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Stockage : les géants du cloud en achètent 4x plus que les entreprises
Selon la dernière étude publiée par IDC, Dell s’accapare un tiers des ventes des baies de disques aux entreprises. Mais ce segment ne représente en réalité que la moitié du marché.
Dell Technologies, HPE, NetApp, Huawei, Hitachi Vantara et IBM, tel est le peloton de tête des vendeurs de matériels de stockage selon le dernier rapport Enterprise Storage Systems Tracker du bureau d’études IDC. Celui-ci comptabilise les ventes de baies de disques qui ont eu lieu durant le troisième trimestre de cette année.
Ce rapport fait désormais la différence entre deux catégories de produits : les baies de stockage vendues aux entreprises et celles vendues aux hyperscalers, c’est-à-dire aux géants du cloud public pour peupler leurs immenses datacenters.
Dell à la tête d’un tiers du marché entreprises
La première catégorie, celle des matériels pour entreprises, est dominée par les fabricants historiques. Elle se résume ainsi : un gros tiers des ventes est réalisé par une myriade de petits acteurs, un tiers est entre les mains des cinq grands acteurs historiques HPE, NetApp, Huawei, Hitachi, IBM et le tiers restant est incarné par Dell Technologies tout seul. Crise pandémique oblige, ce segment de marché a reculé d’un petit 1,4 % en un an pour atteindre un CA trimestriel global de 6,77 milliards de dollars.
Dans le détail, Dell Technologies a réalisé sur ses équipements de stockage un CA trimestriel de 1 949 milliards de dollars, soit 28,8 % des ventes globales. Cela revient à une baisse de l’activité de 6,1 % par rapport à l’année dernière. Notons que le rapport d’IDC regroupe sous la marque Dell Technologies les ventes des baies de stockage et des infrastructures hyperconvergées de marque Dell EMC, plus les serveurs de marque Dell, tout court, qui servent au stockage.
En seconde position, HPE a réalisé sur ses matériels de stockage un CA trimestriel de 733,4 millions de dollars, soit 10,8 % des ventes globales, ce qui représente une amélioration de l’activité de 7,8 %. HPE est ainsi le seul fournisseur occidental à connaître une croissance de ses ventes dans un contexte de crise pandémique. Mais il faut lire entre les lignes : l’activité comptabilisée ici par IDC cumule celle de l’Américain HPE et celle du Chinois New H3C Group, qui revend sous sa propre marque les équipements de stockage HPE en Asie.
Or, les acteurs chinois semblent justement surperformer. IDC place en troisième position, ex aequo avec NetApp, le Chinois Huawei. Avec un CA trimestriel 633,3 millions de dollars, il réalise 9,4 % des ventes globales, soit une progression spectaculaire de 23,7 % par rapport au même trimestre l’année dernière.
Les ventes trimestrielles de NetApp, évaluées elles aussi à une portion de 9,4 % du marché, sont toutefois encore légèrement supérieures à celles de Huawei, puisqu’elles s’élèvent à 638,5 millions de dollars. Mais IDC insiste surtout sur la dynamique : alors que Huawei, plus récent, est en pleine conquête des parts de marché, l’historique NetApp a vu son activité se réduire de 2 % en un an. On notera qu’IDC n’a pas jugé utile d’englober ici les chiffres du Chinois Lenovo, qui vend sous sa marque des clones des baies de stockage NetApp. Sans doute parce que l’offre de Lenovo n’est pas réservée au seul marché asiatique et qu’elle n’est donc pas jugée complémentaire.
En cinquième position, le japonais Hitachi Vantara réalise 376,2 M$ de CA trimestriel, ce qui représente 5,6 % des ventes. L’activité est en baisse de 10,3 % par rapport à l’année dernière.
Enfin, IBM est sixième avec un CA trimestriel de 312,3 M$, soit 4,6 % des ventes globales, soit une chute de l’activité de 21,6 % en un an. Notons qu’IDC place IBM cinquième ex æquo avec Hitachi Vantara dans son palmarès, arguant qu’une différence de 1 % entre deux fournisseurs n’est pas suffisante pour faire la différence dans le classement.
Le reste du marché, où se mélangent des acteurs aussi petits qu’iXsystems et aussi réputés que Pure Storage, a réalisé 2,13 milliards de dollars de CA trimestriel, soit une activité globalement stable puisqu’elle n’a baissé que de 0,2 % en un an.
La dynamique du stockage du côté du cloud… sans les fournisseurs habituels
La seconde catégorie des équipements de stockage, celle destinée aux fournisseurs de cloud, est devenue pratiquement aussi importante que la première. Elle totalise au troisième trimestre des ventes estimées à 6,4 milliards de dollars, soit un chiffre d’affaires qui augmente de 8,7 % en un an. Mais inutile de chercher dans cette catégorie un acteur connu. Il s’agit uniquement de marques blanches, le plus souvent des composants vendus depuis l’Asie puis assemblés sous la forme d’une baie de stockage par les fournisseurs de cloud eux-mêmes.
Ce marché, en pleine croissance, échappe totalement aux fournisseurs historiques d’infrastructure. Et l’on comprend mieux pourquoi ceux-ci multiplient dernièrement des solutions de cloud hybride. Elles reviennent à commercialiser des baies de stockage de marque sous la forme de machines virtuelles, par-dessus les équipements sans marque des hébergeurs de services en ligne.
IDC s’est par ailleurs amusé à estimer le marché des baies des baies de disques en termes de capacité de stockage brute. Selon ses chiffres, les entreprises ont acheté au troisième trimestre 18 900 Po de capacité, soit 9,6 % de plus qu’un an auparavant. Les fournisseurs de cloud ont acheté, eux, 74 500 Po de capacité, soit 41,4 % de plus qu’il y a un an.
LeMagIT en tire deux conclusions. D’abord, en achetant de très gros volumes de disques et en les assemblant eux-mêmes, les hébergeurs de cloud paient environ quatre fois moins cher leurs baies de stockage que les entreprises. Les marges des vendeurs doivent à ce point être serrées, qu’elles excluent de fait les fournisseurs historiques qui ont besoin de revenus à réinvestir dans l’accompagnement de leurs clients (conseil, maintenance…).
Pourtant, c’est indéniablement du côté du cloud que les ventes en volume se font à présent. Si la tendance se poursuit, si les prix cassés et les marques blanches finissent par générer un CA plus important que celui des fournisseurs historiques, il est probable que l’activité des grands acteurs du datacenter finisse par être qualifiée d’activité de niche par les bureaux d’étude.
Ensuite, si IDC n’indique pas de répartitions entre les types de stockage, on se doute que cette croissance de capacité, dans les entreprises comme dans le cloud, pour une facture globale moins chère qu’il y a un an, est plus ou moins liée à la chute des prix des SSD, dont les baies de stockage sont équipées. Ce phénomène a pris une telle ampleur qu’Intel, l’un des principaux fournisseurs, a récemment décidé d’abandonner la fabrication des SSD génériques à base de NAND pour ne plus se concentrer que sur celle des SSD à base de mémoire 3D XPoint, garants de marges commerciales bien meilleures.