Cloud souverain : prêt à décoller, GAIA-X attire tous les regards
L’initiative de métacloud européen prend de l’ampleur. Son premier sommet, le GAIA-X Summit, a été l’occasion de laisser entrevoir les futurs cas d’usage.
GAIA X organisait mi-novembre son premier sommet, le GAIA-X Summit. Une étape importante, alors que le projet de métacloud européen est une AISBL (Association internationale sans but lucratif) depuis octobre dernier. Les entreprises et fournisseurs intéressés ont pu se transformer en membres à part entière. Ils sont au nombre de 180, provenant de 18 pays, dont 12 Européens. GAIA X est en effet ouvert à n’importe quelle structure, pourvu qu’elle se plie aux règles et politiques édictées par l’association. Toutefois seules les entreprises ayant leur siège social en Europe peuvent participer aux prises de décision.
Du côté des grands fournisseurs américains, on ne rit plus. Sentant le vent venir, les hyperscalers (AWS, Google, Microsoft) et éditeurs (Oracle, Salesforce) se sont empressés d’adhérer. « Lorsque GAIA-X a été lancé, le ministre des finances allemand l’avait comparé à une mission spatiale vers la Lune. Aujourd’hui, la fusée est prête à décoller », compare Hubert Tardieu.
« Nous sommes particulièrement heureux de constater l’intérêt généré par GAIX X, autant chez les startups, chez les fournisseurs que chez les associations », s’enthousiasme Dr Boris Otto, directeur exécutif du Fraunhofer ISST (Institut für Software-und Systemtechnik).
Mais tous les acteurs de l’écosystème autour de GAIA X s’accordent sur un point : le succès de la plateforme passera par le nombre d’utilisateurs de celle-ci.
Le cruel manque d’informations médicales partagées
Le sommet GAIA X a en tout cas été l’occasion de faire la démonstration de plusieurs cas d’usage.
Dans le domaine de la santé, la crise sanitaire a cruellement rappelé combien « les systèmes de santé européens sont hétérogènes et constitués de multiples silos de données, le plus souvent non structurées », constate Jeroen Tas, Directeur stratégie et innovation chez Royal Philips. « C’est d’autant plus dommage que ce sont des informations de très grande qualité ».
Jeroen TasRoyal Philips
Ces systèmes d’information fragmentés rendent difficile la compréhension de l’évolution de la pandémie, et comment le virus interagit avec les personnes ayant des problèmes cardiaques ou diabétiques. « Nous avons besoin d’accéder à toutes ces données, mais aussi d’outils pour les anonymiser, de règles de consentement et de sémantique commune. L’architecture GAIA X est parfaitement adaptée », soutient Jeroen Tas.
Il s’agirait également de créer un dossier médical portable, qui pourrait servir à un autre secteur, celui de la mobilité et des transports, par exemple. Sur ce point, Jean-François Cases, IP director d’Amadeus, imagine déjà comment s’organiseront dans le futur les différentes étapes d’un voyage : « le voyageur pourrait disposer d’une identité numérique, qui ne serait accessible par exemple que pour un laps de temps donné, le temps de passer les contrôles, avec des informations de santé lors d’une pandémie ».
L’idée est aussi de greffer de nouveaux services tout au long du périple : réservation d’un taxi à l’arrivée de l’avion, même en cas de retard ; intégration aux informations trafic locales et accès aux transports en commun. La force de GAIA X sera de permettre à chacun de ces services un accès aux seules informations qui lui sont nécessaires pour fonctionner, et ce pour une période de temps éventuellement limitée, ou fonction de la localisation de l’utilisateur.
L’industrie 4.0 pourra également profiter de GAIA X. Domaine hautement concurrentiel s’il en est – où la collaboration entre équipementiers et constructeurs est délicate – le secteur automobile prévoit une nouvelle manière de gérer la qualité. « Aujourd’hui, la gestion de la qualité passe par une analyse de chaque pièce, pour détecter ce qui est en cause. Il est temps de passer à une gestion de la qualité basée sur les données », estime Michael Jochem, directeur chez Robert Bosch GmbH. « En intégrant les données issues des diagnostics OBD, des calculateurs embarqués, des défauts connus et des prédictions calculées par les bons algorithmes, il est possible de diminuer de 20 % les coûts de réparation ».
Un espace de confiance pour le secteur aéronautique européen
Pour le secteur aérospatial, le métacloud GAIA X est également important pour une question de souveraineté et de sécurité.
Michael SchoellhornAirbus
« Notre secteur est très exposé aux cyberattaques, dans un environnement où la concurrence a lieu au niveau des pays voire des continents, à savoir l’Europe, les États-Unis et la Chine », insiste Michael Schoellhorn, COO d’Airbus. Le secteur est, de facto, face à un dilemme permanent : opter pour des services fournis par les hyperscalers américains pour leur flexibilité et leur rapidité de mise en œuvre, mais au détriment de la conformité, de la confidentialité et des risques d’espionnage.
Avec GAIA X, le secteur bénéficierait d’un espace de données sécurisé, partagé uniquement par des acteurs bien identifiés.