Qlik réitère son implication dans QlikView
À l’heure de lancer un nouveau Qlik dans le cloud, l’éditeur assure ses clients qu’il n’abandonnera pas l’ancienne version de son outil de DataViz et qu’il continuera de le prendre en charge au côté de QlikSense.
Lors de son passage à Paris début octobre, James Fisher (SVP of Strategic Marketing de Qlik) s’est entretenu avec LeMagIT sur la manière dont l’éditeur de BI et de DataViz conçoit l’analytique de troisième génération et comment il entendait en tirer partie.
Accompagné de René Bergniard (Area Vice President Central Europe), il est également revenu sur la confusion qui a pu exister – et existe encore ? – entre QlikView et QlikSense, sur les raisons qui ont amené l’éditeur à lancer QlikSense il y a quatre ans et un nouveau Qlik dans cloud aujourd’hui… et à ne pas abandonner QlikView pour autant.
LeMagIT : Allez-vous continuer à supporter QlikView ?
James Fisher : C’est une question importante. QlikView est effectivement le produit qui a fait de Qlik ce qu’il est aujourd’hui – c’est le produit où nous avons conçu et sorti le « moteur associatif » avec une expérience que nos clients apprécient tant.
Nous avons récemment pris un certain nombre d’initiatives concernant QlikView. La première – sur laquelle nous avons été très clairs – c’est que nous tenons à QlikView ; nous sommes engagés auprès des clients QlikView.
Nous avons aussi fait une série d’investissements dans le produit. Plus précisément, en construisant la nouvelle génération de QlikSense, nous nous sommes assurés que QlikView puisse fonctionner dans le même environnement et qu’il a le même modèle de données sous-jacent. C’est la base sur laquelle nous nous appuyons pour assurer la compatibilité et la coexistence entre les deux plates-formes, QlikView et QlikSense.
Nous avons ensuite commencé à enrichir cette base au niveau du moteur [analytique] en introduisant le même type de fonctionnalités dans QlikView et dans QlikSense. Il y a donc une certaine parité au niveau des expériences.
Nous avons également mis en place une proposition commerciale qui permet de prendre très facilement QlikView et d’utiliser QlikSense en parallèle.
Nous ne demanderons jamais à nos clients d’abandonner quelque chose qui leur donne de la valeur, juste pour le plaisir de la nouveauté. Nous voulons qu’ils continuent à tirer parti de leurs investissements dans QlikView. L’une des choses que nous avons en bêta actuellement – et qui sera déployée vers la fin de l’année – c’est la possibilité de déployer des applications QlikView dans le même environnement cloud que celui que nous utilisons pour QlikSense, avec la possibilité d’accéder à ces applications avec la même expérience utilisateur, dans le même hub et sur le même portail web.
Nos gros clients QlikView peuvent donc continuer à utiliser ce qu’ils ont aujourd’hui et réduire leur coût de possession de QlikView – avec la certitude que ces applications vont perdurer – tout en résolvant de nouveaux problèmes avec QlikSense.
René Bergniard : Et nous proposons quelque chose de très original sur le marché. Si vous possédez une application QlikView, nous vous permettons d’utiliser une application QlikSense avec la même licence. Cela prouve que nous prenons soin de nos clients et que nous ne les poussons pas à abandonner QlikView.
Comme James l’a dit, si vous tirez beaucoup de valeur de QlikView, continuez avec cette application QlikView.
LeMagIT : D’accord, mais pour que les choses soient bien claires, vous ne vendez plus QlikView : tous les nouveaux clients vont sur QlikSense ?
René Bergniard : Absolument. L’explication vient du fait que QlikSense est une plate-forme plus large en termes d’usages, de visualisations, d’APIs, etc. Elle est beaucoup plus ouverte que QlikView, parce que QlikView a été créé dans les années 90. Et c’est pour cette même raison que nous ne proposons, évidemment, que QlikSense à nos nouveaux clients.
René BergniardQlik
LeMagIT : Pourquoi avez-vous choisi de refaire un produit totalement nouveau (QlikSense), en repartant d’une page blanche, plutôt que d’améliorer QlikView, de l’upgrader pour en faire quelque chose de différent, mais en en reprenant les bases ? Je vous demande cela parce qu’il me semble que cette décision a créé beaucoup de confusion, et encore aujourd’hui, autour de ces deux produits très différents.
René Bergniard : La première des raisons, là encore, c’est que QlikView a été créé dans les années 90 avec les technologies qui étaient disponibles à cette époque. QlikSense a été créé il y a cinq ans, avec des technologies d’aujourd’hui.
LeMagIT : D’accord, mais pourquoi refaire tout de fond en comble ?
James Fisher : La technologie sous-jacente avec laquelle nous devions travailler était trop différente [pour un upgrade]. Les usages du marché évoluent. Lorsque QlikView est sorti, c’était – et dans une certaine mesure, c’est sans doute encore – le meilleur produit pour l’analytique « encadré » (NDR : « guided analytics »), très structuré, géré par une équipe centralisée et ensuite déployé auprès des utilisateurs.
Mais beaucoup de choses ont changé. L’avènement [de la BI en] libre-service exige un paradigme différent. Le besoin d’encapsuler l’analytique aussi (NDR : « embedded analytique »). Les compétences en matière de développement ont également changé de façon spectaculaire. Et bien sûr, l’expérience utilisateur – la façon dont vos yeux balayent l’écran des appareils mobiles – tout cela a changé.
Reprendre QlikView – avec la façon dont il a été conçu à l’origine – aurait été beaucoup plus difficile [pour faire QlikSense].
James FisherQlik
Mais c’est aussi à cause de cette décision que nous sommes très clairs. Nous n’éteindrons jamais QlikView. Nous permettrons à nos clients de continuer à l’utiliser parce que son expérience utilisateur reste très robuste. Mais – et c’est vrai – nous avons quand même décidé de faire un produit entièrement nouveau, du sol au plafond, en nous appuyant sur de nouvelles technologies, en tirant parti de la conteneurisation, des microservices, etc. parce qu’en plus d’adapter le produit au cloud, ces technologies présentent une foule d’autres avantages pour le développement et le rythme de notre innovation.
LeMagIT : Qu’en est-il de la confusion qui semble persister chez certains entre les deux produits. N’avez-vous pas peur que vos concurrents en tirent parti ?
James Fisher : Nous savons que les clients se posent des questions. Nous comprenons que les clients veulent comprendre la stratégie. Mais je crois que nous avons fait d’énormes progrès au cours des 18 derniers mois, depuis que nous avons annoncé la nouvelle stratégie autour de QlikView, avec le Dual Use, avec les améliorations apportées à la feuille de route, avec son intégration dans notre environnement cloud – ce qui permet de réduire le coût pour ceux qui ont les deux environnements.
Ce message commence à être bien entendu et à faire écho chez nos clients.
LeMagIT : Et pourquoi une nouvelle version cloud de Qlik ? Pouvez-vous revenir sur les différences qu’il y a entre l’ancien « QlikSense Cloud Business » et le tout nouveau « QlikSense Business » ?
James Fisher : Qlik a commencé son aventure dans le cloud – que nous gérons nous-mêmes – en 2015, avec une version du produit qui s’appelait QlikSense Cloud Business. C’était une implémentation très particulière de notre produit.
Il a connu un grand succès avec plusieurs centaines de milliers d’utilisateurs dans 140 pays.
Mais les exigences concernant le cloud changent et évoluent aussi. Une organisation ne va plus faire de l’analytique sur une seule plate-forme (AWS, Google Cloud ou Azure). Par exemple, des régulations sont apparues qui imposent de localiser géographiquement certaines fonctions ou données particulières. Les notions de multi cloud ou de cloud hybride sont devenues très importantes.
Au fur et à mesure des développements, nous avons amélioré ces capacités de prise en charge du cloud dans notre produit phare, QlikSense Enterprise.
Ce que nous avons fait, c’est que nous avons repris ce que nous avions construit dans QlikSense Enterprise pour faire la base de QlikSense Business, qui est donc exactement la même plate-forme technologique que QlikSense Enterprise. C’est juste une version très légèrement différente du produit. Concrètement, cela signifie qu’un client peut commencer très rapidement [dans le cloud] avec QlikSense Business, créer de la valeur en résolvant un problème, et ensuite scaler de manière très fluide [avec QlikSense].
Alors qu’auparavant [QlikSense Cloud Business et QlikSense] étaient en quelque sorte deux approches distinctes.
LeMagIT : Allez-vous avoir suffisamment de ressources financières pour concurrencer des éditeurs, comme Microsoft ou Tableau – qui est maintenant épaulé par une énorme entreprise ?
James Fisher : D’abord j’aimerais dire que nous avons déjà vu cela auparavant. C’était en 2007. Cela se reproduit aujourd’hui d’une manière un peu différente, mais le principe reste le même. Donc j’aurais tendance à dire que l’Histoire joue en notre faveur. Elle a déjà prouvé notre capacité – en tant que plus gros éditeur indépendant [de la BI] – à innover en nous focalisant sur la résolution de problèmes analytiques. On a déjà vécu ce moment, et on a déjà su réagir.
Mais deuxièmement, je vous dirais aussi que l’innovation est une chose qui prend différentes formes.
Nous pouvons la faire nous-mêmes, de manière organique. Et c’est un fait : nous avons fait de gros investissements, il y a trois ans, pour changer complètement l’architecture de ce qu’était Qlik pour – comme je vous le disais – tirer parti de l’orchestration, des containers, de Docker, de Kubernetes et des architectures de microservices. Ces investissements font que le développement sur notre plate-forme est très simple et qu’elle est très extensible.
James FisherQlik
Le fait de pouvoir développer plus rapidement nous permet aussi d’acquérir et d’intégrer d’autres technologies [ce qui est un autre levier d’innovation]. Et c’est ce que nous avons fait sur les 12 derniers mois avec Podium Data, avec Attunity, et avec CrunchBot (qui nous ouvre les portes de l’analytique conversationnel).
Ces investissements signifient aussi que nous avons créé une plate-forme sur laquelle nos partenaires peuvent également innover. Cet écosystème est vraiment très important, parce qu’il nous apporte une pièce critique dans le puzzle analytique : l’expertise des différents domaines métiers. Nos partenaires peuvent apporter [plus simplement] leurs expériences dans des industries, des secteurs, des cas d’usages ou des verticaux pour résoudre avec notre technologie des problèmes analytiques très spécifiques.
LeMagIT : D’accord, mais que répondez-vous au Gartner lorsqu’il écrit qu’il vous sera difficile, en termes de ressources financières, de continuer à supporter de front et sur le long terme deux plates-formes distinctes ?
James Fisher : J’ai récemment passé plusieurs jours avec des analystes du Gartner. Et… je ne veux pas parler pour le Gartner… mais nous avons eu des retours extrêmement positifs sur la manière dont notre stratégie évolue depuis la publication de leur dernier rapport, il y a un an.
LeMagIT : Donc ce que vous dites à vos clients, particulièrement à ceux de QlikView, c’est « nous avons les ressources nécessaires pour continuer à investir » et « vous pouvez nous faire confiance » ?
James Fisher : Absolument.