs de l’IaaS utilisent des matériels recyclés, car ils coûtent bien moins cher, car ils réduisent leur empreinte carbone et, enfin, car ils exécutent très bien toutes les applications traditionnelles que l’on trouve dans les clouds privés. »
Cette part de l’activité est devenue si importante qu’Evernex s’est récemment retrouvé à devoir développer du service autour : « En cloud privé, nombre de projets sont ponctuels. Les hébergeurs ont donc besoin de régulièrement vider les contenus et remettre à neuf les équipements pour accueillir les projets suivants. »
Et les services sont bien le nouvel objectif de développement que se fixe Evernex. « Après le recyclage, nous allons de plus en plus développer nos compétences dans la destruction des machines non recyclables et la migration de leurs contenus, vers d’autres machines, sur d’autres sites. Il existe en effet une directive européenne qui autorise qu’une licence achetée reste utilisable sur une machine de remplacement. Ainsi, nous ferons durer encore plus longtemps les actifs d’une entreprise et lui permettrons de toujours plus réduire son empreinte carbone », conclut Jean-Marc Gottero.