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Micron veut remplacer les disques des datacenters par des SSD de 8 To peu chers
Grâce à une nouvelle NAND 3D en 64 couches, Micron parvient à baisser le prix de ses unités Flash au format SATA, de sorte qu’elles coûtent autant que des SSD avec cinq fois moins de capacité.
Plus de capacité pour moins cher. Micron lance ces jours-ci ses nouveaux SSD 5200 TLC 2,5 pouces en SATA, qui atteignent 7,68 To de capacité au tarif de 0,35 dollars par Go, afin d’inciter les exploitants de datacenters à remplacer tous leurs disques capacitifs par des modèles Flash bien plus rapides et résistants.
« Ces disques SATA se destinent aux applications plutôt basées sur la lecture intensive, comme les bases NoSQL ou les tiers de stockage qui contiennent les images disque de la virtualisation et du VDI, puisque nous atteignons 95 000 IOPS en lecture aléatoire 4K sur un bus 6 Gbits/s », commente Nicolas Maigne, en charge du Business Development pour la zone EMEA chez Micron. « Leur capacité record, surtout, permet d’économiser de la surface au sol, car la concurrence propose au mieux des modèles SSD 2,5 pouces en 3,84 To, voire 1,92 To ; les capacités similaires ne sont atteignables habituellement qu’avec des unités 3,5 pouces qui ne sont pas compatibles avec les serveurs denses ».
Selon l’expert de Micron, le format SATA représente encore aujourd’hui plus de 50% de la demande des datacenters. « Le format NVMe, plus cher d’environ 35% à capacité égale et incompatible avec les tiroirs de disques en production, ne deviendra pas majoritaire avant 2020 », assure-t-il.
Les Micron SSD 5200 devraient rapidement être disponibles au catalogue de tous les constructeurs d’infrastructure.
Un rapide calcul permet d’estimer que le modèle à 7,68 To serait tarifé à environ 2.500€ par son fabricant. À titre comparatif, et même en partant du principe que les fournisseurs de serveurs afficheront un prix plus élevé du fait de leur marge, ce prix est jusqu’ici celui d’un SSD TLC aussi rapide (entre 540 et 600 Mo/s) mais avec cinq fois moins de capacité.
64 couches pour faire baisser le prix et repousser la Loi de Moore
Le double record en capacité et en prix est rendu possible par une conception des dies en NAND 3D comportant pour la première fois 64 couches.
L’année dernière, Micron avait déjà lancé des SSD 5100 aux capacités similaires, mais construits avec des dies de 32 couches et pour un prix un peu plus cher de 0,55 dollars par Go. En pratique, les SSD 5200 sont composés de dies de 64 Go (512 Gbits), alors que les SSD 5100 utilisaient des dies de 32 Go (256 Gbits) deux fois plus nombreux.
« Empiler les couches nous permet désormais de réduire les prix car, sur un même wafer avec le même nombre de dies lithographiés, nous produisons deux fois plus de capacité pour un coût similaire », commente Nicolas Maigne.
Surtout, consent-il à dire, cet empilage de couche évite à Micron les coûteux problèmes industriels liés à la Loi de Moore. Ainsi, si les usines de Micron parviennent aujourd’hui à graver des circuits NAND avec une finesse de 16 nm, les dies en NAND 3D qui équipent les SSD 5100 et 5200 seraient gravés, eux, avec une finesse de 40 nm. C’est-à-dire avec des contraintes techniques éprouvées depuis environ dix ans, donc théoriquement bien moins chères à résoudre.
« C’est toute l’idée de la NAND 3D : nous gagnons quelques années pour continuer à respecter la Loi de Moore avant de tomber sur une difficulté trop importante à résoudre », dit Nicolas Maigne.
Sur le court terme, Micron ne prévoit pas de lancer des SSD 5200 avec une capacité supérieure à 7,68 To. « La demande se concentre encore sur les capacités de 2 et 4 To. Nous ne voulons pas trop la devancer, même si techniquement, nous sommes à présent capables d’aller bien au-delà », indique Nicolas Maigne.
Des performances en TLC aussi bonnes que la concurrence en MLC
En matière de performances, les Micron SSD 5200 obtiennent des scores similaires en lecture continue (540 Mo/s), en écriture (520 Mo/s) et en endurance (1 fois la capacité entière du disque écrite par jour pendant 5 ans), voire un peu supérieurs, à ceux des Intel DC S4500 et Samsung PM863a (tous deux en NAND 3D, avec 3,84 To maximum), ainsi qu’à ceux des SanDisk CloudSpeed Eco Gen2 et Toshiba HK4R (eux en NAND 2D, ou « planaire », avec 1,92 To maximum).
On note que Micron et Intel (qui partagent encore les mêmes usines) ont opté pour des cellules TLC - soit 3 bits par cellule - alors que le marché s’enflamme en ce moment pour les cellules QLC, qui contiennent 4 bits et promettent donc d’offrir encore plus de capacité.
« Le problème actuel des cellules QLC est que leur plus grande densité ralentit les performances des SSD. Nous estimons que rester pour l’heure en TLC nous permet d’avoir le meilleur compromis », justifie Nicolas Maigne. Il est cependant possible qu’Intel et Micron proposent des modèles en NAND 3D QLC d’ici à 2019, juste avant l’arrêt de leur collaboration industrielle.
A l’inverse, Samsung, SanDisk et Toshiba utilisent, eux, des cellules MLC (2 bits par cellule) qui, tout en étant moins capacitives que les TLC, auraient théoriquement dû être plus rapides. Manifestement, Micron serait parvenu à maintenir de bons résultats à la fois grâce à un design appelé CuA (CMOS under Array), qui raccourcit les le trajet des signaux dans les couches, et à son firmware FlexPro, qui programme la logique de fonctionnement des circuits. Ce design permettrait à Micron d’afficher une durée de vie moyenne de 3 millions d’heures quand la concurrence n’annonce que 2,5 millions d’heures.
Moins endurants que les modèles précédents
La NAND 3D a tout de même des conséquences. Sur les SSD 5100 et 5200 standard, dits « ECO », la vitesse d’écriture aléatoire chute au fur et à mesure que la capacité augmente : de 33 000 IOPS pour le modèle à 480 Go, on passe à 10 000 IOPS pour celui à 7,68 To.
Il en va de même pour l’endurance, puisque le modèle à 480 Go de capacité supportera 870 To d’écriture au fil de sa vie (soit 1800 fois sa capacité), alors que celui à 7,68 To acceptera 8,4 Po (soit un peu moins de 1100 fois sa capacité). L
La conception en 64 couches pénalise quant à elle la vitesse d’écriture et la durée de vie sur les modèles dits « PRO », vendus pour supporter des écritures plus intensives que les modèles ECO. On passe ainsi de 38 000 IOPS en écriture sur les SSD 5100 PRO, à 32 000 IOPS sur les SSD 5200 PRO, et d’une endurance de 8,8 Po sur le SSD 5100 PRO en 1,92 To à 5,95 Po sur le SSD 5200 de même capacité.
Dans les deux cas, Micron botte en touche en expliquant que ces SSD conçus pour la lecture intensive n’ont pas besoin de plus de durée de vie, laquelle serait de toute façon supérieure aux modèles équivalents chez la concurrence.
La gamme ECO comprend cinq modèles : 480 Go, 960 Go, 1,92 To, 3,84 To et 7,68 To. La gamme PRO est disponible en 960 Go et en 1,92 To. En revanche, contrairement aux SSD 5100, les SSD 5200 ne sont étonnamment pas déclinés au format M.2 (NVMe) qui supporte pourtant de meilleurs débits en se connectant au bus PCIe.
Micron a toutefois annoncé en décembre dernier une déclinaison pour les postes de travail, sous la référence Crucial MX500, avec 2 To de capacité mais sans le tampon mémoire qui protège les écritures en cours des coupures de courant et qui caractérise les SSD « entreprises ».