Stockage objet : Quantum entérine le rachat des baies ActiveScale
Le spécialiste du stockage de fichiers vidéo ajoute à son catalogue les P100 et X100, capables d’entreposer et de fiabiliser des Po de données pour moins de 20 centimes du Go.
Comme annoncé il y a un mois, Quantum vient de racheter à Western Digital sa gamme de baies de stockage objet ActiveScale. Le constructeur proposait déjà diverses baies de disques SAN pour la production, le SDS StorNext pour partager leurs contenus en mode NAS élastique et les lecteurs de bandes Scalar LTO, pour archiver les informations sur le long terme. Cette acquisition doit permettre de compléter son catalogue avec une gamme de produits intermédiaires, destinés à l’entrepôt des données froides.
« Jusqu’alors, nous proposions à nos clients d’interfacer nos produits avec un stockage objet tiers. Cependant, notre nouveau PDG, Jamie Lerner, a considéré qu’il s’agissait d’un problème », lance, à l’attention du MagIT, Stéphane Cardot, le directeur avant-vente de la région Quantum EMEA.
« Un problème pour nous, car nous n’étions pas maîtres de notre destin. Nous voulions développer des caractéristiques spécifiques entre nos produits et l’objet, mais il était compliqué, long et coûteux d’attendre le bon vouloir d’autres marques. Et un problème pour nos clients, qui n’apprécient jamais vraiment de devoir solliciter le support de deux marques en cas de problème. »
Selon Stéphane Cardot, il y aurait un véritable intérêt stratégique à disposer d’un tel produit au catalogue. Malgré la multiplication des offres de stockage objet en cloud, la demande des entreprises resterait en effet très forte pour des configurations sur site.
« Les offres en cloud paraissent très agressives en matière de prix. Cependant, l’économie ne se fait que pour les données dormantes. Les entreprises veulent du stockage objet pour entreposer à un coût faible des données qui sont indexées. C’est-à-dire susceptibles d’être consultées de temps en temps à titre documentaire, réglementaire ou analytique. Or, tous ces accès sont facturés en cloud », dit-il. Et d’évoquer, aussi, la crainte toujours prégnante de faire héberger de potentiels secrets industriels chez un tiers, le plus souvent tributaire du Cloud Act.
P100 : jusqu’à trois blocs de 720 To par baie, sur plusieurs sites
La gamme ActiveScale se compose de deux baies de disques : la P100 pour les capacités inférieures à 2 Po et la X100 pour celles plus importantes. Une P100 se compose de 3 nœuds « systèmes » qui reçoivent les requêtes S3 de l’extérieur, de 1 à 3 clusters de 6 nœuds qui constituent le stockage à proprement parler et de 2 nœuds d’index pour interconnecter l’ensemble. Chacun des trois clusters offre 720 To de capacité brute, soit 2,1 Po au maximum.
S’agissant de stockage objet, les données ne sont pas compressées pour économiser de la place, mais au contraire répliquées par fragments sur plusieurs disques, pour avoir la garantie de ne rien perdre en cas de panne. Cette technique d’erasure coding porte ici le nom de BitSpread. De fait, la capacité utile est inférieure à la capacité brute : Quantum estime qu’une P100 avec trois clusters peut stocker entre 1,44 et 1,52 Po.
Il est par ailleurs possible d’enchaîner jusqu’à 9 baies P100 via leurs nœuds réseau. Cette configuration maximale offre une capacité brute de 19,44 Po (environ 12,4 Po utiles) et toutes les données appartiennent au même volume namespace. Le point intéressant est que les P100 d’un même namespace n’ont pas besoin d’être toutes situées au même endroit : une technologie appelée Geo-Spread leur permet de se synchroniser à distance, entre plusieurs sites. Il devient dès lors extrêmement facile d’installer un site de secours.
X100 : jusqu’à 5,88 Po par baie rack
Si l’unité de base des P100 est le cluster de 6 nœuds de 720 To, celle des x100 est une baie rack complète de 840 To à 5,88 Po de capacité brute. Ici encore, il s’agit de pouvoir installer un maximum de 9 baies racks sur différents sites dans le monde pour partager entre eux un volume namespace commun qui peut atteindre 52,9 Po de capacité brute (environ 34 Po utiles).
Une baie rack X100 reprend les attributs de base d’une P100 – 3 nœuds systèmes, 6 nœuds de stockage, deux nœuds réseau – et y ajoute 6 volumineux tiroirs de disques. Chaque tiroir est composé de 7 « tringles » de 14 disques.
Les deux baies de stockage fonctionnent sous le système ActiveScaleOS 5.0. Celui-ci sait indexer plus de 600 millions de documents. Chacun d’eux peut atteindre 16 To et être découpé en 10 000 fragments dont la taille varie entre 5 Mo et 4 To. Le nombre et la taille des fragments dépend de règles qui soit préservent la capacité, soit favorisent la disponibilité des données sur chaque site. Ces règles prennent en compte des dates d’expiration et des numéros de version.
Enfin, ActiveScaleOS apporte plusieurs chiffrements : celui de l’accès via HTTPS, celui du transfert via TLS ou encore celui des documents eux-mêmes via AES 256. Quantum précise en revanche que les disques ne sont pas chiffrés.
Quantum annonce un tarif de 0,16 $/Go pour la P100 et de 0,22 $/Go pour la X100.
Enrichir l’offre vidéo et adresser de nouvelles applications
Le scénario d’usage prévu par Quantum est de laisser un NAS StorNext de production se délester au fil du temps des fichiers anciens vers d’autres tiers de stockage. L’administrateur définit des critères dans la console StorNext Manager pour indiquer quels répertoires devraient être transvasés vers des ActiveScale, des bandes, en cloud, ou ailleurs.
« Du point de vue de l’utilisateur, tous les fichiers restent accessibles depuis le partage SMB. Il y a juste un point de couleur sur leur icône, pour indiquer si un document est immédiatement disponible sur le NAS ou s’il faut le rapatrier avec un certain délai », détaille Stéphane Cardot.
Il est de notoriété publique qu’un nombre important de clients Quantum sont des entreprises qui manipulent des fichiers vidéo : studios de production, de postproduction, diffuseurs, chaînes de télévision, mais aussi toutes celles qui utilisent la vidéosurveillance ou l’imagerie médicale. « La vidéo se prête bien au stockage objet, car ce sont des documents que l’on indexe naturellement et qui, une fois traités, se compressent très mal », dit le directeur avant-vente.
« Pour retoucher en 8K à la vitesse des outils d’édition, nous proposons à nos clients de travailler sur des baies StorNext équipées de disques NVMe très rapides. Ensuite, lorsque les vidéos arrivent au terme du cycle d’édition, il est contre-productif de les conserver sur ces baies Flash, puisqu’elles n’ont ni besoin de leurs IOPS, ni ne profitent de leurs fonctions de réduction de taille. Il est donc plus économique de les entreposer sur des P100 ou X100. »
Cela dit, les baies ActiveScale vont surtout élargir les domaines d’activité de Quantum. Leurs clients actuels ne sont pas des spécialistes de la vidéo, mais du supercalcul ou des lacs de données, ceux domaines où Quantum n’a pas encore percé.
Des produits déjà connectés au catalogue Quantum
Parmi tous les stockages objet disponibles sur le marché, Quantum dit avoir préféré racheter ActiveScale pour des raisons historiques. En 2015, il revendait déjà cette technologie sur ses baies de disques, sous la forme d’appliances appelées Lattus. À l’époque, ActiveScale n’est qu’un logiciel, AmpliStore, édité par la startup belge Amplidata. Cette dernière passe rapidement sous la coupe de Western Digital, d’abord via sa filiale industrielle HGST.
Quatre ans plus tard, en septembre 2019, Western Digital annonce finalement abandonner le marché des solutions de stockage pour datacenters, afin de se recentrer sur la fabrication des disques. À l’image des baies SAN/NAS IntelliFlash qui partent chez DDN, On se doute alors que les machines de la gamme ActiveScale ne resteront pas longtemps au catalogue.
Quantum récupère d’autant plus volontiers les machines qu’il avait déjà développé à l’époque un logiciel, Arkivio pour faire travailler ensemble StorNext, les lecteurs de bande Scalar LTO et les appliances Lattus.
A priori, la prochaine étape pour Quantum serait de créer des connexions entre les baies P100/X100 et son appliance de sauvegarde DXi,. Le but est que les premières puissent stocker de manière économique les backups produits par la seconde. Pour l’heure, les appliances DXi ne savent archiver leurs sauvegardes que vers le cloud ou vers des lecteurs de bandes sur site. Entreposer les sauvegardes dans des baies ActiveScale revient pour l’heure à demander au logiciel de sauvegarde des serveurs, de restaurer les données afin qu’il les exporte lui-même vers un stockage S3. Cette procédure est lente, faillible et coûteuse en disques.
Selon les informations que LeMagIT a pu obtenir, cette intégration pourrait avoir lieu cet été.