Cheops Technology exhorte les clients Oracle à migrer vers PostgreSQL
Nicolas Leroy-Fleuriot fait parler la poudre. Très remonté contre les pratiques commerciales et de support d’Oracle, le PDG de Cheops Technology veut pousser ses clients à quitter Oracle et leur propose une solution de migration vers PostgreSQL. Les DSI suivront-ils ?
Politique de licencing sur les infrastructures virtualisées, contrats illisibles, audit de licences agressives avec sanctions à la clé, augmentation du prix du support ou encore fiabilité défaillante d’Oracle VM, la liste des griefs de Nicolas Leroy-Fleuriot à l’encontre de la firme de Larry Ellison est impressionnante et le PDG de Cheops Technology est littéralement sorti de ses gonds lors de la conférence de presse tenue par l’ESN bordelaise la semaine dernière.
« Nous déclarons la guerre à Oracle ! », a-t-il ainsi déclaré devant un aréopage de journalistes, argumentant sur l’insatisfaction des clients Oracle qu’il estime culminer : « les entreprises sont agressées par Oracle et le point de rupture a été atteint. Jusqu’à présent, il n’y avait pas véritablement d’alternative à Oracle ; PostgreSQL n’était pas suffisamment mature et stable pour remplacer Oracle, ce n’est plus le cas aujourd’hui. PostgreSQL est aujourd’hui une vraie base de données de classe entreprise à la fois performante, offrant une haute disponibilité, sûre. Nous disposons aujourd’hui d’une solution qui permet aux entreprises de quitter Oracle ».
Illustration de l’ire de Nicolas Leroy-Fleuriot à l’encontre d’Oracle, Cheops Technology a lancé en 2017 une offre Cloud qui s’appuie sur Oracle VM s’exécutant sur une infrastructure matérielle Oracle PCA (Private Cloud Appliance). L’ESN bordelaise, qui reste par ailleurs un partenaire “Gold” de l’éditeur américain, a dû faire face à une indisponibilité de 5 heures de l’un de ses clients lyonnais majeurs sur cette infrastructure suite à une intervention d’Oracle selon le PDG de Cheops Technology, un incident qui a poussé le PDG de Cheops Technology à entrer en guerre contre son partenaire. L’offre Cloud va rapidement migrer sur des serveurs x86 puis passera d’OVM vers KVM dès que les problèmes de licencing Oracle auront été levés afin de quitter le monde Oracle.
Une prestation de migration vers PostgreSQL signée Cheops / Dalibo
Sans doute sincère, cette charge anti-Oracle a aussi pour objectif de placer sur la rampe de lancement une nouvelle offre au catalogue de DMT, la Division Modernisation Technologique de Cheops Technology. Il s’agit d’une offre de migration des bases de données Oracle et applications PL/SQL vers PostgreSQL. « La majorité de nos clients sont encore sous Oracle et nous allons leur proposer une solution pour en sortir », résume Nicolas Leroy-Fleuriot. « Si le client est dépendant d’un éditeur de logiciels comme SAP, par exemple, et qu’il exploite SAP sur Oracle. Il passera logiquement vers S/4HANA un jour donc nous ne lui proposerons pas de migrer vers PostgreSQL. Si l’entreprise dispose d’un applicatif métier développé par un tiers, c’est l’éditeur qui va prendre la décision de migrer son offre ». Le PDG de Cheops Technology explique être en contact avec plusieurs éditeurs de solutions qui s’appuient actuellement sur Oracle. Il leur propose son outil de migration afin de porter leur offre sur PostgreSQL. Néanmoins, la cible prioritaire du Bordelais sont les entreprises qui développent elles-mêmes leurs applicatifs sur Oracle : « pour les entreprises qui ont développé leurs applications en interne, qui disposent de leur code source, celles-ci sont libres de changer de base de données. Nous pourrons les aider à migrer vers PostgreSQL ».
L’ESN a investi 12 années/homme afin de développer Transformer, son automate qui permet de migrer une base de données Oracle pour aller vers PostgreSQL. Il ne s’agit pas d’une simple migration de données d’une base à une autre, mais d’un outil qui va modifier l’ensemble du code SQL embarqué dans la base de données au niveau de ses procédures stockées, triggers et packages ainsi que le code qui peut être intégré aux applicatifs de l’entreprise.
Un outil de migration, mais pas seulement
Baptisé Transformer, cet outil est le fruit une quinzaine d’années d’expérience de Cheops Technology dans les outils de migration de code, avec notamment des automates de conversion RPG/Cobol. Pascal Bobon, directeur de la division DMT, livre quelques détails sur l’enjeu technique d’un tel outil : « nous voulons transformer le PL/SQL d’Oracle en nous appuyant sur notre capacité à traduire les langages et de le basculer dans le langage utilisé par le client, comme par exemple le Java. Notre proposition de valeur est de permettre à nos clients de retrouver leur liberté et de l’indépendance vis-à-vis de leur base de données. Dès lors qu’il n’y a plus de code dans la base de données elle-même, le rôle de celle-ci se limite à la fonction basique de stockage des données et peut facilement être remplacée ». L’expert souligne que Transformer s’appuie sur un moteur de règles qui exécute les règles de transformation spécifiques au langage mis en œuvre. L’équipe DMT a créé un jeu de règles de transformation initiales pour PL/SQL et intègre des règles plus spécifiques au contexte de chaque client. Ces règles avaient initialement été créées pour porter des écrans développés en Oracle Forms vers ADF, le framework Java d’Oracle.
Pour monter cette offre de migration, Cheops Technology s’est associé à un spécialiste PostgreSQL, le parisien Dalibo, qui, avec une trentaine d’experts PostgreSQL, va concevoir les architectures cibles et participer à ces projets de migration. Pascal Bobon estime que plus de 90% du portage est automatique, une intervention humaine étant nécessaire pour les 10% restants, plus spécifiques : « pour convaincre les DSI de s’engager dans de tels projets, il faut d’une part être capable d’apporter une équipe capable de le mener, disposer des outils efficaces et enfin il faut s’appuyer sur une méthode. Il s’agit de migrer des applications critiques et on ne peut pas y aller la fleur au fusil. Il faut être capable de prendre des engagements. C’est ce triptyque et une démonstration du ROI du projet qui permet à un DSI de lancer un tel projet. Si le projet est amené à coûter très cher parce que la part de travail résiduel qui doit être réalisée manuellement est trop élevée, alors l’économie du projet ne tient pas. L’équation financière de tels projets réside dans la capacité de l’outillage à réaliser l’essentiel des modifications ». Le responsable de division estime que le ROI de ce type de projet est atteint en 2 ans environ.
De nombreux prétendants aux migrations Oracle
Le directeur de la division DMT souligne que parmi les différenciants de l’offre Cheops Technology, sa solution effectue une migration en code natif. Il n’est pas nécessaire d’installer une librairie, un runtime ou un émulateur Transformer sur la plateforme cible afin de faire tourner le code produit par le logiciel. Pour Pascal Bobon, cette capacité à produire du code natif, lisible par les développeurs et donc maintenable, reste un différenciant sur un marché où Cheops Technology est loin d’être le seul acteur à vouloir offrir une voie de sortie aux clients Oracle.
Il existe de multiples outils de migrations de bases de données sur le marché. Le Français Metaware, racheté par Gfi Informatique en 2016, proposait des outils de migration de données. MariaDB embarque ses propres outils de migration Oracle et l’éditeur américain Ispirer propose une large gamme d’outils de migration de bases et de code source, notamment de PL/SQL vers Java ou HP Vertica. Attunity propose aussi des outils de migration pour les principales bases de données à destination d’Hadoop, Microsoft SQL Server, Oracle ainsi que les bases de données managées d’Amazon et Azure.
Et c’est justement du côté du Cloud que les solutions de migrations Oracle sont en train de décoller à grande échelle. Microsoft propose son outil SQL Server Migration Assistant (SSMA) for Oracle afin d’inviter les clients Oracle à transférer leurs données vers Azure SQL Database tandis que, comme à son habitude, AWS fait de la surenchère et offre un vaste choix de solutions de migration. Adrian Cockcroft, Vice-President de l’architecture Cloud d’Amazon Web Services, révélait lors de la dernière édition de l’AWS Summit qu’Amazon aligne pas moins de 11 méthodes pour importer des bases de données dans ses datacenters. « Nous supportons deux fois plus de bases de données que nos concurrents. Cela permet aux entreprises de choisir le meilleur moyen de stocker leurs données. Nous avons quitté le monde où toutes les données devaient être stockées sur une seule base de données qui essayait de tout faire. Nous offrons aussi des services de migration afin de migrer des grappes de bases de données d’un coup ».
C’est essentiellement sur le portage du code PL/SQL intégré dans les packages, procédures stockées et triggers et les applications que Cheops Technology va pouvoir faire la différence. A ce petit jeu, Oracle lui-même compte sur le Cloud pour conserver ses clients face à cette offensive. L’éditeur propose en effet à ses clients une migration transparente vers le Cloud - vers son Cloud. Une solution sans doute plus sûre et qui rassurera les DSI les plus timorés qui veulent rester fidèles à Oracle tout en modernisant leurs infrastructures.