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Machine learning : le Français Verteego se frotte aux grands du CRM
Verteego est un éditeur français d’une solution SaaS qui propose des modèles algorithmiques de prévision sur étagère pour les directions marketing. La startup se frotte à des géants sur le marché de l’automatisation du machine learning.
Les entreprises sont en quête d’adoption de la data science. Or cela coûte cher. Le manque de compétences sur le marché de l’emploi freine quelque peu les entreprises, selon différentes études.
Les éditeurs ont identifié cette tendance et commencent à proposer des solutions pour proposer des modèles algorithmiques sur étagère. Les Salesforce, SAP, Workday, Microsoft et d’autres l’intègrent au sein de leur plateforme.
D’une certaine manière, Verteego s’inscrit dans cette approche. La startup parisienne (30 collaborateurs dont la moitié dans l’équipe R&D), fondée en 2016, veut simplifier la réalisation de prévision de vente, de comportement de clients ou de flux, anticiper des approvisionnements de produits lors de campagnes marketing, par exemple.
Là où les éditeurs de renom proposent des modèles génériques, Verteego entend déployer des solutions par verticaux. À date, la société met à disposition de ses clients une trentaine de modèles de machine learning préconçus pour des cas d’usage liés au retail, à l’industrie (aéronautique, agroalimentaire, textile...), ou encore à la supply chain (transporteurs poids lourds, armateurs ou compagnies aériennes). La jeune pousse s’adresse en premier lieu aux ETI et aux grands groupes.
Le retail comme carte de visite
Verteego s’est fait connaître en axant sa communication sur les acteurs de la distribution. Parmi ses clients, la startup compte ou a compté Danone, Auchan ou encore Monoprix, d’après son site web. Elle propose par exemple des assistants virtuels en point de vente pour les métiers, des services de prévision des ventes et d’optimisation des stocks et un système de messagerie pour attirer les clients en heures creuses.
« Nos clients veulent être capables de générer des prédictions de vente de produits permanents ou en promotion. Une fois que l’on obtient ces informations, ils peuvent ajuster les stocks, éviter le sur stock, réduire les ruptures et optimiser les campagnes promotionnelles », estime Clément Guillon co-directeur général de Verteego.
« La plateforme doit choisir pour nos clients le modèle qui s’adapte le mieux à leur utilisation sans qu’ils écrivent une ligne de code », vante-t-il.
La startup a commercialisé mi-2019 sa solution SaaS Verteego Brain. Concrètement, Verteego vend un container à déployer au sein de l’infrastructure cloud des clients ou des API qui font appel aux données nécessaires pour les prédictions. Dans ce deuxième cas, la startup prend à sa charge le traitement en se servant des services de calcul proposés par Google Cloud Platform.
« Nous avons un partenariat technologique avec Google Cloud. Une partie des briques technologiques qui composent notre plateforme fait appel au service de GCP […] C’est un choix d’infrastructure en interne », assure Clément Guillon.
Une volonté d’indépendance envers son partenaire Google
Verteego exploiterait la plupart des types de modèles, « de régression jusqu’aux techniques de deep learning ». Selon Clément Guillon, la startup utilise des technologies comme TensorFlow, Python et scikit-learn. « Suivant les besoins cela nous arrive d’utiliser des modèles disponibles en open source que nous adaptons au cas d’usage de nos clients », affirme-t-il.
La startup veut être capable d’adapter automatiquement des modèles génériques et définir les paramètres pour répondre au cas d’utilisation de ses clients. Pour cela, Google Cloud propose AutoML. Verteego ne l’utilise pas. Elle a pris le parti de développer sa brique propriétaire d’automatisation du traitement algorithmique.
La jeune pousse atteste avoir commencé le développement de cette fonction il y a trois ans et s’est entourée d’une dizaine de clients dans le but de couvrir les cas d’usage proposés aujourd’hui dans Verteego Brain. « Nous proposons également un mode avancé où le client peut choisir lui-même et paramétrer le modèle à sa guise », avance le dirigeant.
Sans une préparation des données efficace, cette automatisation n’a que peu de sens. « Nous avons intégré une brique de nettoyage et de structuration de la donnée. Nous avons des formats d’entrée à paramétrer dans la plateforme », précise-t-il.
Selon notre interlocuteur, Verteego Brain inclut les phases de preprocessing, de préparation de données, et du ré-entraînement du modèle suivant les informations en entrée. « En production, les modèles tournent à la journée, à la semaine ou au mois », détaille Clément Guillon. Dans la plupart des cas, l’éditeur s’occupe du processing des modèles des clients depuis son infrastructure cloud GCP. Pour autant, elle ne veut pas dépendre du géant du cloud.
« Cela ne nous empêche pas d’avoir notre complète indépendance envers Google. Par ailleurs, nos clients peuvent choisir d’embarquer en interne les pipelines ML, mais cela reste rare. Cela dépend fortement des ressources et des équipes dont ils disposent ».
Démocratiser l’IA avec des modèles prêts à l’emploi
Clément GuillonDeputy CEO, Verteego
D’après le dirigeant, les déploiements de l’IA sont loin d’être généralisés en France et en Europe, les régions dans lesquelles opèrent Verteego. « Depuis trois ans, nous avons observé une très forte progression de la maturité des équipes opérationnelles et leur capacité à utiliser des outils d’IA au quotidien ».
« Nous voulons "logicialiser" l’approche data science », déclare Clément Guillon. « Dans un monde idéal, dans trois à cinq ans, nous voulons démocratiser le plus possible l’utilisation de l’IA en offrant des modèles prêts à l’emploi pour des entreprises qui n’ont pas les capacités de gérer des outils de data science à échelle industrielle ».
Même si Verteego est capable de réaliser des prédictions comportementales en faisant de l’analyse de sentiment, de compréhension à l’aide du NLP, « 80-90 % des cas correspondent au traitement de données quantifiées », tempère le dirigeant.
À ce jour, sur la vingtaine de clients revendiqués par Verteego, la moitié est en production. « Les autres sont soit en phase de test, soit terminent cette phase et envisagent de passer en production », annonce Clément Guillon.
Se spécialiser pour se différencier
La startup se rend au NRF, la grand-messe du retail à New York qui se déroule du 12 au 14 janvier 2020. L’objectif est bien évidemment de mettre un pied aux Etats-Unis pour poursuivre le développement commercial. « Le retail représente une part significative de notre chiffre d’affaires, environ 40 % », ajoute-t-il. « Ce marché est en avance par rapport à l’industrie, l’agroalimentaire ou à l’immobilier ».
« Notre ambition, c’est d’être des spécialistes des modèles préconçus et d’être capables de se greffer dans n'importe quel système via API. Nous voulons offrir une surcouche d’expertise pour les métiers. Cela étant dit nous entrons tout de même en concurrence avec des outils tels que ceux de Salesforce », concède le co-dirigeant de Verteego.
Clément GuillonDeputy CEO, Verteego
En effet, Salesforce via Einstein pousse fortement la prévision de ventes (entre autres) auprès de ses clients avec sa gamme de solutions Einstein. La société dirigée par Marc Benioff infuse l’IA dans ses produits, puis n’hésite pas à affirmer que ses 150 000 clients utilisent Einstein. Verteego entre davantage en compétition avec Alteryx ou DataRobot, qui eux aussi ciblent des industries particulières.
Finalement, voilà une autre startup française qui tente de se spécialiser, tout comme le spécialiste de l’assurance Zelros, afin de trouver sa place sur un marché largement revendiqué par des grands éditeurs.