Kioxia lance des SSDs deux fois plus rapides… en PCIe 4.0
Les deux nouveaux disques CD6 et CM6 atteignent 1,4 million d’IOPS et 6,9 Go/s, mais sur des bus qu’Intel ne proposera dans les serveurs et les baies de stockage que d’ici à la fin de l’année.
Les SSD d’entreprise avec interface PCIe 4.0 (alias Gen4), susceptibles d’être deux fois plus rapides que ceux en PCIe 3.0, arrivent. En plus modèles que Samsung a commencé à livrer en fin d’année dernière, le marché voit débarquer ces jours-ci deux disques NVMe au format U.3 de marque Kioxia, ex-Toshiba Memory.
Ces nouveaux disques PCIe Gen4 adressent les serveurs et les baies de disques susceptibles d’exécuter les traitements les plus lourds : applications d’analytique, de machine Learning ou encore de cotation financière.
Leader du marché des disques SSD reliés en PCIe, Samsung a initié la génération PCIe Gen4 avec ses unités PM1733 et PM1735. Selon lui, ces disques pourraient grimper, en lecture, à 1,5 million d’IOPS sur les accès et 8 Go/s en débit. Le plus capacitif est le PM1733 avec 15,36 To d’espace de stockage, mais il se dit que certaines entreprises ont déjà pu obtenir des modèles en 30,72 To, au format U.2 2,5 pouces.
Pour des baies de stockage universelles et plus pérennes
Rappelons que U.2 et U.3 correspondent au type de connecteur. Dans tous les cas, il s’agit du format de connecteur classique des disques SATA/SAS, mais avec des broches en plus pour communiquer en PCIe. La différence est qu’il faut définir dans le firmware de la machine hôte le type de disque, SATA/SAS ou NVMe, branché sur un connecteur U.2, voire carrément changer sa carte contrôleur pour accepter un type ou l’autre. Un connecteur U.3 permet en revanche de passer de l’un à autre à chaud… pour peu que le SSD ait aussi un connecteur U.3.
Pourvu de ce nouveau connecteur U.3, les SSDs CM6 et CD6 de Kioxia implémentent surtout les toutes dernières spécifications NVMe 1.4 qui vont avec. Cette nouvelle version du protocole améliore les performances, la qualité de service, l’élasticité, la sécurité et la gestion des congestions. Matt Halberg, en charge du marketing chez Kioxia ajoute l’argument d’une meilleure granularité dans les namespaces – censée permettre aux utilisateurs d’exploiter le maximum de la capacité des disques – ainsi qu’un dispositif de journal interne qui permet de retracer l’historique du disque à des fins de dépannage, ou pour en tirer des bonnes pratiques d’usage.
Matt HalbergKioxia
Concernant le connecteur U.3 en lui-même, il est surtout censé inciter l’achat de nouvelles baies où tous les emplacements acceptent soit des disques durs SAS/SATA classiques, soit des SSD. « Ainsi, les utilisateurs sont libres de configurer trois tiers de stockage – disques SATA, SAS ou NVMe – exactement comme ils le souhaitent dans une seule baie. Et ils peuvent modifier cette configuration à volonté selon l’évolution de leurs besoins, simplement en remplaçant les disques à chaud », explique Matt Halberg, en avançant l’argument d’une plus grande pérennité sur de telles baies de disques.
Selon lui, les fabricants Broadcom et Microsemi seraient justement en train de livrer aux fabricants de baies de disques des cartes de contrôles qui supportent les trois types de disques sur des connecteurs U.3. S’il reconnaît que les fabricants en sont, certes, encore au stade de l’évaluation, il précise que les SSD de Kioxia sont de toute façon utilisables dès aujourd’hui avec des connecteurs U.2.
PCIe 4.0 : plus rapide, mais uniquement quand les serveurs seront disponibles
Le support du PCI Gen4 est de toute façon lui aussi très en avance de phase. Intel, typiquement, n’a toujours pas lancé de processeur compatible ; seules les machines basées sur les derniers processeurs Epyc d’AMD acceptent des unités PCIe Gen4.
« Certes, peu de processeurs sont disponibles avec une interface PCIe Gen4. Mais la situation devrait rapidement évoluer. Dell, Lenovo, Quanta CT et SuperMicro ont déjà des gammes de machines Epyc avec du PCIe Gen4 pour préparer le marché. Lorsqu’Intel lancera ses prochains processeurs, d’ici à la fin de l’année, le PCIe Gen4 se généralisera immédiatement », estime Jim Handy, un analyste spécialiste des semi-conducteurs chez Objective Analysis.
Selon le cabinet Trendfocus, en 2019, 51 % des SSDs vendus sur des serveurs et des baies de stockage étaient des NVMe, 27,5 % des SATA et 21,6 % des SAS. Le même rapport prédit que la répartition sera respectivement de 70,2 %, 10,7 % et 19,1 % d’ici à cinq ans. À titre d’information, la capacité totale de ces SSD représentera alors 178 exaoctets (178 000 Po), contre 51 exaoctets en 2019.
« La vaste majorité des demandes en disques NVMe vient pour l’heure des grands fournisseurs de cloud public, les hyperscalers. Ailleurs, y compris dans les banques et les grandes entreprises qui font de l’analytique, cela reste un luxe », commente Don Jeanette, directeur général de Trendfocus.
1,4 millions d’IOPS, 6,9 Go/s, 30 To et trois réécritures complètes par jour
Évidemment, les SSDs CM6 et CD6 de Kioxia sont compatibles avec l’actuel bus PCIe Gen3. Mais, dans ce cas, ils fonctionnent à sa vitesse. Selon un test effectué par Microsoft, un Kioxia CM6 connecté en PCIe 4.0 sur un serveur Epyc afficherait deux fois plus d’IOPS qu’un Toshiba CM5 qui ne sait communiquer qu’en PCIe 3.0. Les tests ont été menés sur une Azure Stack HCI, l’infrastructure hyperconvergée qui permet de mettre dans un datacenter un bout du cloud public Microsoft Azure. D’après ces chiffres, le CM6 atteint, en lecture, 1,4 million d’IOPS, un débit de 6,9 Go/s et une latence inférieure de 67 % par rapport au CM5.
Le CM6 est le modèle doté de deux ports, pouvant être relié à deux contrôleurs pour des questions de redondance, c’est-à-dire pour répondre à des besoins de haute disponibilité dans les applications critiques. Ses capacités vont de 800 Go à 30,72 To. Le CD6, moins cher, n’a en revanche qu’un seul port et se destine plutôt à la consultation de contenus. Sa capacité maximale est de 15,36 To. Dans les deux cas, les capacités ont été doublées par rapport aux modèles précédents de marque Toshiba.
Ces hautes capacités ne sont pas atteintes par l’usage très à la mode de mémoires NAND QLC (4 bits par cellule), mais par celui de NAND 3D TLC, plus endurantes et comportant ici 96 couches. L’usage de NAND TLC permet de réécrire en entier le SSD trois fois par jour pendant 5 ans, alors que les précédents modèles étaient donnés pour moins d’une réécriture complète par jour.
« La faible endurance du CD5 est la raison pour laquelle les fabricants de baies de disques et les utilisateurs préféraient opter pour des SSD en SATA, lesquels supportent trois réécritures par jour. Nous avons donc éliminé ce problème », indique Matt Halberg.
Le CM6 devrait être proposé avec des tarifs similaires à ceux des SSD SAS et le CD6 à ceux des SSD SATA.