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Tableau 2020.2 continue de creuser dans la Data Prep
Tableau Software continue ses deux chantiers de démocratisation de l’analytique et de diversification, en amont et en aval, de la DataViz. Quitte à se retrouver en concurrence avec un de ses partenaires historiques comme Alteryx.
Avec sa dernière mise à jour en date (la 2020.02), Tableau sort une nouvelle fonctionnalité de préparation des données. L’éditeur ajoute également un outil (Metrics) – plutôt axé mobile – pour synthétiser et visualiser des indicateurs de performance clé (KPI) en un seul et même endroit.
Cette mise à jour intervient presque un an après que Tableau ait été racheté par Salesforce pour 15,7 milliards $, et six mois après l’approbation par les autorités réglementaires ayant autorisé les deux entreprises à collaborer concrètement.
Néanmoins, les analystes ne voient pas encore d’influence significative de Salesforce sur la version 2020.2 qui – selon eux – semble être une version plutôt mineure et ajoute des fonctionnalités que certains de ses concurrents proposent déjà.
« Il n’y a rien dont vous puissiez dire que c’est la patte de Salesforce », estime par exemple Donald Farmer, fondateur de TreeHive Strategy. « Ce sont des choses qu’ils auraient faites de toute façon ».
Relations en Drag & Drop
Historiquement, Tableau a été fondé pour rendre l’analytique accessible au-delà des Data Scientists et des Data Analysts et la mettre à portée des utilisateurs métiers. La simplification de la modélisation et de la préparation des données dans Tableau 2020.2 continue cette stratégie, explique Francois Ajenstat, Directeur des produits de l’éditeur (CPO), à TechTarget/LeMagIT.
Auparavant, la préparation de données dans Tableau nécessitait quelques compétences « avancées » – comme savoir créer des jointures et comprendre le fonctionnement de base des systèmes de gestion de bases de données. Avec la 2020.02, les utilisateurs peuvent désormais créer des modèles avec une interface de type « glisser-déposer » qui génère automatiquement des jointures entre sources, et qui permet au final d’effectuer des requêtes plus ciblées.
On notera au passage que Tableau fait une distinction claire entre les concepts de « jointure » et de « relation ».
La jointure lie de manière permanente (« fusionne » dit Tableau) deux tables pour en générer une troisième, fixe, et « requetable » a posteriori. À l’opposé, une « relation » joint deux tables à la volée. Les tables sont combinées pendant et en fonction de la requête, « de telle sorte que seules les données nécessaires sont mobilisées pour la vue souhaitée », explique l’éditeur qui vante des gains de performance et une gestion plus flexible des sources avec cette méthode.
« Le plus important pour nous c’est de continuer sur ce chemin de la démocratisation de l’analytique », insiste François Ajenstat. « C’est notre priorité. Nous essayons d’identifier les obstacles sur cette route et de rendre plus simple ce qui est encore complexe ».
Mais Tableau ne veut pas non plus se détourner des experts de la donnée. Le responsable produit ajoute immédiatement que les nouvelles capacités de modélisation – venant s’ajouter à des fonctionnalités comme Ask Data, Explain Data et Dynamic Parameters qui utilisent toutes l’IA pour simplifier le processus analytique – leur mâchent en quelque sorte le travail et sont donc également bénéfiques pour les analystes possédant des compétences plus avancées.
« [Ces fonctionnalités] vont aussi faciliter la tâche des spécialistes qui pourront passer plus de temps à vraiment analyser les données. Même s’ils savent comment faire des jointures et tout ce genre de choses, nous facilitons ces étapes pour qu’ils aient plus de flexibilité. Et pour les autres, pour les personnes qui peuvent être intimidées par cette étape, nous retirons ce qui peut les intimider ».
Metrics
Autre « grosse » nouveauté de Tableau 2020.02, Metrics est une application mobile (pouvant également être utilisée sur desktop) qui permet aux utilisateurs métiers de consulter leurs indicateurs de performance clés en un seul et même endroit.
Selon François Ajenstat, ces utilisateurs ont fait remonter à l’éditeur que pour réaliser leur travail au jour le jour, ils étaient obligés de jongler entre plusieurs tableaux de bord pour trouver les informations dont ils avaient besoin.
La demande était donc forte pour un outil permettant d’unifier les KPI et autres indicateurs sur un même écran ; un peu comme les applications « bourse » ou « météo » d’Apple qui donnent une vue simple des informations pertinentes (et seulement celles-ci).
Au-delà de la visualisation
Pour Donald Farmer de TreeHive Strategy, le point intéressant sera de suivre la manière dont Tableau continue d’aller au-delà de la seule visualisation et d’ajouter des fonctionnalités en amont, comme la préparation et la modélisation des données, et en aval, comme Explain Data et, donc, Metrics.
« Tableau a toujours été l’un des meilleurs moyens de communiquer ce que vous découvrez [dans les données], mais que faites-vous de l’information que vous avez extraite (les insights) ? Ils n’en sont pas encore tout à fait au point où ils permettent de construire des applications no-code/low-code après Tableau, mais ils pourraient bien aller vers cela aussi », prédit l’analyste.
Nouvelle(s) concurrence(s)
Si l’éditeur veut aller sur ces terres de l’après, il a en tout cas intérêt à aller vite pour ne pas se faire distancer par l’arrivée d’une « nouvelle vague » de la BI, incarnée par un acteur comme ThoughSpot – qui vient par exemple de sortir une fonctionnalité baptisée Monitor, non pas pour créer des applications, mais pour « encapsuler » l’analytique directement dans les applications métiers. ThoughSpot est un concurrent d’autant plus sérieux qu’il est désormais classé par Gartner dans les leaders de son MQ, aux côtés de Tableau et de ses rivaux de longue date, Power BI et Qlik.
À l’autre bout de l’analytique, la version 2020.02 confirme clairement que Tableau (après Data Prep et Tableau Data Catalog) lorgne sur le domaine de ses partenaires comme Collibra, Alation, Informatica et désormais Alteryx. Un juste retour des choses si l’on considère qu’Alteryx, un historique de la Data Preparation, vise de plus en plus l’analyse des données (Automated ML), et surtout leur visualisation sans quitter sa plateforme.
Avec Eric Avidon de Search Business Analytics