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Chef met au rebus son modèle Open Core pour un modèle 100 % open source
Le spécialiste de la gestion de configuration prend à revers la tendance de l’Open Core et décide de tout miser sur un modèle open source traditionnel et la commercialisation d’une version validée et supportée d’une solution. A la Red Hat.
De l’open core à l’open source. Alors que certains éditeurs, comme MongoDB, Redis Labs ou encore Confluent décident de durcir leur positionnement d’éditeurs Open Core, Chef a, lui, décidé de faire machine arrière. Le spécialiste de l’automatisation de configuration d’infrastructure choisit d’abandonner son modèle établi d’open core pour embrasser celui de l’open source classique, comme peut par exemple le proposer Red Hat.
Chef s’est en effet construit sur un modèle qu'il qualifie de modèle open core « étendu », où il distribue en open source Chef pour la gestion de la configuration, InSpec pour la sécurité et la conformité, et Habitat pour l'automatisation des applications. Chef Automate est quant à lui propriétaire et relie les autres composants de Chef pour les clients payants.
Mais changement de modèle à partir de ce début avril 2019. Désormais l’intégralité des outils développés par Chef, y compris Chef Automate, seront disponibles à l’open source et développés sous une licence Apache 2.0. Les clients pourront acheter du support selon deux offres d'abonnement : « Effortless Infrastructure » comprend Chef Infra (ex Chef) et InSpec et Automate ; et « Enterprise Automation Stack », qui y ajoute Habitat. Chaque produit sera également disponible séparément sous forme d'abonnement.
« Cela élimine une ancienne source de friction et de frustration chez Chef. D'une part, nous avons une communauté qui se soucie du logiciel et de l'autre, nous développons le logiciel avec nos utilisateurs et clients. D'autre part, nous développons des logiciels propriétaires, que nous utilisons pour gagner de l'argent. Décider de ce qu'il y a dedans, de ce qu'il y a dehors, ou sur quoi se concentrer, était la partie la plus difficile chez Chef », explique Adam Jacob, le co-fondateur de Chef qui siège également au board de la société. Selon lui, en devenant complètement open source, la société ré-aligne les besoins des entreprises avec la communauté, et – et c’est un point important – transfère la valeur dans le logiciel même – et non pas dans des produits propriétaires.
Mais pour certains utilisateurs, il existe encore un flou dans les termes de ces nouvelles conditions de licence. Chef conserve en effet la marque, à savoir Chef, InSpec, Habitat et Automate. Les équipes réduites peuvent certes tester gratuitement les binaires de Chef, mais si elles utilisent le logiciel à des fins commerciales, Chef leur demande de payer le support ou d'héberger leur propre distribution renommée du code. Ces changements entreront en vigueur avec la sortie de Chef 15 le mois prochain, date à laquelle le support de la version 13 prendra fin. Les clients qui utilisent Chef 14 auront un an pour se décider quant à leurs contrats de support.
Les clients actuels de Chef ne verront aucun changement, soutient Corey Scobie, vice-président Produits et Ingénierie chez Chef. « Les utilisateurs qui utilisent Chef purement open source auront des décisions à prendre : y aller seul ou entamer une relation contractuelle », ajoute-t-il.
Des réactions pourtant mitigées
Chez certains clients de longue date, on pense que ce changement pourrait pousser Chef à donner la priorité au support entreprise. La version désormais open source de Chef Automate pourrait quant à elle susciter l’intérêt des développeurs.
« D'un point de vue commercial, il est très logique de recentrer l'entreprise sur les personnes qui la financent », commente Michael Hedgpeth, directeur de l’ingénierie chez NCR, fabricant de points de vente, de bornes en libre-service et de guichets automatiques, notamment.
Il se dit inquiet de la manière dont les nouvelles conditions de licence pourraient se dérouler dans un environnement IoT, là où sont justement ses besoins. Le groupe compte utiliser Chef pour gérer avec des millions de terminaux répartis sur des dizaines de milliers de sites clients.
« Cela risque de modifier l'équation économique et opérationnelle », pense-t-il. « En tant que client de Chef Automate en mode hébergé, je crois que c'est une chose positive, mais en tant qu'évangéliste qui tente d’étendre la portée de Chef à l’IoT, chez NCR, c'est frustrant. »
Michael Hedgpeth établit une comparaison entre les conditions de licence de Chef et le modèle commercial de Red Hat pour Red Hat Enterprise Linux (RHEL). « Je veux une alternative officielle gratuite - si Chef veut être Red Hat, faisons un CentOS », lance-t-il.
Chef n'est pas opposé à cette idée, déclare Brian Goldfarb, directeur du marketing de Chef. Cependant, pointe-t-il, Red Hat et CentOS n'ont pas commencé leur relation en tant que collaborateurs. Et selon lui, il faudra du temps pour qu'une version communautaire du code de chef arrive à maturité.
NCR a installé Chef Server il y a cinq ans, et grâce à la gestion de la configuration, le groupe affirme avoir éliminé 97 % des pannes liées au déploiement. NCR a récemment renouvelé sa licence du logiciel selon les conditions précédentes. Mais pour le responsable, il n'est pas certain que les coûts de licence se répercuteront lors du prochain renouvellement de contrat l'année prochaine.
Chef se dit prêt à négocier des rabais volume avec des clients à grande échelle tels que NCR dans le cadre des nouvelles conditions de licence, affirme alors le directeur marketing de Chef.