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Redis Labs engrange les fonds pour préparer son introduction en bourse
Redis Labs a annoncé une levée de fonds en série G. Selon le PDG Ofer Bengal, cette opération sert à préparer et légitimer une future introduction en bourse d’ici un an. Le fait que l’éditeur et la plupart des fournisseurs de cloud aient enterré la hache de guerre semble être l’une des raisons de cette phase de croissance.
L’éditeur américain d’une base de données multimodèle et temps réel, Redis Labs, a dévoilé le 7 avril une levée de fonds de 110 millions de dollars. Cette série G menée par Tiger Global porte la valorisation de l’entreprise à 2 milliards de dollars. Les nouveaux investisseurs sont Tiger Global, mais aussi Softbank par le biais de son Vision Fund 2. Parmi les partenaires financiers existants (Bain Capital Venture, TCV, Francisco Partners, Goldman Sachs Growth, Viola Ventures, Dell Technology Capital), seul TCV siège lors de ce tour de table.
Depuis sa création en 2011, l’entreprise a récolté 347 millions de dollars. Il y a peine sept mois, en août dernier, Redis Labs avait levé 100 millions de dollars, lors d’une série F menée par Bain Capital Ventures et TCV. Entretemps, sa valorisation a doublé.
Dans le communiqué de presse, l’éditeur ressort la lancinante ritournelle audible à chaque levée de fonds. Pour Redis, il s’agit d’étendre ses capacités commerciales, notamment ses ambitions internationales et d’améliorer le développement de sa plateforme de bases de données temps réel.
Une introduction en bourse abordée avec prudence
Ofer Bengal, PDG de Redis Labs, confirme ses intentions auprès du MagIT, mais se veut beaucoup plus direct quant aux implications d’une telle opération.
« Vous ne levez pas des fonds quand vous en avez besoin, mais quand vous le pouvez », s’amuse-t-il. « Nous avions déjà suffisamment de trésoreries avant cette série G, mais comme nous préparons l’entreprise à une possible introduction en bourse d’ici un an, nous avons pensé que c’était une bonne idée de profiter de l’appétit du marché », indique-t-il.
Si ce projet d’IPO semble prévu de longue date, l’instabilité provoquée par la crise sanitaire n’est pas étrangère à cette attitude de fourmi. « Comme la situation est complexe et incertaine, nous serons peut-être amenés à attendre un peu plus longtemps avant de lancer notre IPO. Ce montant supplémentaire nous permettra de planifier correctement cette opération », justifie le PDG.
D’ici un an, la direction devra engager les responsables nécessaires à la gestion boursière, mais également préparer l’organisation aux rapports financiers tous les trimestres. « La chose la plus importante est de réaliser des prévisions stables et fiables, afin que nous soyons capables d’atteindre nos objectifs trimestre après trimestre », anticipe Ofer Bengal. « L’IPO n’est pas véritablement un défi. Réussir en tant qu’organisation publique est une tout autre affaire ».
Faire de Redis Enterprise une base de données comme les autres
Redis Labs revendique 8 000 clients, dont sept membres du Fortune 10 et 31 % du Fortune 100. MasterCard, Dell, Fiserv, Home Depot, Microsoft, Costco, Gap ou encore Groupon, sont quelques-uns de ses clients. L’éditeur manifeste principalement sa présence auprès de nombreux services financiers et des banques, des acteurs technologiques (IT ou non) et ceux de la grande distribution.
« Beaucoup d’acteurs de la grande distribution utilisent notre base de données pour gérer leurs systèmes d’inventaires et de prises de commandes », illustre Ofer Bengal. « Nous avons aussi des clients dans des domaines variés comme les médias, les télécommunications, l’hôtellerie, l’industrie médicale, etc. », ajoute-t-il.
Cette diffusion de la plateforme Redis Labs Enterprise au-delà des frontières IT marque un changement de perception du marché et l’évolution de la technologie.
« Pendant plusieurs années et jusqu’à récemment, notre technologie a été perçue comme un système de cache pour accélérer d’autres bases de données », rappelle le PDG. « Cela n’a jamais eu de sens pour nous. Pourquoi avoir un SGBD lent et un système de cache à côté pour l’accélérer alors que vous pouvez avoir une base de données très rapide ? », vante-t-il.
« Nous avons fait de Redis Labs Enterprise un SGBD temps réel polyvalent qui peut traiter des millions de transactions avec des temps de latence très faibles. Ces trois dernières années, nous nous sommes efforcés de pousser les fonctionnalités au-delà de la mise en cache en intégrant de nouveaux modèles de données. Il ne s’agit plus de traiter seulement des paires clés-valeurs, mais aussi les documents JSON ou encore les données de séries chronologiques », défend le PDG.
Le dirigeant assure que l’entreprise a également renforcé les capacités de son moteur de requêtes, le mécanisme d’indexation, tout en étayant les capacités in-memory avec des fonctionnalités de réplication, de l’auto failover et des écritures en parallèle sur disque dur.
« Nous voulons faire de Redis elle-même la base potentielle pour la plupart des applications. Évidemment, il s’agit d’un processus continu, mais quand nous observons aujourd’hui nos résultats, environ 40 % de nos revenus sont issus de cas d’usage liés à la mise en cache ; les 60 % restants proviennent de son utilisation comme une base de données multimodèle », revendique-t-il.
Pour rappel, Salvatore Sanfilipo, le créateur de la version open source de Redis, a quitté son poste de Benevolant Dictator for Life en juin dernier, laissant la place à une gouvernance constituée de trois équipes dirigées par des employés de Redis. « Des représentants d’Alibaba et d’AWS ont rejoint Yossi Gottlieb, Oran Agra et Itamar Haber [les trois responsables de ces équipes N.D.R.] », déclare Ofer Bengal. « Nous avons pu faire des progrès en gérant beaucoup de pull que Salvatore n’avait jamais eu le temps de traiter grâce à cette équipe élargie. Et nous préparons l’arrivée de Redis 7.0 » se réjouit le PDG.
Ce changement de direction permet à l’éditeur de maintenir la différenciation entre la version open source sous licence BSD 3 et sa solution propriétaire. Redis Enterprise s’accompagne de la licence maison RSAL. Ce produit est pensé comme un module à placer par-dessus Redis Open Source. Ce « contrôle » dans les règles de l’art du projet libre doit permettre à l’éditeur de ne pas perdre pied face à ses concurrents directs et aux géants du cloud. Cela semble lui réussir pour le moment.
Des relations plus apaisées avec les fournisseurs de cloud
Ofer Bengal rappelle à juste titre que les fournisseurs de cloud offrent des services Redis basés sur la version open source de la base de données. Ces acteurs ont ajouté des capacités d’automatisation afin de proposer des produits entièrement managés tels Amazon ElastiCache, Google Memory Store ou Azure Cache. « Ceux-ci ont remporté un grand succès au fil des ans », reconnaît le PDG.
Ofer BengalPDG de Redis Labs
« Les fournisseurs de cloud étaient en concurrence avec nous et c’était un peu désagréable parce que nous développions Redis. Eux jouissaient de quelque chose dans lequel ils n’investissaient pas beaucoup », constate-t-il.
« Mais il semble que le climat soit en train de changer et qu’ils sont désormais ouverts à des partenariats avec des entreprises open source ».
Ofer Bengal explique que Redis a largement profité de son partenariat réalisé il y a un an et demi avec Google Cloud pour faire de Redis un service natif de GCP. Les clients ne sont plus obligés de signer un contrat séparé et peuvent utiliser les ressources investies annuellement dans GCP pour accéder à ce service, précise le PDG.
Plus récemment, Redis Labs a annoncé un accord avec Microsoft Azure pour faire de Redis Enterprise le tier réservé aux entreprises d’Azure Cache. Ce service est en disponibilité générale depuis mars 2021. Le PDG de Redis s’attend à un succès similaire, mais l’éditeur ne compte pas s’arrêter en si bon chemin.
« Nous sommes en train de discuter avec d’autres partenaires potentiels. Je pense que c’est un changement très positif de la part des fournisseurs cloud, parce qu’ils ne seront jamais capables de se concentrer aussi intensément sur un seul produit comme nous le faisons. Nous avons plus de 200 personnes qui travaillent au développement de Redis », vante le PDG.
« De plus, ce type de partenariat facilite la vente de nos solutions, particulièrement si les clients de ces fournisseurs peuvent consommer notre technologie à partir de leur budget annuel chez Google Cloud ou Microsoft Azure, par exemple ».
Pour autant, Ofer Bengal ne mentionne pas le cas AWS. La société bientôt dirigée par Adam Selipsky héberge la DBaaS Redis Enterprise sur son cloud, mais mise avant tout sur son propre service très populaire, Amazon ElastiCache.
Redis Labs tient son événement annuel le 20 et le 21 avril 2021. LeMagIT aura l’occasion d’évoquer les nouvelles fonctionnalités de la base de données.