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IA : quels sont les effets sur les RH, l’emploi et la formation
Les Ressources humaines commencent à s'approprier l'intelligence artificielle et l'automatisation, mais beaucoup de questions sont encore sans réponse. Les DRH s'interrogent pour utiliser au mieux ces techniques là où elles sont le plus pertinentes et en maîtriser les risques.
Quel sera l'impact de l'Intelligence artificielle (IA) et de la robotisation sur l'emploi, la formation et les Ressources humaines (RH) ? Plusieurs personnalités du domaine ont récemment tenté de répondre à cette – vaste – question à l'occasion d'une table-ronde organisée par Monster. Cédric Gérard, directeur du marketing Europe du site de recrutement en ligne, a lancé le débat avec quelques chiffres. « A l'heure actuelle, 40 % des entreprises disent qu'elles utiliseront l'IA pour le recrutement. Par ailleurs, l'IA et l'automatisation détruiront des emplois mais elles en créeront aussi de nouveaux ». Selon Gartner, l'IA créerait 2,3 millions d'emplois et en détruirait 1,8 million d'ici à 2020 aux Etats-Unis. Pour Forrester, l'automatisation détruirait 17 % des emplois dans le monde entre 2017 et 2027.
Former et éduquer
L'automatisation se fait principalement sur des tâches simples ou répétitives. « D'une part, cela veut dire que plus une personne a de compétences, moins elle est a de risque d'être remplacée par un robot. D'autre part, même si cela semble paradoxal, la robotisation permet de garder des emplois en France, car il faut faire fonctionner les robots, vérifier les flux de données, leur qualité, les résultats, etc. Certes, il ne s'agit pas des mêmes emplois et de nombreux nouveaux métiers vont émerger au cours des 15 prochaines années », affirme Jean-David Benassouli, associé responsable data analytics du cabinet PwC.
Cette remarque montre qu'un des principaux enjeux de l'IA et de l'automatisation est la formation. « Il faut former aux nouveaux métiers mais aussi éduquer dans l'entreprise pour démystifier l'IA et lutter contre les discours sur la destruction d'emplois », insiste Cécile Dejoux, professeur au CNAM, qui prévient que sans cela, « on risque d'entrer dans un nouvel “hiver” de l'IA comme il y en a déjà eu, car cela va trop vite et fait peur aux gens qui de fait rejettent le sujet et renoncent ».
L'IA n'est pas malveillante
« L'IA est à la mode, on oublie qu'il ne s'agit que de faire mimer par la machine ce que font les humains. Le machine learning n'est ni bienveillant ni malveillant, il apprend à partir des données », précise Christophe Tricot, expert IA de la société Kynapse. D'où l'importance à accorder aux données sur lesquelles l'IA s'entraînera, aux algorithmes ainsi qu'à leur transparence. Il faut éviter les biais dans l'apprentissage, surtout en ce qui concerne le recrutement. « C'est le grand danger de l'IA dans les ressources humaines. On risque de perdre en diversité et de créer une société inégalitaire. Il faut non seulement la transparence sur les données, mais aussi un organisme de contrôle, et seule la loi peut imposer cela », constate Cécile Dejoux.
Un outil au service du recrutement
L'IA est déjà utilisée à différentes étapes du recrutement, notamment pour extraire, trier et qualifier les CV intéressants des job boards, bases de données et autres sites de candidatures. « Actuellement, le recrutement fonctionne mal, 46 % des personnes ne sont plus à leur poste après 18 mois et dans 89 % des cas, c'est pour des raisons comportementales », souligne David Bernard, CEO d'AssessFirst, qui propose une solution de recrutement prédictif basée sur l'analyse de potentiel. « Le recrutement prédictif permet d'objectiver le profil, les compétences d'une personne. Le cerveau est moins performant que la machine pour analyser 200 critères pour une quarantaine de candidats. Il vaut mieux concentrer l'humain sur la relation avec les candidats ».
En fait, l'IA trouve sa place dans les ressources humaines partout où elle peut analyser des données et y détecter des patterns, des modèles, autrement dit dans la présélection et la sélection des candidatures, dans l'attrition et la prévention des départs en détectant des signaux de démotivation, etc. Mais pour être acceptée par tous dans l'entreprise, elle devra être explicitée et encadrée, c'est-à-dire maintenue à sa place d'outil au service des RH et ne pas être vue comme une boîte noire omnipotente capable de décisions arbitraires.