Intégration de Red Hat : IBM jugé peu ambitieux
Outre servir dans les Cloud Paks, OpenShift de Red Hat sera installé sur les mainframes et sur le cloud public d’IBM. Les analystes ne comprennent pas pourquoi.
À peine trois semaines après avoir finalisé son rachat de Red Hat pour 34 milliards de dollars, IBM envoie des communiqués à la presse pour révéler comment plusieurs de ses solutions historiques vont se marier avec les logiciels de sa nouvelle filiale. Mais comparativement au prix qu’a coûté cette acquisition, les ambitions semblent assez modestes.
L’intégration la plus concrète concerne la livraison prochaine de cinq suites dites Cloud Paks, dédiées à l’administration des ressources en multicloud, au déploiement des applications, au déploiement de bases de données, à la mise en route des processus d’intégration et à la mise en route des systèmes d’automatisation.
Cinq Cloud Paks
Ces Cloud Paks seront motorisés par OpenShift, lequel apporte la couche Kubernetes garantissant une exécution indépendante de l’infrastructure sous-jacente, ainsi que des couches d’orchestration. À la différence de logiciels proposés en containers tout court, ceux déployés par des Cloud Paks auront ainsi l’avantage de produire en plus des journaux d’événements et des métriques utilisables à des fins d’administration.
« OpenShift a toujours au cœur des raisons pour lesquelles IBM a racheté Red Hat. Il permet aux utilisateurs d’exécuter les mêmes applications sur site, dans un cloud privé ou en cloud public », commente Holger Mueller, un analyste du cabinet Constellation Research. Selon Hillery Hunter, le directeur technique d’IBM Cloud, l’idée serait de se servir d’OpenShift pour convertir les applications dans un format universel, car les entreprises souhaiteraient les déployer sur n’importe quelle plateforme de leur choix.
Outre OpenShift, les Cloud Packs devraient utiliser une centaine de composants classiques d’IBM, comme DB2 (base de données), WebSphere (environnement de développement) et Cognos (plateforme d’analytique). IBM devrait commercialiser ces Cloud Paks avec des tarifs calculés mensuellement ou annuellement selon les ressources utilisées.
Des projets qui laissent les analystes dubitatifs
Les autres annonces d’IBM laissent les analystes dubitatifs. Le constructeur devrait ainsi fournir OpenShift sur ses mainframes Z, y compris ceux de la série LinuxOne, des machines qui manipulent 30 milliards de transactions par jour. L’analyste Frank Dzubeck, directeur du cabinet CNA, ne voit pas en quoi cela permettrait à IBM de redynamiser immédiatement les ventes de ses mainframes.
« L’inertie des projets mainframes est telle que les clients ne s’empareront pas d’OpenShift avant longtemps. À mon avis, il s’agit juste pour IBM de dire que ses mainframes sont sur un pied d’égalité avec ses autres plateformes », commente-t-il.
Notons qu’OpenShift était déjà disponible sur les serveurs Power du constructeur.
Une nouvelle version d’OpenShift administrable depuis le cloud public d’IBM pose tout autant question. En théorie, elle permettrait au fournisseur de proposer des fonctions d’administration de haut de niveau, similaires à celles que l’on trouve chez AWS, Microsoft Azure ou Google GCP. On ignore cependant encore quelle importance IBM compte donner à ce type de fonctions en ligne.
« IBM met OpenShift sur son cloud, mais n’indique pas quels avantages cela représentera par rapport à OpenShift installé sur un autre cloud. J’attends toujours de savoir ce qu’apporte le rapprochement entre les deux équipes techniques », se demande Gary Chen, analyste chez IDC.
Dans le même ordre d’idée, IBM laisse entendre que ce sont ses 80 000 consultants internes qui devraient le plus voir leur activité croître grâce aux technologies de Red Hat. Mais il ne dit pas exactement ce qu’il entend par là.
« Il est préoccupant qu’IBM n’ait toujours pas indiqué comment ses équipes allaient collaborer avec celles de Red Hat sur les projets des clients. Comment vont-ils se répartir les rôles ? Selon quelle méthodologie ? Les entreprises ont besoin que ces questions soient clarifiées », s’interroge Frank Dzubeck, qui ajoute ne toujours pas comprendre pourquoi IBM a racheté Red Hat aussi cher.