Coronavirus : le coup d’accélérateur qu’attend le DaaS ?
Certaines organisations – dont une ville en Californie et une université en Australie – se sont tournées vers des postes de travail virtuels en mode cloud pour faire face à des situations susceptibles d’affecter leurs activités.
À mesure que le coronavirus se répand, le risque de perturbation majeure de l’activité des entreprises s’accroît. Les équipes informatiques d’une municipalité de Californie et d’une institution universitaire d’Australie ont décidé d’intégrer les postes de travail virtualisés en mode cloud (DaaS) à leurs plans de continuité de l’activité (PCA). Pour plusieurs experts, l’épidémie pourrait stimuler l’adoption de cette technologie.
L’épidémie de COVID-19 oblige les entreprises à se repencher sur leurs PCA. Certaines, comme Twitter ou Apple cette semaine, encouragent leurs collaborateurs à travailler à domicile s’ils le peuvent, tandis que d’autres ont restreint les déplacements. Une grande part de salons IT de par le monde ont d’ailleurs été annulés, virtualisés, ou reportés.
Selon les observateurs du secteur, les préoccupations liées au coronavirus peuvent pousser les entreprises à adopter le DaaS. Mais les infrastructures sous-jacentes, et notamment réseau, peuvent-elles prendre en charge des stratégies de travail à domicile à grande échelle ?
Les initiatives en place
Certaines organisations ont déjà pris des mesures. Jordan Catling, directeur associé de la technologie client à l’université de Sydney, explique que l’établissement a commencé à travailler avec Citrix sur le sujet en janvier. L’université avait besoin d’une option au cas où les cours ne pourraient pas être dispensés en personne, mais elle devait également assurer la sécurité physique et numérique de toutes les personnes concernées – et utilisait déjà les produits Citrix : « la sécurité de nos étudiants, de notre personnel et de la communauté est primordiale pour nous. Nous nous demandons comment les choses pourraient évoluer ».
Et justement, il ne manque pas d’y avoir là une importante part d’incertitude : « il se peut que nous devions rapidement augmenter la taille de l’environnement, mais, en même temps, les choses vont peut-être changer radicalement, et tout le monde sera de retour sur le campus ».
La région ne manque pas d’avoir été confrontée à des imprévus : « l’Australie, et en particulier la Nouvelle-Galles du Sud, a traversé de nombreuses épreuves au cours des six derniers mois, des feux de brousse jusqu’à de nombreuses inondations localisées. Nous avons eu une période difficile assez longue ». Et justement, le DaaS, « c’est le genre de solution qui nous permet de donner accès à notre institut universitaire, où que soient [les étudiants] ».
Chris McMasters, DSI de la ville de Corona, en Californie, explique que la municipalité a commencé à virtualiser ses activités il y a deux ans, là encore avec les outils de Citrix, et en particulier la plateforme Workspace, alors qu’elle avait longtemps misé sur des sauvegardes locales pour faire face à d’éventuels sinistres. Mais voilà, avec celles-ci, « à tout moment, nous pouvons avoir un tremblement de terre majeur, et là, nous sommes en panne ».
Las, beaucoup de services publics ont besoin de technologies et de réseaux qui fonctionnent : « avant d’entrer dans l’Administration, je tenais pour acquis que, lorsque l’on tourne le [robinet], de l’eau en sort, que lorsque l’on appelle les urgences, quelqu’un va répondre et venir. Mais tout ça dépend de la technologie ».
Comme les catastrophes naturelles, le coronavirus pose un problème potentiel pour le fonctionnement des services publics locaux. Et pour Chris McMasters, le fait de pouvoir « appuyer sur le bouton » et d’utiliser des postes de travail virtuels permet d’avoir l’esprit tranquille.
Réaction des entreprises
Selon plusieurs experts, les entreprises qui cherchent un moyen d’assurer la continuité de leurs activités, face à une crise comme une éventuelle pandémie, pourraient bien se laisser tenter par les postes de travail virtuels. Andrew Hewitt, analyste chez Forrester Research, estime ainsi que le coronavirus met les entreprises sous pression pour qu’elles offrent des options de travail à distance : « le VDI est certainement une option [parmi d’autres technologies d’accès à distance] qui peut aider dans un scénario de catastrophe, en particulier si la main-d’œuvre utilise encore des postes de travail traditionnels ou s’il s’agit d’un environnement informatique très homogène, comme un centre d’appel ».
Dion HinchcliffeConstellation Research
Pour Dion Hinchcliffe, vice-président et analyste principal chez Constellation Research, il ne fait « aucun doute » que le coronavirus pousse des organisations à chercher des alternatives aux rassemblements à grande échelle : « les responsables informatiques avec lesquels j’ai parlé cette semaine sont occupés à renforcer rapidement leurs politiques, leurs technologies et les capacités disponibles pour le travail à distance ». Et là, les postes de travail virtuels et « les bureaux à distance sont en première position lorsqu’il s’agit de permettre le travail à distance, et je m’attends à ce que les fournisseurs de cette catégorie soient très occupés en ce moment ».
Pour Mark Lockwood, vice-président et analyste chez Gartner, la situation peut jouer en faveur du DaaS, notamment, compte tenu de sa capacité à être disponible rapidement. Et en particulier avec des PDG qui vont simplement dire « envoyez tout le monde chez eux et faites en sorte que ça marche ».
Mais là, l’IT n’aura pas le temps d’augmenter les capacités internes ou de distribuer des ordinateurs portables de manière industrielle. Alors pour lui, même si le DaaS n’a pas encore réussi à séduire en masse, ce qu’il offre de flexibilité pourrait en faire le choix de référence pour du travail à domicile à grande échelle.
Pour autant, le DaaS n’efface pas nécessairement tous les problèmes. Et Mark Lockwood de relever qu’une généralisation temporaire du télétravail pourrait mettre à l’épreuve les infrastructures : « la pression sera exacerbée par le fait qu’il ne s’agit pas d’une catastrophe naturelle locale. Si c’était une inondation, les gens rentreraient chez eux et travailleraient, mais cela resterait géographiquement isolé. En cas de pandémie, tout le monde devra rentrer chez lui pour travailler ».
Mais à ce moment là, l’impact pourrait être important pour les opérateurs et fournisseurs d’accès à Internet. Leurs capacités sont normalement vendues en considérant que tout le monde n’est pas en ligne en même temps. Il est difficile de prévoir la qualité de service quand, au contraire, tout le monde sera connecté de chez lui.
Des effets dans la durée
Les entreprises peuvent adopter des postes de travail virtuels et d’autres solutions de travail à distance pour faire face à des perturbations importantes. Mais ces mesures peuvent offrir aux employés davantage de possibilités pour accomplir leur travail quotidien.
Chris McMasters explique ainsi que, au-delà ses attentes en matière de continuité de l’activité, la ville de Corona est désormais en mesure d’employer des travailleurs qui ne peuvent pas être à l’hôtel de ville de 8 heures à 17 heures : « pour nous [cette technologie] permet de disposer d’une main-d’œuvre que nous n’avions pas pu utiliser. Ce sont des personnes incroyablement intelligentes, mais qui nous étaient inaccessibles parce qu’elles étaient physiquement ailleurs ».
De son côté, Mark Lockwood estime que la mesure dans laquelle le coronavirus affectera l’approche du télétravail d’une entreprise dépendra probablement de la durée de la crise : « si cela dure quatre mois peut-être que oui », cela aura un impact profond. Mais « si elle dure une [ou] quatre semaines, peut-être pas ».
Dans un récent rapport sur la façon de se préparer à une pandémie, Andrew Hewitt et Stéphanie Balaouras n’excluent toutefois pas la possibilité d’un changement durable : « le développement de l’accès à distance et d’autres technologies de poste de travail virtuel a pour conséquence de permettre aux employés d’être productifs lors d’autres événements moins graves, mais peut-être plus fréquents, comme le froid et les tempêtes violentes ».