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La Chine bientôt majoritaire en puissance de calcul
Bien que les USA dominent encore le dernier Top500 en termes de performance globale, la Chine devrait surpasser toutes les autres nations d’ici à 2021, qui plus est sans utiliser de processeurs américains.
La Chine pourrait bientôt héberger la moitié des supercalculateurs. Il y a dix ans, le pays ne comptait que 21 systèmes dans le palmarès du Top500. Il en affiche aujourd’hui 219, selon la dernière liste semestrielle. A ce stade de développement, la Chine devrait atteindre la majorité absolue d’ici à 2021.
Si les processeurs américains d’Intel et AMD dominent encore les supercalcultateurs chinois, ils pourraient céder le pas à des puces ARM développées localement, depuis que NVidia a annoncé supporter l’utilisation de cette architecture conjointement à ses GPUs. Ces derniers constituent le nec plus ultra en matière de supercalcul ; cinq des dix plus puissantes machines les utilisent. Les GPUs traitent de manière intensive des équations mathématiques plus rapidement qu’un processeur et pour un coût inférieur.
« De fait, si vous souhaitez exécuter une grande quantité de processus en parallèle, les puces ARM constituent un meilleur support puisque chacun de leur thread consomme moins d’électricité que sur un processeur x86 », commente Nathan Brookwood, analyste chez Insight 64.
Pour la Chine, le modèle à suivre pourrait ainsi bien être japonais. Fujitsu construit en ce moment-même un supercalculateur à base de processeurs ARM pour succéder à sa machine K, laquelle fut, durant un moment, l’ordinateur le plus puissant du monde.
Un enjeu géopolitique
Mais le principal avantage de l’ARM en matière de supercalcul pourrait surtout être géopolitique. Car il suffit d’en acquérir une licence pour construire son propre processeur.
Selon Nathan Brookwood, les Chinois évaluent sérieusement le risque que les USA limitent leur importation de processeurs x86 à des fins de supercalcul. Ils travaillent donc à trouver des alternatives. Leurs options possibles sont l’architecture ARM, mais aussi la nouvelle architecture Open source RISC-V.
Rappelons que le supercalcul est critique pour la recherche scientifique et la défense nationale. Les scientifiques s’en servent pour mettre au point et tester de nouvelles technologies et des médicaments dans des environnements virtuels, mais aussi pour étudier des systèmes complexes, comme le climat ou l’intelligence artificielle.
« Même si les processeurs x86 domineront encore le Top500 sur le court terme, les projets de supercalcul indépendant en Asie et en Europe suggèrent un intérêt croissant pour l’architecture ARM », commente Paresh Kharya, directeur produit de NVidia.
Cet engouement est néanmoins tempéré par le plus important fournisseur de supercalculateurs du Top500 : Lenovo, qui a construit 173 machines de la dernière liste et qui est... Chinois.
« Tous nos supercalculateurs actuels sont basés sur des processeurs x86. Nous avions construit des serveurs à base de processeur ARM ThunderX, mais, au-delà des tests, la demande n’a pas été au rendez-vous », indique Scott Tease, le directeur de l’informatique hyperscale et haute performance chez Lenovo.
Une puissance américaine précaire
Si la Chine héberge déjà sur son territoire le plus grand nombre de supercalculateurs, les USA – qui en ont 116 dans la dernière liste – cumulent néanmoins la plus grande puissance de traitement. Selon les résultats mesurés par le test High Performance Linpack (HPL), le pays de Donald Trump s’accapare ainsi 38 % de la puissance de calcul mondiale. La Chine représente 30 %, l’Europe environ 15 % [le Top500 ne comptabilise pas les performances à l’échelle de l’UE, NDT] et le Japon 7,5 %.
Précisons cependant qu’un changement de leadership en matière de performances peut se réaliser très rapidement. En effet, les USA doivent essentiellement leur performance à deux supercalculateurs, les deux machines IBM en tête du Top500 et qui représentent à elles seules 15,6 % de la puissance de calcul mondiale.
« Les USA pourraient perdre leur première place dès la prochaine liste », dit Jack Dongarra, le directeur du laboratoire ICL qui a mis au point le test HPL.