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Stockage : Red Hat publie une version enfin utilisable de Ceph
Le logiciel a toujours promis de transformer des serveurs peu chers en baies de stockage élastiques. Mais il aura fallu attendre Ceph Storage 4 pour qu’il sache le faire simplement.
Dire que la nouvelle version simplifie l’installation et améliore l’ergonomie n’est pas, en général, l’argument le plus vendeur pour un logiciel qui entre dans sa quatrième génération. C’est pourtant bien ainsi que Red Hat promeut la dernière évolution de son système de stockage Ceph.
Il faut dire que la complexité d’utilisation de Ceph est telle, qu’elle est presque devenue sa marque de fabrique : les administrateurs étaient jusque-là obligés de suivre des formations spéciales pour parvenir à configurer ce SDS.
« Pour autant, le logiciel a généré beaucoup d’intérêt depuis son lancement, car il propose de réaliser pour un prix modique des choses très puissantes. Il transforme des serveurs en réseau en une baie de stockage extensible à volonté, désormais jusqu’à des centaines de Po et à cheval entre plusieurs sites. Il présente aux machines de production tous les protocoles de stockage – bloc, fichier, objet. Ce dernier mode serait même deux fois plus rapide à présent », énumère Scott Sinclair, analyste chez Enterprise Strategy Group.
Ajoutons que le logiciel permet aussi aux administrateurs de déléguer des droits, par exemple pour que le responsable d’une succursale puisse accorder à ses salariés l’accès à des documents, sans devoir envoyer une demande au siège de l’entreprise.
« Mais le problème est que sa complexité d’usage était telle qu’elle avait calmé les ardeurs des plus courageux », constate l’analyste.
« Parmi toutes ses possibilités, l’élasticité de son mode objet répond particulièrement aux attentes des entreprises. Mais encore fallait-il que les entreprises sachent comment le rendre élastique », ajoute Amita Potnis, une analyste spécialiste du stockage chez IDC.
Enfin une console pour monitorer le stockage
Le package Ceph Storage 4 que Red Hat lance cette semaine repose sur la version Open source « Nautilus » de Ceph. Il l’enrichit avec la possibilité d’être déployé en moins de dix minutes, grâce au logiciel d’automatisation Ansible, et ses règles – des « playbooks » – dédiées. En pratique, l’installation passe désormais par un « wizard » qui demande à l’administrateur ce qu’il veut faire et qui vérifie pour lui le matériel.
« Avant, nous affirmions à nos clients que Ceph pouvait transformer n’importe quel serveur en ressources de stockage. Et c’était vrai. Sauf qu’il faut tout de même avoir une certaine quantité de RAM, une certaine quantité de SSD pour stocker les logs, des disques déjà en route pour qu’ils soient pris en compte… Bref, pour parer à toute désillusion, nous faisons à présent nous-mêmes ces tests », explique Pete Brey, le directeur produits de la branche Red Hat Storage.
Ceph en version Red Hat se pare surtout d’une nouvelle console d’administration, basée sur le logiciel Open source OpenAltic. « Il faut bien reconnaître que l’interface de contrôle était jusque là minimale. Désormais, l’administrateur a à sa disposition une vue globale du cluster par exemple. Elle lui permet d’identifier et de résoudre les problèmes rapidement, sans avoir besoin d’un doctorat en systèmes distribués », ironise le directeur produits.
« Cela n’a plus rien à voir », se félicite Scott Sinclair. « Désormais, les administrateurs ont enfin un tableau de bord où ils peuvent gérer la qualité de service, identifier les goulets d’étranglement, surveiller l’état de santé des disques et, surtout, automatiser des procédures pour parer à des incidents ou redistribuer des ressources. »
Faire de Ceph un composant embarqué dans des moteurs plus ambitieux
Accessoirement, Red Hat a certifié des configurations types autour de Ceph, notamment pour l’utiliser comme un volume de backups capacitif et peu cher avec les logiciels de sauvegarde de Commvault, de Veeam et d’IBM (Spectrum Protect). Ceph s’interface aussi avec le moteur de recherche Spectrum Discover d’IBM. Ce dernier permet de dresser l’inventaire des documents que stocke une entreprise : qui les utilise, à quelle fréquence, que contiennent-ils, y a-t-il des données personnelles, etc.
« Il y a un véritable intérêt à proposer ensemble le stockage très capacitif de Ceph et le moteur analytique Spectrum Discover. IBM peut par exemple les vendre sous la forme d’un méga entrepôt pour documents de production avec classification automatique. À mon avis, cela fait longtemps qu’ils y pensent, mais ce n’était pas envisageable tant que Ceph s’accompagnait d’une taxe “formation technique” », commente Steven Hill, analyste chez 451 Research.
Scott SinclairAnalyste, Enterprise Strategy Group
Selon lui, les débouchés commerciaux de Ceph sont d’abord chez les prestataires – hébergeurs ou ESN – qui ont moins de scrupules à utiliser des logiciels Open source que le commun des entreprises. « Surtout, Ceph est une boîte à outils qui peut servir à construire une multitude d’offres de stockage, de la baie SAN pour machines virtuelles à l’entrepôt en mode objet, en passant par le NAS élastique. Cela a surtout du sens pour les prestataires dont le métier est de revendre de tels services », dit-il.
Scott Sinclair, lui, prédit plutôt un avenir chez les entreprises qui développent leurs propres logiciels et qui ont déjà déployé une infrastructure DevOps avec les autres outils de Red Hat. « Débarrassé de sa complexité, Ceph est une solution extrêmement programmable. Elle permet de déployer des ressources à la demande depuis le code des applications », conclut-il.