Entre « souveraineté des données » et « souveraineté technologique », OVH choisit les deux
Alors que le débat s’anime autour d’une IT qui serait totalement souveraine d’une part, et une IT qui serait un cheval de Troie pour les GAFAM, Octave Klaba n’oppose pas les deux qui sont, au contraire selon lui, complémentaires.
Depuis l’annonce du « Cloud de confiance » par le gouvernement, un débat anime et divise la communauté du numérique français.
D’un côté, certains acteurs perçoivent le mécanisme de licence comme un potentiel cheval de Troie, une manière d’introduire encore plus le loup des GAFAM dans la bergerie des marchés publics.
« Le risque est important de reléguer au second plan les acteurs français en les positionnant comme des revendeurs de technologies américaines sous licence aux dépens de la vision plus ambitieuse d’une filière cloud française compétitive et innovante », commentait par exemple Scaleway (le cloud souverain du groupe Iliad) dans une communication à la presse. « Lors de son annonce, le gouvernement a émis des propos contradictoires […] L’État semble privilégier l’achat des solutions étrangères, qui contribue à la création de valeur hors de nos frontières et à la perte de contrôle et de souveraineté sur les données ».
De l’autre, la décision est reçue comme une opportunité « d’européaniser » les solutions américaines (comme avec Bleu, la future alliance entre Microsoft, OVH et Capgemini).
Le fondateur d’OVH, Octave Klaba, résume cette opposition en une formule : « Souveraineté de Données » contre « Souveraineté Technologique ».
« Souveraineté de Données » contre « Souveraineté Technologique »
Dans le premier cas, seules les données sont « souveraines » (ce qui est déjà bien puisque le CLOUD Act et les autres lois américaines ne s’y appliquent pas).
Avec Bleu par exemple (auquel ne participe pas OVH), les documents ne sont pas soumis à l’extraterritorialité d’un droit étranger, mais l’outil utilisé pour les éditer et les partager – même managé par des acteurs locaux – est américain (Microsoft 365). D’où les critiques des éditeurs européens qui voient la concurrence des géants de l’IT se renforcer avec une nouvelle corde (souveraine) à leur arc.
Dans le second cas, la stack technologique est également locale ou open source. Ou les deux.
C’est le cas d’OnlyOffice ou de NextCloud sur la marketplace d’applications gérée par OVH, de Rainbow d’Alcatel Lucent ou de Tixeo dans la visio, de Wimi (sur Scaleway) dans le collaboratif, d’Oodrive (qui gère sa propre infrastructure) dans le partage de documents, ou encore des applications de la toute nouvelle marketplace d’Outscale. Pour ne citer que quelques exemples.
« La première est “rapide” et “opportuniste” alors que la deuxième est à long terme, car elle nécessite de créer un écosystème », analyse Octave Klaba.
« Souveraineté de Données » et « Souveraineté Technologique »
OVH est un des tout premiers cloudistes européens à avoir passé un accord de type « licence » avec un GAFAM (avec Google autour d’Athos) avant même l’annonce du Cloud de Confiance.
Des concurrents commencent à le lui reprocher, voire à le présenter comme un vecteur de diffusion des solutions américaines.
Dans une réaction à la composition du board de GAIA-X fraîchement élu, Jean-Paul Smets, PDG de Rapid.Space et fervent défenseur de l’open source, décrivait par exemple récemment Atos, Orange et OVH comme des « entreprises qui utilisent ou distribuent des technologies US de cloud ».
Octave KlabaOVHCloud
Pour Octave Klaba, le débat ne serait pas là. Les deux iraient au contraire de pair. « La première option [N.D.R. : souveraineté des données] finance la seconde [N.D.R. : souveraineté technologique] », réplique-t-il.
« Chez OVHCloud nous faisons les deux, en parallèle », tranche-t-il avant de citer des exemples de services maison dans les deux catégories : vSphere, Nutanix (AHV), NetApp (OnTap) ou Exchange pour la première ; Openstack, OpenIO, AI Training Platform ou Exten pour la seconde.
Au passage, le fondateur d’OVHcloud officialise l’arrivée plus ou moins lointaine de nouveaux services jusqu’ici officieux avec SAP (HANA) et avec ServiceNow dans l’ITSM. De quoi remettre une pièce d’un dollar, et une d’un euro, dans la machine à débats sur « les » souverainetés ?