Les entreprises adoptent l’UEM, mais lentement
Plus les organisations sont grandes, plus le processus d'adoption de ces outils de gestion de terminaux peut être douloureux. Mais pour Chris Silva, du cabinet Gartner, il est impératif de franchir le pas.
Les outils de gestion des postes clients étaient parfaits pour gérer un grand nombre de PC. Mais ils montrent leurs limites face à l'afflux de smartphones, de tablettes et à l'essor de l’IoT.
Une solution consiste là à investir dans une solution de gestion unifiée des terminaux (UEM, « Unified endpoint management »), mais l'intégration des outils d’UEM dans l'entreprise est plus facile à dire qu'à faire, selon Chris Silva, analyste chez Gartner.
Alors que l’UEM permet la gestion d’appareils très divers dans une même console, la complexité du système et les politiques internes d’organisation du travail peuvent entraver la transition vers l’UEM, sans parler du temps et du coût nécessaires.
Sur le terrain, l’adoption de l’UEM progresse-t-elle ?
Chris Silva : Cela avance, mais lentement. Deux choses sont importantes à noter : la première est qu'environ 20 à 30 % des clients ont franchi le pas et ont terminé, ou presque terminé, la migration de leurs PC vers une solution d’UEM. Pour les 70 à 80 % restants, cela va prendre encore trois à cinq ans.
L’adoption est donc encore graduelle. Et plus l'organisation est grande, plus le processus est complexe. Les banques, par exemple, qui ont un tas d'applications internes dépendantes d'une version obsolète d'Internet Explorer, auront besoin d’un certain temps pour migrer, parce qu’il y a de nombreuses dépendances à résoudre.
Le passage à l’UEM est-il plus difficile pour les petites structures du fait des coûts et du temps ?
Cela peut être le cas, mais j'ai tendance à penser que [la migration vers l’UEM] ne dépend pas de la taille de l’entreprise. Dans certaines PME, la complexité est aussi importante que dans de grandes entreprises.
Les PME ont toutefois tendance à être plus prêtes à migrer parce qu'elles n'ont rien pour administrer leurs PC aujourd'hui. Elles partent donc d’une page blanche. L’utilisation d’applications SaaS aide également. Il est plus courant de voir une entreprise de taille moyenne évoluer de cette façon, mais il n’y a pas de corrélation directe entre la taille et l'état de préparation.
Outre les dépendances techniques, quels freins à l’adoption de l’UEM observez-vous ?
Le plus important est le changement politique et culturel. Pensez à des équipes qui ne connaissent que des outils d’administration comme System Configuration Manager (SCCM), un logiciel vieux de 25 ans. Pour passer à l’UEM, vous leur dites deux choses : d'une part, l'outil d’administration sur lequel leur carrière s’est construite va disparaître ; et d'autre part, les choses qui font partie intégrante de la gestion des postes de travail, comme le fait de pousser les images sur les PC et de configurer chaque PC exactement de la même façon, sont possibles mais plus difficiles à l’UEM. Il y a beaucoup de résistance à s’engager dans cette voie parce que les personnes s'inquiètent pour leur emploi.
A quoi s’exposent les entreprises qui ne passent pas à l’UEM ?
Il n'y a pas d'inconvénient majeur à avoir deux applications, outre le fait que vous payez pour deux outils et que vous êtes moins efficace parce que vous allez et venez entre deux systèmes.
Mais avec le temps, de plus en plus d’appareils fonctionneront sur des systèmes d'exploitation modernes, administrables avec l’UEM, et parfois uniquement.
Ce qui ne s’est pas encore passé, c’est que l’UEM permette de faire plus qu’un outil d’administration de postes de travail conventionnels. Nous ne savons pas vraiment si et comment cela surviendra, mais c’est probable. Il est difficile de dire quand, mais il va y avoir, à terme, plus d’inconvénients directs à ne pas passer à l’UEM.
L’arrivée graduelle de nouveaux appareils dans l’entreprise n’ajoute-t-elle pas à la complexité d’un passage à l’UEM ?
Cela ne devrait pas être le cas, et ne le sera probablement pas, s'ils utilisent un seul outil pour tous les administrer. Le risque est plutôt d’avoir un outil pour administrer les appareils connectés, les terminaux mobiles, et un autre pour les PC ; à un moment, cela devient complexe et coûteux de continuer à superposer des choses.