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IBM satellise un projet d’IA open source pour limiter les collisions spatiales
Le Space Tech Hub d’IBM a annoncé deux projets open source dédiés à l’exploration spatiale. L’un d’eux comprend une boîte à outils pour améliorer la prédiction des trajectoires des objets spatiaux en orbite terrestre basse.
La data science s’applique à de nombreux secteurs industriels. L’un d’entre eux est particulièrement concerné par ce sujet : l’exploitation spatiale. IBM souhaite s’illustrer en la matière en annonçant deux projets open source développés avec l’université d’Austin au Texas. S’il y a bien évidemment un intérêt commercial à mettre en lumière de tels projets, il n’en reste pas moins que les problèmes traités sont sérieux. Par ailleurs, IBM adopte une démarche de plus en plus portée vers l’open source.
L’orbite terrestre basse, jusqu’à 2 000 kilomètres d’altitude, accueille des « dizaines de milliers d’objets spatiaux anthropiques » (OSA). Ces objets sont des satellites, des sondes, la station spatiale internationale (ISS), mais aussi une quantité phénoménale de débris. Selon, la division Space Tech Hub d’IBM, la privatisation des lancements de fusée provoquent une augmentation « dramatique » du nombre de ces équipements humains dans l’espace. Starlink de SpaceX, OneWeb ou encore Sigfox ne sont que quelques-unes des entreprises qui veulent lancer des constellations de satellites. Problème, pour se maintenir à une altitude de 1 000 km, un satellite atteint une vitesse d’injection de 8 kilomètres par seconde. À cette allure, difficile d’éviter un objet si son orbite n’a pas été anticipée.
« L’état de l’art pour la prédiction de l’orbite s’appuie sur des modèles basés sur la physique. Pour fonctionner, ces modèles nécessitent des données extrêmement précises sur un OSA et son environnement. Le problème est que les données de localisation que nous obtenons sur les OSA, à partir de capteurs terrestres, sont peu fréquentes et bruyantes – et compliquées encore par le fait que nous ne comprenons pas totalement comment des phénomènes comme la météo spatiale et la densité atmosphérique les affectent », écrivent les chercheurs d’IBM.
Un modèle qui optimise… un autre modèle
Le projet open source Space Situational Awareness (SSA) vise à améliorer les prédictions orbitales en utilisant des méthodes de machine learning. « Il ne s’agit pas de créer des modèles algorithmiques qui prédisent les orbites, mais de disposer d’un algorithme qui apprend des erreurs des modèles physiques », précisent les responsables du projet. « Si nous devions essayer de construire un modèle ML qui prévoie toute la dynamique orbitale d’un OSA, nous aurions besoin de beaucoup de données pour apprendre la mécanique orbitale », justifient-ils.
L’équipe dirigée par Naeem Altaf, ingénieur et CTO de Space Tech Hub, s’appuie sur les données mises à disposition par le United States Strategic Command (USSTRATCOM) au format TLE (Two line Element). Ce format encode les éléments d’orbites (définis par l’astronome Johannes Kepler) à un moment T. Autre difficulté, le jeu de données consacré aux objets présents dans l’orbite terrestre basse n’est actualisé qu’une seule fois par jour. Il est interrogé via l’API Space Track et un ETL.
Avec ces données, les chercheurs du Space Tech Hub ont créé un modèle physique pour prédire les trajectoires des OSA en orbite basse. Celui-ci s’appuie sur le problème à deux corps (problème mathématique qui décrit le mouvement de deux corps soumis à leur seule attraction gravitationnelle mutuelle), couplé à la formule de Cowell pour calculer les perturbations provoquées par l’attraction terrestre.
Le modèle de machine learning, lui, doit repérer les erreurs du premier et est entraîné sur ses résultats. Les data scientists ont utilisé le framework XGBoost pour bâtir un modèle basé sur un arbre de régression de gradient boosting. Après avoir obtenu les résultats, les chercheurs veulent retravailler les différentes versions du modèle physique.
Un projet pour dynamiser la recherche
Les chercheurs ont utilisé un serveur IBM Cloud Bare Metal doté de 16 processeurs Intel Xeon, 120 Go de RAM et deux GPU Nvidia Tesla V100 (16 Go de VRAM chacun) pour exécuter ce modèle physique de prédiction d’orbite. Les données de l’USSTRATCOM ont été stockées sur le service IBM Cloud Object Storage.
Au sein du GitHub du projet, les deux types de modèles sont combinés dans un composant nommé Orbital Prediction. Le second composant, Conjunction Search permet de rechercher les prévisions d’orbite future, pour déterminer quand et où deux OSA peuvent se rapprocher l’un de l’autre en fonction des paramètres de recherche fournis par l’utilisateur.
Les contributeurs peuvent ainsi aider les ingénieurs d’IBM à améliorer les modèles. Le deuxième projet, nommé KubeSat, vise à faciliter la création et le déploiement d’essaims de satellites cubiques. Il permet aussi de simuler des communications multisatellites.