Alcatel finalise la cession de sa division entreprises à China Huaxin
La division entreprise d'Alcatel Lucent est aujourd'hui passée sous pavillon chinois, avec la finalisation du rachat d'Alcatel Lucent Entreprise par le fonds public China Huaxin.
Alcatel-Lucent a annoncé aujourd’hui la finalisation de la vente de sa filiale Alcatel-Lucent Entreprise à China Huaxin Post & Telecommunication Economy Development Center. Alcatel conservera 15 % du capital de la société et percevra 202 M€ en cash pour le solde de sa participation. Lors de l'annonce des discussions entre les deux firmes, en février 2014, Alcatel-Lucent Entreprise avait été évalué à 268 M€.
Comme nous le soulignions dans notre article « Alcatel, un constructeur de plus en plus chinois », China Huaxin Post & Telecommunication Economy Development Center, China Huaxin (prononcez « Oua – Chine ») est une société créée le 21 janvier 1993 par l’État chinois et dont le capital était historiquement contrôlé par la SASAC (State-owned Assets Supervision & Administration Commission), l’agence qui gère les participations de l’État dans les entreprises. Dans un jeu de poupées russes, la participation de la SASAC dans China Huaxin a été transférée en juillet 2011 à la China Reform Holdings Corporation.
Cette dernière n’est en fait qu’une des 117 « filiales » de la fameuse SASAC. Plus intéressant encore, elle est la société qui détient la participation de l’État chinois dans Alcatel Shanghai Bell, la coentreprise chinoise d’Alcatel-Lucent, qui rassemble la plupart des actifs de l’équipementier dans l’empire du milieu.
Bref, pour faire court, Alcatel Shanghai Bell, le principal actif d’Alcatel et Alcatel-Lucent Entreprise sont désormais la possession du même fonds d’investissement souverain chinois.
Objectif : doubler le CA en cinq ans
Dans une conférence téléphonique organisée ce matin avec la presse, Michel Emelianoff, le Président d’Alcatel-Lucent Enterprise France a indiqué que la désormais ex-division entreprise d’Alcatel Lucent emploie moins de 3000 employés dans le monde (pour un CA inférieur à 1Md € par an). L’ambition de la firme et de son actionnaire chinois « serait de doubler la taille de ce business pour figurer dans le Top 3 des secteurs que l’on veut adresser ».
La recette miracle selon Michel Emelianoff : « sélectionner des opportunités par secteurs ou géographies sur lesquels nous allons concentrer nos investissements. Et transformer la société pour passer d’une société centrée sur les produits vers une société axée sur les résultats (‘business outcomes’) ».
Selon le patron d’Alcatel-Lucent Entreprise France, « Huaxin est prêt à supporter nos investissements organiques mais aussi à nous épauler dans nos acquisitions […]. On veut doubler le CA en 5 ans, et il faudra en passer par des acquisitions ». Aucune information n’a toutefois été fournie sur les plans de croissance de l’entreprise ou sur l’évolution de la localisation de ses effectifs dans le monde.
Michel Emelianoff a en revanche indiqué avoir identifié trois domaines dans lesquels Alcatel Lucent aurait une avance sur ses concurrents. Tout d’abord le domaine des nouveaux usages de la communication grâce notamment à l’architecture OpenTouch, permettant de délivrer des services de communications de façon transparente aux terminaux fixes et mobiles. Ensuite les SDN, pour lesquels Alcatel Lucent Entreprise a isolé de « vrais cas d’usage ». Enfin, le cloud et particulièrement le SaaS, dans lequel la firme affirme pouvoir délivrer des solutions de communication de façon plus flexibles que ses concurrents.
L'épineuse question du nouveau pavillon chinois
La question de l’éventuelle menace que ferait peser le rachat du n° 3 européen des communications d’entreprises sur ces mêmes entreprises a, quant à elle, été balayée. Pourtant, avec la cession d’Alcatel-Lucent Entreprise, c’est le dernier grand industriel européen des communications d’entreprise qui passe sous contrôle chinois, ce qui ne manquera sans doute pas de poser question chez certains grands clients.
Alors que dans les années quatre-vingt-dix, elles pouvaient choisir entre Nokia, Ericsson, Siemens, Matra-Nortel ou Alcatel pour leurs solutions de communication, les entreprises européennes en sont désormais réduites à choisir entre grands fournisseurs américains et grands fournisseurs chinois pour leur téléphonie, leurs outils de communication et leurs réseaux. Les plus paranoïaques diraient entre équipements infiltrés par la NSA et équipements infiltrés par le Ministère de la Sécurité de l’État et ses homologues militaires chinois…