Dreamforce 2014 : entente cordiale entre Salesforce et Microsoft
Les relations entre les deux éditeurs ont toujours été tendues. Mais, les choses changent avec l’arrivée de nouveaux produits. Le nouveau responsable de Windows explique pourquoi.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que les relations entre Salesforce.com et Microsoft ont été houleuses ces dernières années. Mais la conférence Dreamforce 2014, qui s’est tenue cette semaine à San Francisco, montre que les choses sont en train d’évoluer.
En fait, elles ont déjà radicalement changé. En témoigne l’invitation lancée par Marc Benioff, PDG de Salesforce.com, à Tony Prophet, nouveau responsable de Windows chez Microsoft, à venir le rejoindre sur scène, ou l’arrivée prochaine de produits issus de la collaboration entre les deux éditeurs.
De nouveaux produits pour rendre les outils de Salesforce et de Microsoft interopérables
Le premier d’entre eux est l’application mobile Salesforce1 for Windows. Depuis que Microsoft a décidé d’unifier ses Windows, il est difficile – hors contexte - de savoir si un interlocuteur parle de l’OS pou bureau, pour serveur ou de celui pour terminaux nomades. Ici, il s’agit bien d’une application développée par Salesforce.com pour les smartphones sous Windows 8.1 (Windows « Phone » donc). Actuellement en beta test privé, l’app Salesforce1 for Windows devrait être disponible au deuxième semestre 2015. « Mais les utilisateurs peuvent d’ores et déjà accéder à Salesforce1 sur leurs terminaux sous Windows 8.1 via leur navigateur », rappellent les deux acteurs.
Deuxième annonce de ce Dreamforce 2014, Salesforce for Office. Plus qu’une solution, Salesforce pour Office est une gamme de produits. Salesforce Files, disponible à partir d’aujourd’hui, permet d’utiliser directement des documents gérés par Sharepoint dans le CRM en ligne. Une déclinaison pour mobiles (Android et iOS) permettra de consulter et de modifier dans Salesforce.com ces mêmes documents hébergés dans Sharepoint, mais aussi ceux de OneDrive for Business (l’espace de stockage professionnel de Microsoft). Cette app devrait être disponible sur l’AppStore et sur Google Play début 2015.
Date à laquelle une nouvelle Salesforce1 App for Outlook est également promise. Cette extension a pour but – en sens inverse - de consulter et de gérer, directement dans Outlook, des informations hébergées par Salesforce (contacts, agenda, etc.). Cette app/extension fonctionnera avec Outlook 2013, Exchange Server 2013 et Office 365.
Côté analytique, sujet au centre de ce Dreamforce 2014, l’intégration entre Power BI (l’outil BI de Microsoft lié à Excel et Office 365) et Salesforce est prévue pour début 2015. « Avec ces nouvelles intégrations, nos clients pourront mettre leurs données à la fois dans Excel et sur Salesforce pour générer des rapports, visualiser leurs informations et découvrir de nouvelles perspectives », expliquent les éditeurs. Première manifestation concrète de ce travail, Power Query (l’outil d’exploration multi-source d’Excel/Power BI) s’ouvre à Salesforce.com. Sa préversion est actuellement disponible.
Une collaboration rendue possible par les changements à la tête de Microsoft
On le voit, le temps n’est plus aux chamailleries mais bien à la collaboration.
Sur scène, Marc Benioff a souligné publiquement que ce sont les changements de l’équipe managériale interne chez Microsoft qui avaient grandement contribué à faire table rase du passé (des changements qui vont de l’arrivée de Satya Nadella au poste de PDG à la place de Steve Ballmer, au nouveau président, John Thompson - issu des rangs d’IBM et de Symantec - en passant par la nomination à la tête de Windows de Tony Prophet, un ancien de HP).
« C’est un des signes les plus importants qu’il y a bien un nouveau Microsoft : les gens sont nouveaux – y compris à la tête de l’entreprise » a ainsi lâché un Marc Benioff amical, contrastant radicalement avec un de ces tweets de 2010 : « Microsoft peut se payer des pubs anti-Salesforce dans le Wall Street Journal, protester contre notre évènement clients, et même nous trainer en justice. Mais ils ne peuvent pas arrêter le Cloud. La Force est avec nous ! ».
L’ouverture et l’interopérabilité, nouvelles exigences des clients
Cette nouvelle relation pourrait étonner puisque que les deux éditeurs sont concurrents, Microsoft proposant également son propre CRM (Dynamics CRM), y compris en mode SaaS. Mais Tony Prophet explique cette évolution par le fait que la compétition traditionnelle entre fournisseurs de solutions a été relayée au second plan par la nécessité de créer des écosystèmes ouverts, qui conviennent aux besoins des clients, et qui ne les lient pas à un seul fournisseur
« Nous sommes une entreprise qui vend une plateforme. Il faut penser écosystème. Il faut être concentré sur ses partenaires », résume Tony Prophet. « Les écosystèmes qui mènent le monde aujourd’hui sont des écosystèmes ouverts. Nous allons vers cela parce que c’est ce que nos clients exigent »
Plus largement, ce partenariat symbolise bien les deux tendances en cours chez Microsoft, qui se définit désormais comme une société « Cloud first, Mobile first ». La première consiste à passer de technologies et de produits très majoritairement propriétaires à des standards plus ouverts et à plus d’interopérabilité. La deuxième est de remettre les exigences des clients au centre de sa stratégie (une stratégie qui ne soit plus dictée par des guerres intestines sans fin).
Microsoft ne peut se permettre d’ignorer Salesforce.com dans sa stratégie « Cloud first, mobile first »
Ces deux exigences sont devenues impérieuses avec l’avènement du Cloud et de la mobilité. Les entreprises savent en effet que les utilisateurs n’acceptent plus aujourd’hui d’avoir des logiciels qui ne sont pas intégrés nativement à leurs applications et qui n’ont pas un fonctionnement intuitif.
C’est en ayant ce point à l’esprit que Marc Benioff posa une question taquine sur la sortie de la beta de Windows 10, blaguant sur le fait que Microsoft avait décidé de passer directement de Windows 8 à Windows 10. « Mais qu’est-il arrivé à Windows 9 ? ». Pour mémoire, Windows 8 avait essuyé de nombreuses critiques négatives sur son interface et son ergonomie, en rupture totale avec les habitudes de ses utilisateurs traditionnels, symbolisée par la disparition du bouton « Démarrer ».
Pour conclure, Marc Benioff demanda au nouveau responsable de Windows pourquoi ce partenariat était devenu si prioritaire pour le « nouveau Microsoft ».
Réponse on ne peut plus claire de Tony Prophet : « si vous dîtes que vous allez être un leader d’un monde « mobile first, Cloud first » et que vous n’entretenez pas de relations avec les leaders reconnus de ce monde-là… ce que vous dites tombe à plat. Donc peu importe le nombre de marchés où vous pouvez être concurrents par ailleurs… vous devez collaborer avec ces leaders. Cela n’en rendra votre plateforme que plus forte ».