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IoT : Objenious veut renforcer son empreinte dans le data management
Après avoir déployé le réseau LoRa à l’échelle nationale, Objenious, l’unité IoT de Bouygues Telecom compte bien renforcer son offre dans la gestion de données. Son objectif : faciliter le routage des données vers les SI et les applications métiers.
Lancée en 2016 comme une filiale Objenious a rejoint les rangs de sa maison mère, Bouygues Telecom en 2019. Dirigée par Stéphane Allaire (depuis à la tête du programme 5G de Bouygues) de sa création jusqu’en août 2019, la société avait la charge de développer l’activité d’offres et de services consacrés au réseau LoRaWAN, déployé par l’opérateur télécom en France depuis 2017.
Pas moins de 95 % du territoire est désormais couvert par le biais de 4 300 antennes. L’entreprise poursuit les contrats de roaming en Europe et envisage de se lancer dans l’IoT spatial. Il conduit un prototype avec Kineis, pour hybrider le réseau satellitaire (basé sur la technologie Argos) constitué de 25 nanosatellites.
Dans sa nouvelle forme, Objenious rassemble deux entités, celles dédiées à LoRa et l’autre aux offres M2M. C’est Bernardo Cabrera l’ancien directeur de l’unité opérationnelle M2M qui a repris le flambeau pour les unifier sous la bannière « Objenious by Bouygues Telecom », elle-même placée sous la direction diversification de l’opérateur.
Bernardo CabreraDirecteur Global Business Unit, Bouygues Telecom
Bernardo Cabrera n’est pas étranger à la création d’Objenious, bien au contraire. Il a même été membre du conseil d’administration de la Lora Alliance entre 2015 et 2016. Cinq ans plus tard, « la stratégie est claire », affirme le dirigeant d’Objenious by Bouygues Telecom. « Notre ambition est de devenir un opérateur global de l’IoT. Nous avons deux types d’actifs principaux : les technologies de connectivité pour répondre à tous les cas d’usage et une plateforme pour faciliter la gestion des objets communicants et de leur raccordement avec les systèmes d’information de nos clients ou de nos partenaires », vante-t-il.
Selon le responsable, il ne faut pas cantonner l’activité de sa BUE à la connectivité. « Nous souhaitons faire valoir notre expertise réseau, mais dans un contexte IoT cela implique de maîtriser la collecte des données et leur transport vers un centre de données ou un cloud. C’est le savoir-faire que nous voulons mettre en avant auprès de nos clients », affirme-t-il.
En 2019, la division a annoncé une offre d’interconnexion de sa plateforme de traitement des données IoT Spot avec le PaaS Azure IoT Central de Microsoft. Il s’agit de faciliter la création d’applications IoT et l’analyse des informations sur le cloud de la firme de Redmond.
Objenious veut faciliter le routage des données
Originellement, Spot a été conçu pour la supervision et la gestion de parc d’objets connectés de manière sécurisé. Petit à petit, Objenious a ajouté des fonctionnalités comme la localisation et le tracking, la détection d’anomalies, ainsi que le « décodage des données », c’est-à-dire l’uniformisation des informations relayées par des capteurs potentiellement de différentes natures. C’est sur cet aspect que la division aspire à renforcer son offre. « Il y a des acteurs qui maîtrisent parfaitement la conception d’applications métiers, nous, nous souhaitons leur faciliter la tâche », explicite Bernardo Cabrera.
Après un déploiement on premise, Objenious a migré Spot vers Google Cloud, avec l’aide de Claranet. Pour autant, l’entreprise se veut agnostique de l’infrastructure et souhaite offrir à ses clients les conseils et les services pour faciliter la construction de leur architecture IoT. Ils peuvent donc choisir où seront routées leurs données. La difficulté consiste désormais à mieux gérer les parcs d’objets IoT qui ne dépendent pas d’une seule brique de connectivité.
En clair, il s’agit si possible de rassembler les données en provenance de capteurs LTE ou LoRa vers les mêmes cibles de traitement et de stockage. « Nous sommes capables d’agréger des données à partir des technologies différentes, mais cela demande généralement des développements spécifiques. Il y a encore des défis à relever sur cet aspect du marché », considère le dirigeant.
Tout un écosystème à réunir
Pour celui qui suit Objenious depuis sa création, cette approche n’est pas surprenante. La division n’a jamais vraiment fait bande à part. Il faut dire que la chaîne de valeur de l’IoT impose la prise en compte d’un écosystème.
« L’activité économique découle de solutions techniques pour répondre à des besoins et en ce sens nous avons besoin de nous interopérer avec différentes solutions et sociétés. Évidemment, il peut y avoir de la concurrence, mais l’interopérabilité est clé », insiste le directeur d’Objenious.
Pour illustrer ses propos, Bernardo Cabrera vante les mérites de l’IoT Challenge, un concours conduit l’année dernière par Objenious au côté de Microsoft, Bouygues Construction, BearingPoint et STMicroelectronics afin de promouvoir, doter et sûrement découvrir des produits IoT. « Nous avons tous la volonté de faire communiquer cet écosystème, de pousser, de défier les startups pour qu’elles adaptent leurs solutions aux besoins des clients ».
Au quotidien, la division compte sur un réseau de partenaires composés de distributeurs, intégrateurs, installateurs, cabinets de conseil, concepteurs de solutions ou d’équipements connectés.
L’IoT, porté par l’industrie 4.0, le smart building et la santé
L’opérateur revendique plus de 5 000 clients sous la bannière Objenious by Bouygues Telecom, mais ne précise pas la répartition entre les anciennes divisions LoRa et M2M (2G, 3G, 4G et bientôt 5G). De manière générale, son activité est principalement portée par le secteur de l’automobile (dont Renault) et de l’énergie (les fournisseurs d’eau, de gaz et d’électricité).
Bernardo CabreraDirecteur Global Business Unit, Bouygues Telecom
Le directeur perçoit un relais de croissance dans le domaine de l’industrie 4.0 et son sous-item, la supply chain. « On voit que l’obtention du statut de machine à distance et la capacité à anticiper ou de prévenir des pannes afin de réallouer des flux dans des chaînes de production prend une ampleur différente », estime Bernardo Cabrera qui prend l’exemple de Wavely, une startup française spécialisée dans la maintenance prédictive par le biais de l’analyse des signaux IoT (acoustique, vibrations, température et électromagnétisme).
« Nous observons avec la crise que cette tendance peut devenir importante non seulement au sein des grands groupes, mais aussi auprès des ETI, notamment dans le secteur agroalimentaire. Il est essentiel de proposer des solutions les plus plug and play et les plus simples possibles pour des acteurs qui n’ont pas des supply chains très étendues, mais qui pour autant ont besoin de pouvoir les gérer à distance. C’est pour cela que nous devons être très bon dans le domaine du data management », martèle le dirigeant.
Les industries sanitaires et du smart building sont les deux autres secteurs considérés comme prometteurs par Objenious. « Nous percevons des opportunités dans la téléconsultation, le suivi des patients à domicile et des assets médicaux, par exemple des médicaments, des poches de sang ou du matériel médical », indique Bernardo Cabrera. « Nous positionnons également sur le marché du smart building. Le travail à distance et la pandémie apportent des défis supplémentaires : cela confère un regain d’intérêt, tout comme la sécurisation des bâtiments », ajoute-t-il.
La COVID ne ralentit pas les projets menés par Objenious
Le directeur considère que les technologies IoT sont matures, que les acteurs et finalement tout l’écosystème disposent d’une bonne dynamique. Un autre défi, selon lui, est d’aller au-delà des déploiements spécifiques afin de faciliter les transformations économiques d’envergure. Pour le moment, Bernardo Cabrera estime qu’à ce titre le secteur de l’automobile est « un cas d’école », puisqu’il doit s’adopter à de nouvelles normes environnementales tout en préparant des réponses aux « challengers », comme Tesla.
Différents verticaux prendront un tournant similaire dans les années à venir. Actuellement, l’on pourrait craindre les impacts de la crise sanitaire, avec une possible baisse du rythme de l’innovation.
« Il y a eu un ralentissement de certains déploiements lors du premier confinement notamment dans l’automobile et l’aéronautique, mais cela ne veut pas dire que l’accroissement des besoins est à l’arrêt, au contraire », affirme Bernardo Cabrera. « Aucun projet n’a été avorté à cause de la COVID et nous sommes dans une phase de croissance de l’activité », conclut le directeur.