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Industrie 4.0 : FactoryEye commence à rencontrer son public
Lancée il y a deux ans par Magic Software, FactoryEye commence à rencontrer son public cible, les PME, PMI et les ETI. L’éditeur israélien doit encore améliorer ses capacités de machine learning.
En 2019, Magic Software présentait FactoryEye, une offre dédiée à l’industrie, plus particulièrement aux PME et PMI, s’appuyant sur sa plateforme d’intégration XPI. Depuis, l’éditeur israélien a étendu son offre de l’Europe vers les États-Unis, tout comme il s’est rapproché de partenaires afin de se mettre en avant et pour répondre aux besoins de certains clients. La division américaine consacrée à FactoryEye a ainsi établi une collaboration avec JD Edwards, pour figurer sur la marketplace de solutions attenantes à l’ERP de l’éditeur.
Pour Magic Software, l’expérience est nouvelle. Cet acteur a d’abord bâti une plateforme de développement, avant de se mettre à l’intégration low-code. Or les ces entreprises manufacturières ont des besoins spécifiques pour interconnecter des systèmes comme des WMS, des ERP, des outils GPAO ou des MES. Ce sont souvent des progiciels cloisonnés. « Nous avons en quelque sorte décidé de verticaliser notre offre », rappelle Pascal Rawsin directeur marketing Europe du Sud chez Magic Software. « Toutes ces PMI/PME ont besoin de faire dialoguer les gens de l’IT et ceux de l’OT ».
Combiner plateforme d’intégration, MES et outil analytique
Il a fallu renforcer les capacités de Magic XPI pour connecter les systèmes employés dans les unités de production des clients. Magic souhaitait apporter des capacités supplémentaires propres aux besoins des industriels. « Nous avons effectué des adjonctions de technologies en signant des partenariats », indique Pascal Rawsin. Magic associe donc XPI à Matics, le MES en mode SaaS d’une startup israélienne basée à Haïfa.
Matics est compatible avec les machines les plus modernes, disposant déjà des standards de connexion et de collecte de données. « Quand les machines sont plus anciennes, nous proposons à nos clients des boîtiers pour les interconnecter et récupérer les informations nécessaires », précise le directeur marketing. En outre, Matics permet de visualiser en temps réel les métriques des différentes machines.
L’année dernière, Magic Software a intégré XPI avec Knowi, une plateforme analytique capable d’analyser les données structurées, semi-structurées et non structurées. Celle-ci joue le rôle de data hub de l’offre FactoryEye, sur lequel il est possible d’exécuter des modèles de machine learning.
« Avec FactoryEye, les responsables des opérations peuvent obtenir assez rapidement des indicateurs de performance liés à la maîtrise d’un cycle de production, des goulets d’étranglement ou encore des imperfections de production », avance Pascal Rawsin.
Au vu du public ciblé, Magic Software ne doit pas « faire peur » dans la manière de déployer ses solutions. Tout est fait pour que FactoryEye soit compatible avec les équipements et systèmes existants de ses clients. « Nous nous intégrons avec l’existant sans le révolutionner, car nos interlocuteurs sont plus ou moins avancés dans leur expertise du numérique ».
Ensuite, Magic et ses partenaires intégrateurs, par exemple Inetum (ex-GFI) et des experts, dont Preste entre autres, proposent de développer les premiers indicateurs de performance clés, après avoir réalisé un audit avec le client. Il s’agit d’identifier les axes d’amélioration de sa production. « Avec nos partenaires, nous appliquons une méthode itérative afin de mettre dans les mains de nos clients de nouveaux indicateurs leur permettant d’affiner leur prise de décision sur des aspects auparavant handicapants ou problématiques », explique le directeur marketing.
Deux ans après le lancement de l’offre, FactoryEye disposerait d’un socle technologique adapté au monde industriel (40 % des clients de Magic Software), et de méthodologies pour le déployer. « Pour l’instant, l’expérience est encore jeune, mais on a collectivement beaucoup appris », affirme Pascal Rawsin. « L’industrie est un monde beaucoup plus pragmatique que celui du tertiaire, dans lequel l’informatique est soumise à des exigences d’excellence opérationnelle fortes ».
Selon le dirigeant, la brique XPI convainc davantage les industriels qui avaient du mal à interconnecter leurs systèmes. Ensuite, la possibilité de visualiser les données et d’en tirer des premiers KPI en temps réel ou de manière hebdomadaire a séduit certains acteurs. « Ce qui est moins urgent pour nos clients, et nous avons un peu moins d’expérience concernant ce sujet, c’est l’utilisation de l’analytique avancée et du machine learning », note Pascal Rawsin. « Il y a un intérêt grandissant pour ces capacités telles que la maintenance prédictive, mais ce sujet demande encore de faire appel à des data scientists, et nous aimerions simplifier cette partie ».
Dans un premier temps, il s’agira de proposer des indicateurs précâblés, via des templates d’intégration et de BI personnalisables. « Plus nous développons notre activité auprès des acteurs de la plasturgie, de la fabrication métallique ou du médical, plus nous nous apercevons que les KPI de taux de rendement synthétique ou encore de taux de rendement global ont des points communs », remarque le directeur marketing.
Un contexte difficile pour FactoryEye
En deux ans, l’offre FactoryEye a été adoptée par « une dizaine de clients dans le monde, issus des secteurs très variés ». Dernièrement, Magic a signé Aplix, un fabricant international de produits auto-grippants (par exemple des bandes auto-adhésives) dont le siège est situé en France. Il s’apprête à déployer FactoryEye sur deux sites de production près de Charlotte, en Caroline du Nord. Le groupe allemand SANHA, spécialiste en systèmes de tuyauteries (plus de 8 300 références), a lui aussi déployé cette solution. « Nous avons aussi deux clients dans le domaine de la fabrication de films plastiques pour le secteur médical », illustre Pascal Rawsin.
D’autres clients de Magic Software n’installent que Magic XPI.
Rational AG utilise la plateforme d’intégration en combinaison avec son CRM Salesforce, tandis qu’Albéa Packaging l’emploie pour relier son CRM Salesforce à son ERP SAP, mais aussi pour connecter son MDM avec 25 applications métiers dont l’ERP, le SCM Bevolta, Cornerstone, ADP ou encore Neocase.
Le développement de FactoryEye n’est pas anodin. Outre la combinaison de technologies, Magic Software a dû revoir sa stratégie et trouver ou former les commerciaux, les consultants et les experts techniques à même de comprendre les problématiques du monde industriel.
Cette solution entre également en concurrence avec les produits des éditeurs spécialisés du MES, mais aussi avec les « grosses machines » telles Siemens, BrainCube, Dassault ou encore Rockwell Automation. « Il faut aussi choisir ses batailles. C’est l’une des raisons pour lesquelles nous ciblons les PMI, PME et les ETI parce qu’elles ont des besoins d’agilité, parce qu’elles ne sont pas autant contraintes par des politiques d’achat et qu’elles restent ouvertes à de nouvelles solutions », déclare le directeur marketing. Bien évidemment, l’éditeur propose FactoryEye à ses clients existants.
Aussi, la crise sanitaire et le confinement sont passés par là. « Nous étions dans une phase de lancement de produit et nous avons pris de plein fouet la crise », reconnaît Pascal Rawsin. « Après 1 an et demi de recul, nous avons remarqué que notre capacité à échanger avec les clients a été affectée les six premiers mois de la pandémie, avant une reprise pratiquement normale de l’activité. Il nous a été possible de réaliser des démonstrations ou des simulations à distance et même à commencer quelques déploiements puisque l’offre repose sur des solutions SaaS », explique-t-il.
L’adoption du SaaS et du cloud par les industriels, une question de maturité
Étant donné que FactoryEye dépend en grande partie de logiciels hébergés sur le cloud, ce mode de déploiement peut encore poser question.
Pascal RawsinDirecteur marketing Europe du Sud, Magic Software.
« Le SaaS est un phénomène qui devient incontournable et qui va finir par être accepté par tous. Au début, nous avons rencontré quelques réticences. Cela nous arrive encore dans nos phases de prospection de discuter avec des responsables pour qui l’adoption du SaaS “ce n’est même pas en rêve” ; mais ils sont de moins en moins nombreux », remarque Pascal Rawsin. « Nous pouvons prouver que nous respectons des pratiques de sécurité et que nos environnements sont sûrs. Lors des intégrations, qu’elles soient d’une application SaaS vers une application locale ou d’un service SaaS vers un autre, nous mettons en place le chiffrement des données et les règles de bonne manipulation ».
FactoryEye peut être hébergée sur Google Cloud, AWS ou Microsoft Azure. Concernant la présence de la solution sur les infrastructures des fournisseurs européens, le directeur marketing se veut prudent, mais n’écarte pas la possibilité de la voir débarquer un jour sur l’un de ceux-là, par exemple 3DS Outscale.
Pour Pascal Rawsin, la réticence de certains acteurs industriels à migrer vers le cloud découle moins d’une forme de peur qu’un manque de maturité. « Je ne sais pas si les industriels des secteurs non critiques ont réellement peur de se faire voler des données sur leurs secrets de fabrication de poulies ou de courroies. Je pense surtout qu’ils ne sont pas véritablement ouverts et prêts pour ces sujets ».