Créateur d’un Android dépouillé de Google, Gaël Duval juge l’amende infligée par Bruxelles justifiée
Le fondateur du projet /e/, connu précédemment sous le nom eelo, dénonce les liens noués entre le géant du numérique et les constructeurs de terminaux.
La Commission Européenne vient de condamner Google à l’amende record de 4,3 Md€, estimant qu’il avait abusé d’une position dominante pour imposer ses services et logiciels aux fabricants de terminaux Android. Pour Gaël Duval, qui pilote le projet /e/ (anciennement eelo), visant au développement et à la production de terminaux mobiles animés par un système d’exploitation basé sur Android, mais exempts des services et logiciels propres à Google, la décision de la Commission apparaît pleinement justifiée.
Dans un échange avec la rédaction, Gaël Duval estime ainsi évident « qu’aujourd’hui, Google est dans une situation de monopole sur le smartphone. Si l’on excepte l’acteur historique (Apple/iPhone/iOS) avec environ 12 % du marché, Android de Google équipe le reste (plus de 85 %) des smartphones de la planète ».
Mais voilà, pour lui, le géant du Web « contrôle tous les étages de la fusée : le système d’exploitation (Android), le navigateur web par défaut, imposé aux constructeurs de téléphone (Chrome de Google), le moteur de recherche par défaut (Google), et le store applicatif (Google Play) ».
Même si des alternatives sont disponibles et peuvent être installées par les utilisateurs, « la très grande majorité » d’entre eux « utilisent ce qu’on leur propose préinstallé par défaut, et se servent de Google pour tout : ils envoient toutes leurs données personnelles à Google (position géographique, habitudes de consommation, pouvoir d’achat…), font leurs recherches via Google Search qui, avec ce qui précède, peut leur vendre de la publicité « sur mesure » ultra-ciblée, et ils achètent des applications, de la musique, des films sur Google Play ». Dès lors, estime Gaël Duval, il ne reste « pas de place pour d’autres acteurs dans cet écosystème ».
Surtout, il dénonce un verrouillage contractuel imposé aux constructeurs de terminaux : « les constructeurs de téléphones avec qui je suis en contact pour /e/ m’ont confirmé qu’ils sont pieds et poings liés par contrat, qu’ils ne peuvent faire que du Android by Google, et Android 100 % Google ».
Pour Gäel Duval, l’amende déterminée par la Commission Européenne n’est pas seulement justifiée : « elle a aussi l’avantage de porter ce débat dans la sphère publique. On peut être confiant qu’à partir de maintenant nos intellectuels, politiques et commentateurs sur les médias mainstream vont s’emparer de ces questions absolument fondamentales pour notre souveraineté numérique européenne, notre économie et nos emplois ». Plus loin, il estime qu’il « faut se poser la question du démantèlement [des monopoles de fait] et plus généralement de davantage de régulation, en particulier sur tout ce qui touche à l’infrastructure numérique (systèmes d’exploitation, réseau, processeurs, frameworks de développement, etc.) ». Et cela afin de lutter contre diverses formes de captivité.
En définitive, pour Gaël Duval, « il semble de plus en plus évident que le marché a besoin d’une ou plusieurs alternatives à Google et à Apple ». De son côté, Google a annoncé son intention de faire appel de la décision de Bruxelles.
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