Honeycode : AWS sonde le marché low-code/no-code
En juin dernier, AWS lançait la bêta d’Amazon Honeycode, un service low-code/no-code. Le géant du cloud veut s’adresser aux métiers, pour les aider à construire simplement de petites applications Web et mobile dédiées à la collaboration en interne.
Alors que Forrester Research prédit l’avènement de l’approche low-code/no-code pour les applications critiques, AWS a fait le choix de s’adresser directement aux métiers. Comme souvent, le géant du cloud a lancé en bêta Amazon Honeycode, un service de création d’applications adressé aux « utilisateurs non-développeurs ».
« Nous avons fait le constat avec nos clients que beaucoup de besoins de collaboration ne sont pas couverts par les équipes IT. Beaucoup de processus se basent sur des tableurs échangés par e-mail, mais c’est difficilement passable à l’échelle dès que le groupe devient un peu trop grand. […] Toutes les entreprises n’ont pas un département IT capable de développer des applications personnalisées à la demande », constate Sébastien Stormacq, Developer Advocate chez AWS.
Honeycode est une solution principalement orientée no-code qui s’appuie sur la structure de donnée d’un tableur, familier des métiers. Ces néophytes du code ou concepteurs d’applications remplissent les tables, les lignes et les colonnes des informations auxquelles ils pourront accéder depuis une interface graphique. « Il est possible d’ajouter quelques règles, des formules simples, pour automatiser et distribuer cette application de manière sécurisée aux membres de l’équipe sur Web ou mobile », indique Sébastien Stormacq.
Un environnement familier pour les utilisateurs de tableurs
Il suffit de charger un tableur CSV dans le service, mais AWS assure que cela fonctionne comme une base de données, puisqu’il est possible de lier des tables entre elles ou des requêtes avec des réponses attendues. Plus spécifiquement, il s’agit d’adjoindre aux tableurs des fonctions de data modeling. Il est par exemple possible d’ajouter une colonne de filtres, cela permet d’afficher certaines dates dans un agenda ou d’observer les tâches d’un individu.
Ensuite, l’App Builder aide à bâtir l’interface de l’application en glisser-déposer et d’établir, comme ce qui est à la base du BPM, des parcours utilisateurs basés sur des déclencheurs conditionnels (type IFTTT).
Sébastien StormacqDeveloper Advocate chez AWS
AWS propose également des templates afin de simplifier la construction des applications suivant les usages. Pour l’instant, Honeycode contient 17 modèles dédiés à la conception de sondage, à l’acceptation de budget, au suivi de tâches d’équipes, à la conception de to-do list, à l’affectation de jour de repos ou encore au suivi d’opération sur le terrain.
« L’idée c’est de permettre aux responsables, aux products managers, technical account manager, des gens un peu techniques, mais pas développeurs, de construire leurs applications eux-mêmes pour leur équipe », insiste le Developer Advocate. « Honeycode permet de créer des applications pour des tâches quotidiennes ».
Honeycode dispose également d’une console pour gérer les rôles des utilisateurs. L’administrateur d’une application peut décider que certaines données, ou que certains workflows, ne soient pas accessibles par certains collaborateurs.
De plus, AWS propose une application mobile Honeycode iOS et Android, qui permet de charger les solutions développées par les concepteurs. Il n’y a pas besoin de créer un compte AWS, l’administrateur doit en principe ajouter une adresse mail pour accueillir un nouveau membre.
Sur le papier, Honeycode ressemble beaucoup à ce que propose Appsheet, racheté par Google, Power Apps de Microsoft et dans une certaine mesure à l’App Studio de la plateforme Infinity de Pegasystems. On y retrouve les fonctionnalités de base de ces services concurrents.
Honeycode, un pot de miel peu rempli
Or, Microsoft cherche à renforcer les intégrations avec les autres services de sa plateforme, dont les applications disponibles dans la suite Office 365 et les produits d’automatisation Power Automate. AppSheet propose des chemins d’intégration automatisés avec des outils de génération de PDF, Google Map, ou encore des SMS, ainsi qu’une connexion directe avec Zapier pour automatiser et accéder à certaines applications, dont Trello, Box, ou encore Slack.
Google veut aller plus loin et faciliter la mise en relation des équipes de développeurs avec les concepteurs d’applications sur AppSheet avec son Business Application Platform. Sans parler d’autres produits du marché inscrits dans la même démarche.
AWS n’est pas encore à ce stade avec Honeycode. Selon Sébastien Stormacq, le service n’est pas à date capable de se connecter sans programmation à des applications tierces. Honeycode prend en charge deux API manipulables depuis un SDK AWS : GetScreenData et InvokeScreenAutomation. La première permet de manipuler les données à l’écran sans toucher aux workbooks. La seconde permet d’automatiser l’ajout, l’écrasement ou la suppression de lignes de données dans les workbooks.
Sébastien StormacqDeveloper Advocate chez AWS
« Qui dit API dit vrai développeur, mais il y a donc bien une porte d’entrée et de sortie programmatique à Honeycode qui permet de s’intégrer avec des systèmes existants que ce soit sur AWS ou non », remarque le developer advocate. Honeycode doit être simple d’accès, comme le prouve la documentation associée, très didactique.
Cependant, nous sommes encore loin de ce que proposent les acteurs cités plus haut. Pourtant AWS compte plus de 170 services et propose une marketplace particulièrement fournie. Certains dont AWS Chime, Chatbot ou encore Alexa for Business semblent des candidats idéaux à ces intégrations avec la plateforme low-code.
Sur la page de demande d’ajouts de fonctionnalités, les utilisateurs réclament davantage d’options de sécurité, d’intégration avec les capacités d’un smartphone, d’accéder à des tables RDS ou de disposer davantage d’API.
« Si c’est quelque chose que nos clients nous demandent régulièrement, nous ferons en sorte de leur proposer cela pour continuer à enrichir Honeycode », promet Sébastien Stormacq.
L’appellation « Bêta » accolée à ce service pourrait laisser penser qu’Honeycode n’est pas prêt pour une utilisation en production. Ce ne serait pas le cas selon le Developer Advocate. « Cela veut dire que nous nous réservons le droit de modifier le design de l’interface visuelle ou d’ajuster certaines fonctionnalités en fonction des retours des utilisateurs ». La même information est mentionnée dans le forum communautaire du service.
Des tarifs (heureusement) compétitifs
Comme souvent, si AWS ne propose pas d’emblée toute l’intelligence que les services concurrents peuvent apporter, le géant du cloud entend miser sur une tarification agressive.
Alors que Power Apps est facturé 8,40 euros par utilisateur par application par mois pour deux applications ou 33,70 euros par mois par utilisateur pour nombre illimité d’applications, Honeycode propose trois tiers. La version basique, gratuite permet d’avoir 2 500 lignes par workbook (qui peuvent contenir des tableurs, des flux d’automatisation, les données de l’interface visuelle) et un nombre illimité de ces ressources pour 20 utilisateurs. Honeycode Plus inclut, lui, 10 000 lignes par tableur maximum pour 19,99 dollars par mois.
Il est possible d’ajouter des utilisateurs pour 9,99 dollars par utilisateur par mois. Le modèle Pro coûte 29,99 dollars, la limite passe à 100 000 lignes pour le même nombre d’utilisateurs de base. Ce forfait est prévu pour des applications plus importantes, qui peuvent reprendre ou compléter les fonctions d’un CRM, par exemple. L’ajout d’un nouvel utilisateur coûte 19,99 dollars par mois.
Pour l’instant, le service est sans engagement : en cas d’annulation le service est facturé au prorata de son utilisation lors du mois en cours. Honeycode n’est disponible que depuis une région cloud située aux États-Unis.
De son côté, AppSheet est facturé 5 dollars par mois par utilisateur actif dans sa version Premium et 10 dollars par mois par utilisateur actif pour le modèle Pro. Pour accéder au forfait Business, il faut contacter la filiale de Google.