EMC : croissance insolente, mais profits stables
EMC a vu son CA progresser de 9% mais son bénéfice stagner. La faute curieusement à VMware, dont les bénéfices ont reculé, mais aussi à la guerre des prix sur le stockage. LeMagIT revient en détail sur la transformation en cours chez EMC au travers de l'analyse de ses résultats.
EMC a enregistré une progression de 9% de ses ventes au 3e trimestre 2014 à 6,03 Md$, mais a vu son bénéfice rester stable, à 587M$ contre 586 M$ l’an passé. Globalement, la bonne nouvelle pour le n°1 mondial du stockage est que toutes ses activités sont officiellement en croissance. Le problème est que les marges sont en baisse dans le stockage et que VMware a vu ses coûts déraper sur le trimestre. LeMagIT revient sur un trimestre compliqué pour le numéro un mondial du stockage et de la virtualisation.
L'ensemble des activités du groupe sont en croissance
Le stockage, qui reste la principale source de revenus du groupe, a vu son CA bondir de 7,3%. Selon EMC, les systèmes de sauvegarde ont progressé de 6%, les nouvelles plates-formes (Xtremio, VIPR et Scale IO) de 47%, ce qui veut sans doute dire que la croissance a été marginalement plus faible pour les plates-formes traditionnelles comme VNX, Isilon et VMAX.
Parmi les autres activités du groupe, l’EMC Information Intelligence Group (Documentum, Infoarchive…) voit son CA progresser de 3%, une bonne nouvelle pour une activité qui a longtemps stagné, voire reculé. RSA poursuit son développement avec une hausse de ses ventes de 3,5%. Mais c’est encore une fois VMware qui décroche le pompon de la croissance des ventes avec un bond de 17,3% de ses revenus (on le verra plus loin, la performance est bien moins glorieuse en matière de rentabilité).
Terminons enfin avec le puzzle du trimestre : selon les derniers chiffres d’EMC, Pivotal a vu ses ventes progresser de 23% sur un an, passant de 47 M$ à 58 M$. Seul petit problème, les tableaux de données fournis par EMC cette année pour Q3-2013 ne sont pas en phase avec ceux de l’an passé, qui créditaient Pivotal de 80 M$ de CA… Selon les chiffres auxquels on se fie, Pivotal aurait donc soit progressé de 23% soit reculé de 27,5% (une explication se trouve sans doute dans le fait que les chiffres trimestriels sont en général non audités et que l’audit annuel aura déplacé des revenus d’un trimestre à un autre ou noté une erreur dans les chiffres de Pivotal l’an passé, mais EMC n’a fourni aucune explication dans sa présentation sur cette incohérence…).
Stockage : des ventes solides mais la guerre des prix affecte les marges
Dans tous les cas, le constat est que les ventes ont été solides dans le monde. Pour la rentabilité, c’est une toute autre histoire. Sans surprise, la marge brute de la division stockage a continué à s’effriter. Elle s’établit à 55,2% contre 55,7% l’an passé, pas de quoi verser une larme pour un vendeur de matériel (les vendeurs de serveurs rêveraient de tels chiffres), mais la confirmation d’une tendance à l’érosion des marges (près de 2 points perdus en l’espace de 18 mois). Cette érosion a été compensée par un effort sensible sur les coûts de structure et les coûts commerciaux, puisqu’en deux ans, ceux-ci ont reculé de près de 80 M$. L’investissement en R&D s’est en revanche poursuivi (il était de 356 M$ pour EMC II au 3e trimestre 2012 et il est passé à 372 M$ au 3e trimestre 2014). En France, la guerre des prix faisant rage, les géants du stockage dont EMC ont accordé des remises exceptionnellement élevées pouvant atteindre, voire dans certains cas extrêmes, dépasser les 80%. Sur un marché où EMC est le leader historique, la firme a été prise d’assaut par ses concurrents et a fermé toutes les écoutilles se battant pied à pied pour chaque contrat. Une bataille enragée, qui se traduit au moins provisoirement par une érosion des ventes, mais surtout des marges, le stockage généraliste étant de plus en plus vu comme un consommable où un constructeur peut facilement en remplacer un autre. La photo est sans doute moins sombre dans d'autres pays, mais cette érosion des marges est sans doute en partie ce qui explique le rachat de VCE par EMC. Avec ses systèmes convergés, VCE devrait permettre à EMC d’avoir un débat beaucoup plus global avec ses clients de nature à préserver un peu plus les marges qu’une simple discussion d’épicier sur le coût du stockage au gigaoctet. Et surtout le contrôle de VCE va lui permettre d'aller se battre en direct contre les HP, Dell et autres Fujitsu et Hitachi…
Marges : les dérives de VMware
Si la maison mère a fait preuve de contrôle, cela n’a pas été le cas chez VMware, au moins pour le 3e trimestre. Il faut dire qu’alors que la firme produisait une version de vSphere avec une précision d’horloger tous les mois de juillet ou d’août, la prochaine version majeure, toujours en développement, ne devrait sans doute pas être officiellement disponible avant le tout début d’année prochaine, un décalage qui pèse sans doute sur les revenus. Si VMware affiche une marge brute digne d’un Microsoft, près de 86,5% au 3e trimestre, soit un léger recul de 2 points par rapport à l’an passé, les dépenses G&A et commerciales ont bondi de 18,9% tandis que les dépenses de R&D bondissaient de 26,4%. La conséquence est visible : l’an passé au 3e trimestre, le bénéfice net de VMware était de 303 M$. Cette année, il n’est plus que de 289 M$. Il sera donc intéressant de voir si avec la sortie de vSphere 6, mais aussi avec le lancement d’EVO :Rail, VMware renouera avec la croissance des bénéfices.
Croissance : l'Europe en vedette, devant les USA et les émergents
Notons pour terminer et rassurer les euro-déclinistes, que la croissance de la firme a été la plus forte dans la zone EMEA, avec 15% de croissance, soit loin devant les 8% de la zone US et très loin devant l’Asie-Pacifique (4%) et l’Amérique latine (1%). La « vieille Europe », couplée au Moyen-Orient et à l’Afrique, a ainsi réussi à faire mieux que les 13 pays émergents dits BRIC +13 qui n’ont progressé que de 9%... En cela, EMC confirme des tendances déjà observées chez HP ou IBM qui hier notait un recul de 2% de ses revenus aux US et en Europe, mais un plongeon de 9% de l’Asie-Pacifique et de 7% des BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine). C’est peu dire que la performance d’EMC, n’a rien à voir avec celle de Big Blue…